Travailleurs et travailleuses du secteur public, privé, mixte et informel ont célébré la Fête internationale du travail dans un contexte socioéconomique difficile. L’occasion mise à profit par le mouvement syndical pour soumettre au gouvernement et au patronat les revendications de la classe ouvrière.  

Mercredi 1er mai, c’est la Fête internationale du travail célébrée à travers le monde. Sous le thème Amélioration des relations de travail en période de transition, les travailleurs guinéens, le mouvement syndical, le patronat et le ministère du Travail et de la fonction publique se sont retrouvés au stade de Coléah (Matam). Chant, danse, défilés… L’ambiance était bon enfant.  Bouches bâillonnées, des journalistes membres du SPPG, Syndicat des professionnels de la presse de Guinée, fer de lance de la lutte contre le musèlement de la presse et la restriction de l’internet sous la junte, ont défilé. « Plus de 500 emplois détruits, libérez la presse ! » ; « La liberté de la presse est non négociable », lisait-on sur les pancartes.

Amadou Diallo, le coordinateur du Mouvement syndical guinéen, déclare que la paix sociale n’est possible que dans la justice sociale. Il affirme que la classe ouvrière mesure « à juste titre les efforts » du gouvernement, mais attire son attention sur les éléments constitutifs et les normes internationales liées à la protection sociale : disponibilité du système de sécurité sociale, couverture complète des risques sociaux, accessibilité aux prestations sociales.

Cahier des charges

Au nombre des revendications des travailleurs, l’application de la couverture médicale à hauteur de 80 % pour les fonctionnaires, les contractuels de l’Etat, les retraités et les personnes à charge. Ils demandent l’ouverture des négociations internes dans les secteurs privé et mixte afin de revaloriser les salaires de base à hauteur de 70%. « Revalorisation des pensions de retraites des travailleurs déclarés à la CNSS à hauteur de 50% du salaire mensuel payé, l’application de la prime de départ à la retraite à deux mois et demi à compter de décembre 2023, la baisse des tarifs d’acquisition de la carte grise et du permis de conduire, la mise en place de la Commission consultative du travail et des lois sociales (CCTLS), la mise en place du Conseil supérieur de la fonction publique (CSFP) », égrène Abdoulaye Camara, secrétaire général de l’USTG (Union syndicale des travailleurs de Guinée).

Il invite aussi à la mise en œuvre des recommandations de la Conférence internationale tenue à Conakry du 27 au 31 octobre 2022 sur le rôle des syndicats dans la résolution et la prévention des conflits violents et armés en Afrique de l’Ouest, l’application des dispositions de la Cédéao relatives à la libre circulation des personnes et de leurs biens dans l’espace, le respect par les employeurs, le gouvernement et le patronat de tous les accords conclus avec le Mouvement syndical. Les travailleurs veulent également « l’arrêt systématique » des tracasseries routières, la mise hors d’état de nuire des coupeurs de routes, ainsi que la faim du brouillage des ondes des radios et le rétablissement des télévisions des bouquets Canal+ et StarTimes.

Mohamed Habib Hann, de la Confédération générale des entreprises de Guinée (Patronat), se réjouit que le dialogue entre employeurs et travailleurs ait abouti à la mise en place de la Commission indépendante et permanente de consultation, l’adoption de la signature de la convention collective du secteur minier, le « démarrage imminent » des négociations sur des revendications salariales. M. Hann exhorte le gouvernement à promouvoir le dialogue social dans le domaine fiscal, à restaurer la confiance entre opérateurs économiques et administration douanière.

Encore des promesses

Faya François Bourouno, le ministre du Travail et de la Fonction publique, a salué « le dévouement et le courage » des travailleurs et travailleuses guinéen. Pour lui, améliorer les conditions de vie et de travail des Guinéens reste une « priorité constante » de la junte. « Dans la lutte contre la pauvreté, nous restons déterminés à mettre en œuvre des politiques efficaces pour la création d’emplois et l’amélioration de l’employabilité, notamment des jeunes et des femmes. Des actions sont en cours pour répondre à la cherté de la vie.» Il affirme que les revendications syndicales sont les siennes, appelant tous à poursuivre le dialogue « constructif ouvert et permanent » afin que renaît la confiance entre les parties. « Je vous assure que nous sommes entièrement engagés à soutenir les initiatives visant à améliorer les conditions de vie et de travail des Guinéens.»

« Le gouvernement ne veut pas tuer la presse…»

La signature de la Convention collective de la presse privée fait partie des revendications Mouvement syndical. Le ministre Faya François Bourouno assure que  le gouvernement « ne veut ni tuer ni museler la presse.» A l’en croire, dans quelques jours, l’Inspection générale du travail se mettra en rapport avec les acteurs de la presse privée afin d’élaborer la Convention collective de la presse. « Le gouvernement veut un travail décent dans le secteur de la presse. Nous voulons désormais des relations professionnelles formalisées entre employeurs et employés », conclut-il.

Yaya Doumbouya