Suite à l’inestimable cadeau qualifié si justement de « coup de tonnerre » que la Cour Suprême Kényane vient de donner au Kenya, à la Guinée, à l’Afrique et au reste du monde, j’ai envie d’interpeller les Kenyans pour leur dire « Merci, mais, ce n’est pas fini. » Il faut absolument que la reprise du scrutin présidentiel débouche sur la paix, la sécurité et le mieux-être des Kényans pour que la Guinée, l’Afrique, l’Occident, l’Orient et tous les professeurs de démocratie et d’État de droit puissent respirer à pleins poumons.

J’ai envie d’interpeller les censeurs des oppositions africaines, ces observateurs électoraux de tout acabit pour leur rappeler que « le vote des populations africaines dans le calme et la sérénité » ne reflète que leur volonté de choisir librement leurs dirigeants. Le vol, lui, se fait après le vote. J’ai envie d’interpeller ces mêmes observateurs électoraux pour leur demander humblement d’arrêter leurs services et d’aller à la pêche chaque fois qu’un peuple souverain décide d’aller aux urnes.

J’ai envie d’interpeller un certain nombre de Guinéens dont :

Bakary Fofana et Loncény Camara pour louer leur courage de pouvoir, aujourd’hui, s’arrêter devant les Guinéens, les regarder dans les yeux, et continuer à vaquer à leurs affaires succulentes comme s’ils n’avaient pas fait faire à la démocratie, à l’Etat de droit, à la liberté, à la prospérité en Guinée, des pas géants en arrière.

Mamadou Sylla dit Syma, Lamine Sidimé et tous les honorables magistrats de notre justice martyre qui se sont succédé à la tête de la Cour suprême de la République de Guinée, pour leur rappeler qu’à un moment donné de leur vie, ils ont choisi de servir un homme, de se servir d’un homme pour maintenir notre pays dans le marasme le plus total. Ils n’ont même plus besoin de sortir de chez eux pour voir leurs compatriotes dans la boue, mourir par la boue, enterrer dans la boue ; les condoléances, si chères aux Guinéens, présenter dans la boue.

les vénérés fonctionnaires qui ont utilisé l’administration guinéenne en général, l’administration territoriale en particulier, pour maintenir la Guinée dans un processus permanent de fraude électorale plus qu’éhontée. Dont les conséquences sautent aux yeux aujourd’hui. Même si, eux, ils soignent leurs céphalées hors du pays.

Une lueur d’espoir cependant. Il me faut interpeller :

– le Président Alpha Condé pour saluer sa décision de « prendre acte », même si c’est au nom de l’Union africaine qu’il préside, « de la décision de la Cour Suprême du Kenya d’invalider le scrutin du mardi 8 août 2017 et d’appeler à d’autres élections générales qui devront se tenir sous soixante jours. » La prise de position du Président guinéen est à saluer, non pas par mimétisme ou par démagogie, mais parce que c’est la seule qui vaille. Pour l’Afrique. Pour la Guinée. Pour Alpha Condé lui-même. Qui montre, contrairement aux apparences, contrairement à son silence assassin sur le 3e mandat, que le règne de la loi qu’il soutient au Kenya est également bon pour la Guinée. Le respect de la Constitution au Kenya doit se répandre sur tout le continent africain, à commencer par la Guinée qui en a le plus grand besoin. Oui, j’ai envie d’interpeller Alpha Condé pour lui dire que nous avons compris qu’il a compris ! La Constitution est sacrée. Son respect n’implique que dignité, paix et sécurité. C’est exactement ce qu’il a souhaité aux Kényans. Sûr qu’il en sera le meilleur facilitateur pour ces Guinéens-là.

En conséquence, j’ai envie d’interpeller Cellou Dalein Diallo et tous les opposants inquiets de l’avenir du pays et de sa Constitution. Alpha a compris. A eux de comprendre à leur tour qu’il faut accentuer les pressions sur le reste des ordures qui infestent tous les autres domaines de la vie guinéenne.

Laissez-moi interpeller Sadou Keïta, le gouverneur de Labé, le père du 3e mandat et les suppôts qu’il a pu glaner çà et là pour faire écho à sa démagogie, et leur dire qu’ils se sont plantés à vue d’œil. Toute honte bue.

J’interpelle aussi Siaka Barry, l’ancien ministre des Sports pour saluer son courage. Le chemin qu’il a si courageusement indiqué semble coller à celui de l’histoire.

J’interpelle enfin Kéléfa Sall pour lui rappeler que c’est lui, le premier, qui a osé mettre en garde contre « la mélodie des sirènes révisionnistes ». Les Kényans l’ont mis en pratique. Kéléfa, aujourd’hui, l’Union Africaine, l’Afrique, la Guinée et le monde ont les yeux rivés vers toi et ta Cour Constitutionnelle ! Le rendez-vous que vous avez avec tout ce beau monde est plus que redoutable. Rien n’est aussi contraignant que la liberté que vous avez de prendre l’arrêt final pour libérer… ou bâillonner les autres.

Souleymane Diallo