Un certain Faban l’a bien dit : «Alpha Condé s’en va sur la pointe des pieds, la tête basse, les bras ballants, les oreilles pendantes et les poches remplies de lourdes responsabilités.» Pour parler comme Aimé Césaire : Et la junte se taisait. Oubliant qu’elle avait parlé avant le départ du colis pour les Émirats Arabes Unis. Elle croyait mettre ainsi en exergue le côté humain, l’aspect humanitaire du goubernement de la transition : «Les sociétés civilisées protègent même leurs criminels».  Président de la république, Alpha n’avait pas eu la finesse d’esprit de tendre  la même perche à Faux-dé Oussou qui, pourtant, avait fort besoin des services de son ophtalmologue.

Aujourd’hui, la junte est confrontée à une tempête de sable dans un verre clair-obscur de manipulations politiques distillées depuis Dubaï. Son communiqué relatif au commanditaire et à l’exécutant dans « l’affaire d’enregistrement clandestin d’Alpha Condé » prend des allures de diversion. Le médecin  M’Bemba Kaba et le mathématicien Ibrahima Kalil Kaba ont été entendus pour des infractions «d’atteintes à la vie privée, traitements non autorisés de données personnelles,» toutes réprimées par le code pénard guinéen. «Une véritable curiosité juridique», estime un célèbre avocat, qui sait de quoi il parle.

 « Régulièrement entendus, précise le communiqué, les intéressés ont reconnu les faits.» D’accord, mais qui aporté plainte ? Où est-elle, cette plainte ? Exhibez-la, que l’on voie qui l’a signée ! A ce que l’on sache, Alpha est, à la limite, un prisonnier de la junte, non son vassal. Encore moins sa propriété. En plus, il va falloir vérifier si à  84 ans révolus, le Grimpeur n’est pas assez majeur  pour signer lui-même une plainte pour «atteintes à la vie privée, ou des traitements non autorisés de données personnelles» !

En tout état de cause, la junte a tout l’air d’avoir raté le coche. L’humanisme au nom duquel le dictateur a grimpé dans un luxueux coucou pour atterrir à Dubaï s’accompagne forcément de principes intangibles que la junte a violés. Dans tous les pays «civilisés» des bulletins réguliers ponctuent la santé des chefs. Alpha s’est embarqué dans le flou le plus total. Promesse avait été faite que le champion toutes catégories de la division ethnique, de la dilapidation des deniers publics, de la déchirure sans retenue du tissu social rentrerait à Conakry à l’issue d’un mois de soins  médicaux, à lui prodigués aux frais de ses victimes.

En récompense, il se livre à l’exercice quotidien auquel il excelle : la pratique quotidienne  de la dictature. De son luxueux palais de Dubaï, il tient tout seul le congrès du RPG-arc-en-ciel. Tout comme il imposait sa volonté  au RPG depuis  son appartement de la Place d’Italie, au 13è arrondissement de Paris, au milieu de ses années « d’opposant historique.»  Dr. Mohamed Diané en sait quelque chose. Ni la requalification des délits par un procureur de Dixinn, ni les ragots des salons cossus de la capitale guinéenne ne sont à même de  régler la question. La junte est bel et bien dans la nasse d’Alpha. Les Guinéens peuvent valablement se taire.