Mais qu’est-ce qui rend donc si acariâtre la junte au pouvoir au Mali ? Plus frileux qu’elle, tu trépasses ! Ici et maintenant. Depuis le début de l’année, elle expulse des diplomates à tour de bras, sans état d’âme, ni aménité aucune et surtout au mépris des convenances diplomatiques. Le Représentant  de la CEDEAO  à Bamako, Hamidou Boly, a été le premier à essuyer l’ire des colonels du bled. Il lui a été demandé de faire sa valise et d’aller planter ses pénates ailleurs. Peu après, ils sont vent debout contre la France et son Ambassadeur au Mali, Joël Meyer, qu’ils renvoient par-delà sable et océan, en Gaule. Il lui est reproché d’avoir attenté au principe pourtant désormais prosaïque de la non-immixtion dans la fiente d’autrui. Ivre de boulimie guerrière et en pleine euphorie puérile, la soldatesque ne s’arrête pas là. Son nationalisme étriqué, du reste de mauvais aloi, l’amène à dénoncer sa participation au G5 Sahel et à s’en éloigner, effilochant ainsi ses rapports de bon voisinage avec le Niger et le Tchad. Comme l’appétit vient en mangeant, les hommes forts de Bamako viennent de donner un coup de canif dans leurs rapports avec l’ONU en expulsant son porte-voix, Olivier Salgado, dont les propos relatifs à l’arrestation des militaires ivoiriens, à Bamako, n’ont pas été du tout de leur goût.  Pas du tout alors.

La paranoïa des jeunes militaires maliens n’épargne pas leurs partenaires de l’intérieur. On se souvient de l’épisode Bâ Ndaw que les observateurs avisés n’ont pas tardé à qualifier de second coup d’Etat de Goïta. Même l’imam Dicko, lame de fond qui a provoqué la houle qui a déstabilisé Ibrahim Boubacar Kéita (IBK) et ouvert la transition, est entre amer et critique.  

Les  Colonels de Kati ont  dilapidé, par leurs  prises de position ostentatoires, démagogiques et populistes, l’important capital de confiance et d’estime que leur a valu le renversement du régime sulfureux d’IBK. Ils sont en bisbille avec la CEDEAO, la France (qui a nettoyé Gao, Toumbouctou… des djihadistes qui les écumaient), le G5, la Côte d’Ivoire (Abidjan est un gros port du Mali) et l’ONU. Même Toto subodore non seulement un manque de sagesse et de sagacité mais aussi un amateurisme de néophytes, un  dilettantisme. Il n’est pas nécessaire  d’être  un diplomate de  la trempe de  l’Américain Henry Kissinger pour flairer les conséquences catastrophiques des différentes bourdes qui émaillent le pouvoir kaki malien.

Les amis d’hier sont aujourd’hui  vilipendés, voués aux gémonies. On parle même d’invasion par la France et la tentative de Paris de démembrer le pays, à son profit ( cas de l’Azawad). Feignant d’oublier que c’est Dioncounda Traoré, le Président du Mali en exercice, à l’époque, qui avait supplié la France d’enrayer l’avancée des hordes armées qui progressaient inexorablement en direction de Bamako, après avoir occupé villes, villages et hameaux du nord et du centre. L’armée française, les forces tchadiennes et nigériennes d’une puissance de feu dissuasive et d’une admirable combattivité, avaient contraint les terroristes à détaler des zones urbaines pour se camoufler dans les gorges des zones montagneuses.

Qu’importe ! Le Colonel Goïta, ses galonnés, ses lacrous et nombre de Maliens sont vent debout contre la France et ses alliés qui n’auraient pas rapidement éradiqué le terrorisme. Ils ont donc noué de nouvelles amitiés et réchauffé d’anciennes bonnes relations. La Russie et ses mercenaires de Wagner sont les nouveaux amis sur lesquels on compte à Bamako pour pacifier le pays qui va en lambeaux à vau-l’eau. Après quelques coups d’éclat des mercenaires de Wagner, les djihadistes ont repris du poil de la bête, ils viennent de faire une petite balade bruyante du côté de Kati, l’antre de  Assimi Goïta. Histoire de perturber le Colonel et Morphée et de moquer la junte.

Abraham Kayoko Doré