Mardi 15 novembre, 19ème jour du procès des crimes du 28 septembre 2009, 2ème jour de comparution du colonel Abdoulaye Shérif Diaby, ancien ministre de la Santé, poursuivi pour non-assistance de personne en danger, de séquestration, complicité d’enlèvement, coup et blessures volontaires dont il nie les faits. C’est au tour des avocats de la défense de lui poser des questions. L’accusé n’ayant pas chargé ses co-accusés, il aura certainement des questions à décharge. Me Salifou Béavogui n’a posé que quelques questions. Est-ce que c’est le hasard qui vous amène à Coyah ? « Non, j’y vais souvent, les weekends et les jours fériés. J’ai une plantation là-bas et j’y ai construit », répond l’ancien ministre de la Santé. Dès qu’on vous a appelé, vous étiez à Lansanayah-barrage en partance pour Coyah,  vous avez rebroussé chemin. Est-ce qu’on peut vous accuser de non-assistance en personne en danger ? «Non, Maître. Je suis revenu pour aider les gens qui étaient en détresse. »

Dans les PV d’audition, des victimes disent que vous les avez frappé et donné des coups de pieds ? «Je ne l’ai jamais fait. Ce n’est pas dans mon éducation. Je suis médecin, je ne peux jamais le faire ». Parlant du décès du général Lansana Conté, l’avocat a posé la question de savoir si c’est lui qui a constaté la mort de l’ancien président «Oui, c’est moi qui ai constaté la mort du Général Lansana Conté. J’ai préparé son corps avec les médecins légistes». Et un autre avocat de lui poser des questions : Est-ce que vous avez empêché le secours en allant rendre compte au Président ? « Non », répond-il. Quelle était l’attitude du président ? « Il était surpris, il ne m’a même pas laissé s’asseoir, il m’a dit d’aller faire le devis, pour prendre en charge les blessés », répond le Col. Diaby.

Me Lanciné Sylla, avocat de Toumba Diakité, s’est inscrit quant à lui, dans les questions à charge, l’accusé ayant tendance à décharger Moussa Dadis Camara. Tout le monde a constaté que la pharmacie de Donka a été pillée, vous en tant que ministre, vous n’avez pas vu, qu’est-ce que vous cachez ? L’accusé de répondre : « Je ne cache rien, maître. Je vous ai dit je ne suis pas au courant ». Vous avez dit que vous étiez  en route pour Coyah, vous maintenez que c’est le chef d’état-major général des armées qui vous a appelé pour vous informer ? « Oui », répond l’accusé. Est-ce que c’est à lui de vous informer ? « Entre nous militaires, on s’informe ». Vous êtes allés au camp pour prendre des directives auprès du président Dadis ?  «Non, pas du tout ! ».  Vous avez dit que vous avez commis Pr Hassane Bah pour la gestion des corps, est-ce que c’est votre rôle ?  « C’est mon rôle, j’ai usé de mon autorité de ministre de la Santé ». Vous êtes dans un gouvernement, est-ce que vous avez géré cette affaire avec le ministre de la Justice ? « Non ! », répond l’ancien ministre. Vous avez géré avec le président Dadis ? « Non ».

Est-ce qu’il n’y avait pas eu de réunion après le massacre ? « Non ». Est-ce qu’il y a eu une commission pour gérer la crise ? «Sur mandat du gouvernement, j’ai institué une commission technique au niveau du département pour gérer la crise ».  L’avocat rétorque qu’il ne s’agit pas de cette commission. On peut dire que c’était un gouvernement qui ne prenait pas au sérieux cette affaire ? «Je ne réponds pas à cette question », répliqué l’accusé.

Parlant de 22 corps qui se trouvaient au camp Samory Touré, l’avocat pose la question de savoir où se trouvent ensevelis ces corps ? Le colonel Diaby maintient qu’il n’a « jamais vu de corps. Et il n’a pas été informé non plus » de la disparition de corps. A la décharge de Moussa Dadis, Me Jocamey Haba vient avec des questions du genre : Vous êtes ministre de la République, vous avez une délégation de pouvoir du président, cela veut dire que vous pouvez agir selon cette délégation de pouvoir?  « Oui », répond l’ancien ministre. Vous étiez allé chez le président pour lui dire la situation au stade, qu’est-ce qu’il a fait ? « Il m’a donné les moyens pour prendre en charge les blessés ». Et le cliché qu’on vous avait présenté ? «Oh oui, le ministre de la Justice d’alors m’avait présenté un cliché qui se trouvait être celui de Cellou Dalein Diallo, je suis allé présenter au président Dadis, il m’a instruit de prendre en charge tous les leaders. Il a même autorisé que ceux qui voulaient aller se soigner à l’extérieur de s’y rendre ». 

Maître Paul Yomba Kourouma, avocat de Aboubacar Sidiki Diakité alias Toumba Diakité, de lui demander où ont été débarqués les corps ? «Je ne sais pas. Je n’ai vu aucun corps à part ceux qui étaient consignés à la morgue », a répondu le Col. Abdoulaye Chérif Diaby. Qui est venu vous menacer de libérer les corps ? «Maître, c’est vous qui le dites. Je n’ai reçu aucun ordre ».  On a parlé dans les médias partout qu’il y a eu des corps jetés .Est-ce que vous avez demandé des comptes à vos agents ? « Tous les jours, les agents me rendent compte. Mais je n’ai pas vu de corps à part les 57 corps consignés à la morgue », dit l’accusé. Qu’est-ce que vous savez de Toumba ? «Toumba a travaillé avec moi, je l’ai connu en tant que médecin cardiologue au camp Samory, il était mon subordonné, quand j’étais Directeur de la médecine des armées. C’est moi qui l’ai proposé pour être médecin-chef de la gendarmerie », explique l’ancien ministre. Qu’est-ce que vous savez de la participation de Toumba dans ces événements du 28 septembre 2009 ? «Je n’étais pas au stade, j’étais vers Coyah. Je ne sais pas ce qu’il a fait ».  Parlant toujours des corps, l’avocat pose la question de savoir s’il n’y a pas eu de rapport d’autopsie ?  L’accusé répond qu’il n’avait pas la prérogative d’ordonner de rapport d’autopsie. Il persiste et signe qu’il n’avait pas connaissance d’autres corps à part les 57 consignés à la morgue.

Le procès suit son cours, avec les questions des avocats de la défense, au moment où nous allions en ligne.

Mamadou Adama Diallo