Après maints renvois, le procès des présumés bourreaux de feu M’Mah Sylla a repris ce 11 janvier au TPI de Mafanco. Patrice et Daniel Lamah, Sébory Cissé répondent des accusations de «viol, avortement, risque causé à autrui et administration de substances nuisibles». Célestin Millimono, présumé auteur est en cavale. L’audience de ce mercredi a tourné autour des témoignages des professeurs Aboubacar Touré et Houssein Fofana, en service à la chirurgie générale du CHU d’Ignace Deen.

Violée, enceintée par des médecins puis opérée plusieurs fois dans des cabinets médicaux de Conakry, en vue d’interrompre la grossesse, sans succès, feue M’mah Sylla a atterri au CHU Ignace Deen dans un état d’urgence absolue par l’entremise de Djalikatou Soumah, stagiaire à la chirurgie générale d’Ignace Deen. Elle y a passé des jours avant d’être évacuée en Tunisie où elle va décéder. Ses présumés assassins sont jugés actuellement devant le tribunal criminel de Mafanco. A l’audience de ce 11 janvier, le tribunal voulait en savoir davantage sur les rôles joués par les médecins traitants à Ignace Deen. Il a entendu deux des responsables du service chirurgie générale. A commencer par professeur Aboubacar Touré, à l’époque, directeur de la formation. Il confirme que c’est Djalikatou Soumah, son étudiante, qui a favorisé le transfèrement de M’Mah Sylla : « Elle a présenté à mon Assistant une patiente qui avait fait 21 jours de maladie. Un dossier médical a été constitué, elle avait plusieurs lésions digestives, les matières fécales coulaient de partout. Elle avait très mal ». Dr Touré ajoute que la défunte a été immédiatement prise en charge, même si la première intervention chirurgicale n’aurait pas totalement réussi : «Pendant cette opération, ils ne sont pas allés en profondeur. Je peux même appeler cela un pansement. Mais ce ne pouvait pas attendre ». Il a également justifié la décision de l’hospitaliser sans les précédents dossiers médicaux par son état critique : « Si on se mettait à demander des documents, ça allait être au prix de sa vie ». Professeur Aboubacar Touré révèle qu’il était opposé à « toute évacuation de M’Mah Sylla à l’étranger », estimant que la défunte pouvait recouvrer sa santé en Guinée : «Moi, je n’étais pas d’accord. On commence un travail, et c’est quelqu’un d’autre qui veut le finir. Il y avait la pression, on nous a dit que c’est le Président qui a ordonné son évacuation. Sinon, après la deuxième intervention, tout était normal ». Le procureur lui reproche alors de n’avoir pas insisté pour garder la patiente en Guinée : «On ne nous écoutait pas… La machine était déjà mise en branle », rétorque Pr Touré.

A sa suite, c’est son Assistant, professeur Houssein Fofana, le premier à s’occuper de M’Mah Sylla à Ignace Deen qui a fait sa déposition. Selon lui, il a reçu une patiente qui avait une «large plaie sur l’abdomen, des perforations sur tous les intestins. C’était très grave ». Pour ce qui est de la première intervention qu’il aurait pratiquée et qui n’aurait pas réussi, Houssein Fofana donne ses raisons : «On manquait de grands moyens. C’était tellement grave qu’on ne pouvait pas aller en profondeur pour faire une intervention complète ».

Dr Sébory Cissé, co-accusé qui a opéré par deux fois M’Mah Sylla dans sa clinique à Dabompa, a affirmé qu’elle avait l’utérus et les ovaires percés. Les deux témoins ne le confirment pas : «Ses parties intimes étaient intactes. »

Le tribunal a renvoyé l’affaire au 25 janvier prochain, pour la suite des débats.

Yacine Diallo