Je m’empresse de le préciser : ce n’est point un bouquet de fleurs, encore moins un pot de cactus.  Le Lynx reste « anti- personne et pro-rien du tout. » Mais je trouve très audacieux, le voyage, ce 9 novembre, de Mamadi Doum-bouillant en Arabie Saoudite. Ce safari a tout l’air d’une première dans la saga des présidences guinée-haines. Il est peu probable que l’apparition des premiers tracts contre le CNRD soit le meilleur moment pour son président d’effectuer des déplacements d’ordre…diplo-magiques. Même si la recomposition en cours du paysage politique international commande de ne pas se faire Conté les événements. Fory Coco y aurait regardé à deux fois avant de donner le feu vert à toute forme de déplacement. Sûr que l’idée n’en aurait pas effleuré les pensées lumineuses du Responsable Suprême de la Révolution.

 En juillet 1985, « le Coup Diarra » a trouvé le Colonel Conté à Lomé, Togo, en compagnie du Général Eyadéma, Félix Houphouët Boigny et tant d’autres excellences de la CEDEAO. Manifestement, le  chef de l’État guinéen a mal pris les conseils de prudence et l’expression de pitié de ses homologues de la CEDEAO. A leur grande surprise, il s’est entêté pour rentrer à Conakry où, contre toute attente, on lui a rendu son fauteuil chéri. Au garde-à-vous, s’il vous plait !  Le colonel Conté a dû, du coup, mieux comprendre que « les dictateurs ont l’âme sédentaire. » Le mémorable « Wofatara » qui s’en est suivi n’a pas manqué de déteindre sur le reste de son règne chaotique. Aussi, s’est-il abstenu de quitter Cona-cris le 2 et le 3 février 1996 quand, sous l’égide d’Alpha Condé, de nouvelles batteries ont été achetées pour rééquiper les chars de l’armée, malicieusement immobilisés par le chef de l’État. L’opération de déstabilisation tourne court grâce à ou à cause de la présence physique de Fory Coco. Sinon, les carottes étaient presque  cuites encore pour le régime.

Mais tout cela n’est que jeu d’enfant au regard de la densité de sédentarisation présidentielle sous la première République. Peu après la proclamation de l’indépendance, le 2 Octobre 1958, elle va  crescendo pour culminer le 22 novembre 1970. Sékou Touré entre carrément dans la clandestinité. Il se réfugie à Boulbinet, puis à Dixinn, chez Hadja Néné Gallé Barry, avant d’oser rejoindre son Palais improvisé en bunker. De cette époque datent les prières « publiques » de Ramadan et de Tabaski au Palais de la Présidence. Histoire de montrer que « la Révolution n’est pas isolée. »

Il aura fallu attendre la visite en Guinée de Fidel Castro en mai 1972 pour que Sékou Touré soit obligé de sortir de sa capitale. Le Lider Maximo ne pouvait pas quitter la Guinée sans avoir visité les saintes fédérations du PDG qui se disputaient le pays. Première étape : Faranah. L’incontournable BÉA devait conduire l’Honorable délégation, mais Sékou Touré eut la regrettable idée d’accompagner son turbulent hôte de marque jusqu’à la passerelle du coucou président-ciel. Il tend la main à Fidel qui la tient ferme, assez pour entrainer le Responsable Suprême dans la carlingue. Ali Bangoura, le chef de protocole de l’époque, fera des mains et des pieds pour préparer la valise du Chef de l’État, en catimini, et la faire embarquer dans le cargo des gorilles. Toutes une gymnastique.

Quelque cinquante ans plus tard, le voyage du Doum-bouillant à Ryad n’est pas de nature à refroidir les ardeurs de certains fuyards. Disent les Y-voient-rien : « Grande Muette ne parle pas, mais peut  diviser. » Surtout qu’en ce moment, exil fait florès. Et si manip s’invitait ?

Diallo Souleymane