A la plénière du vendredi 22 décembre, au CNT, Conseil national de la transition, le pool économique du gouvernement a présenté le projet de loi des finances initiales (LFI-2024). L’exercice vise à dévoiler les projections budgétaires (recettes et  dépenses) du gouvernement de transition pour l’exercice 2024. Dans ce projet, le budget général de l’Etat enregistre une hausse de 929 milliards de francs guinéens par rapport à la Loi de finance rectificative LFR-2023.

La ministre du Plan et de la Coopération internationale, Rose Pola Pricemou a présenté le cadre macroéconomique du gouvernement, en fonction du Plan de référence intérimaire 2022-2025. « En termes de mise en œuvre du PRI, ce projet de Loi de Finances pour 2024 devrait grandement y contribuer… Les dépenses d’investissement, y compris les budgets d’affectation spéciale, du PLFI-2024 devraient représenter plus de 14% du coût total du Programme de Référence Intérimaire (PRI) 2022-2025… Sur le plan national, en attendant les résultats de l’évaluation de l’impact de l’incendie du dépôt des hydrocarbures à Kaloum, notre économie continue de montrer une résilience remarquable face aux défis mondiaux ».

Selon Rose Pola, le taux de croissance économique de 5,5% en 2022, contre 4.9% en 2021, pourrait enregistrer 5,7% à la sortie 2023 (hors impact de l’incendie). Elle signale que le PLFI-2024, « est fondé sur des hypothèses réalistes : réaliser un taux de croissance économique de 5,4% grâce aux activités extractives ; réaliser un taux d’inflation de 8,9% en moyenne annuelle et stabiliser le taux de change de la monnaie guinéenne par rapport aux devises étrangères, 8 805,7 GNF pour 1 dollar usd et 9 571.7 GNF pour 1 euro ».

Projets et objectifs

Moussa Cissé, patron du département de l’Economie et des Finances, indique que dans le projet de Loi de finance 2024, 380 projets sont inscrits au compte de son volet dépense. Il affirme que la résilience de l’économie devrait se renforcer à court et moyen terme. Ce qui permettrait au pays d’accéder aux ressources de la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et du Fonds monétaire international. « Ce qui devrait à coup sûr permettre d’améliorer le portefeuille de notre pays auprès des institutions de financement du développement ». Il révèle que le budget global d’investissements publics, pour l’année 2024, se chiffre à 14 216 milliards de GNF, dont 6 734 sur ressources propres, et 7 482 sur financement extérieur. « La répartition sectorielle : développement rural et environnement, 1 343 milliards ; mines, énergie, industrie et services 1 729 milliards ; infrastructures et équipements 3 970 milliards ; secteur social, 3 424 milliards ; décentralisation, défense et sécurité pour 3 289 milliards ».

Moussa Cissé soutient que l’objectif du gouvernement est d’améliorer la mobilité des personnes, des biens et services, avec la construction et la rénovation des routes, pistes rurales et aérodromes ; l’optimisation des procédures portuaires et aéroportuaires… ; la promotion du genre et de l’équité dans la gestion de ressources naturelles… ; la professionnalisation et la valorisation du capital humain et des compétences numériques.

434 milliards pour les nouveaux fonctionnaires

Porteur du projet, le ministre du Budget, Lancinet Condé, souligne que le PLFI-2024 repose sur les hypothèses du cadrage macroéconomique. Le but serait d’accélérer l’atteinte des objectifs économiques et financiers définis dans le Programme de référence intérimaire (PRI). « Au titre des recettes, les prévisions sont estimées à 30 388 milliards GNF, contre 29 029 dans la Loi de finances rectificative 2023, soit une augmentation de 1 359 milliards GNF. Cette prévision de recettes se décompose en budget général pour 29 339 milliards et en budgets d’affectation spéciale (BAS) pour 1 048 milliards. Concernant les dépenses, le ministre souligne qu’elles passent de 37 249 milliards en LFR-2023 à 38 030 en PLFI-2024, soit une augmentation de 780 milliards. Il justifie cette augmentation par « la recherche d’une plus grande efficacité dans la gestion axée sur les résultats, afin d’assurer un service public de qualité ».

Lancinet Condé, signale que si les dépenses du budget général augmentent de 929 milliards GNF, le budget d’affectation spéciale baisse de 12,41%. Il souligne que « les charges financières de la dette se chiffrent à 1 406 milliards, soit un accroissement de 343 milliards par rapport à la LFR 2023. Cette hausse s’explique principalement par la prise en compte des échéances des émissions d’obligation du trésor de 2022 et 2023. Les dépenses de personnel sont évaluées à 9 265 milliards ». Une augmentation de 434 milliards GNF, qui prendrait en compte le recrutement de nouveaux fonctionnaires en 2024.

Mises en garde

Le Premier ministre, Bernard Goumou a attiré l’attention des CNTêtards sur la crise que traverse le pays surtout depuis l’explosion du 17 décembre.  « La plupart de nos ministères est à l’arrêts, les entreprises privées qui paient des taxes sont aussi à l’arrêt. Quand le système des transports est à l’arrêt, le dernier village de la République est impacté. Si le gouvernement ne prend pas des mesures idoines, nous pourrons constater des crises suite à l’augmentation des prix des denrées de première nécessité. La situation est grave. Nos compatriotes sont encore sous les décombres.  Nous ne savons pas exactement combien de Guinéens et étrangers ont perdu la vie (…). Les impacts de cette crise sont énormes ».

Il sollicite l’indulgence du CNT et plaide pour que la LFI-2024 soit examinée et adoptée dans un bref délai afin de ne pas freiner le gouvernement dans son élan de faire revenir le pays à la normale.

Promesses

Dansa Kourouma, président du CNT, a promis que le débat parlementaire sur le budget de l’État, qui aura lieu les jours à venir, « ne peut être, ni ne sera un débat stérile. Il sera fécond avec la volonté ferme de bâtir dans le marbre, le bien-être de nos concitoyens… ». Il souligne que le budget de l’État n’est pas « juste un empilement de chiffres. Il est plutôt l’expression chiffrée de notre présent, mais aussi de notre avenir. C’est pourquoi, notre budget doit faire l’objet d’analyses sans complaisance… Nos ambitions doivent s’inscrire de plus en plus sur la voie de la souveraineté budgétaire. Nous devons dépendre de moins en moins de l’aide publique au développement et nous devons compter de plus sur nos forces et ressources ».

Dans les prochains jours, ce projet fera l’objet d’examen en inter-commission au CNT. Il sera passé au peigne fin par les conseillers pour une éventuelle adoption.  

Abdoulaye Pellel Bah