Par culture démocratique et par pur raisons, les Sénégalais ont dénoué une crise politique qui menaçait sérieusement la sérénité de leur vieille démocratie. Macky Sall n’a pas osé franchir le Rubicon, par sagesse ou couardise. On ne peut que louer le sens de responsabilités qui l’a animé à cet instant. Tout le long de ses mandats, le président sénégalaid a alterné bons et piètres actes. La ville nouvelle de Diamniadio  et ses coquets équipements, notamment le stade olympique, sont sortis de terre et constituent des fleurons de l’urbanisation du pays de la Teranga. Bien d’autres infrastructures et d’initiatives de promotion et de renforcement de la bonne gouvernance pourraient être citées.

En dépit de ces bonnes pratiques, la gouvernance Macky a été de manière récurrente, marquée par des velléités de marginalisation et d’exclusion de ses adversaires politiques à travers d’incessants procès contre toutes celles et tous ceux qui tentent de le toiser sur le parcours du combattant qui conduit au Palais présidentiel. Ces procès ont d’ailleurs toujours été perçus comme une chasse aux sorcières.

C’est d’abord Karim Wade qui est poursuivi pour plusieurs délits, l’enrichissement illicite notamment. Karim et Macky n’avaient plus d’atomes crochus. Celui-là avait osé exiger de celui-ci la reddition des comptes relative à la gestion des ressources allouées au sommet de l’OIC organisé à Dakar. Wade père s’était alors fâché avec Macky qui fut, à l’occasion, éjecté du perchoir. Quand la rancune nous tient !

Puis, l’épisode Kalifa Sall. Le tout puissant maire de Dakar a eu l’outrecuidance, comme d’autres de tout temps, d’alléger le budget municipal de quelques billets de francs CFA. Cette peccadille lui vaut d’être jeté et oublié dans les geôles de Reubess. Ni sa stature de maire de la capitale ni ses entregents dans le microcosme politique ne lui ont été de grande utilité !

Enfin le cas de figure le plus épatant est celui d’Ousmane Sonko, le jeune et fringant président du Pastef et maire de Ziguinchor. Sa popularité sans cesse grandissante en a fait l’épouvantail, la terreur de Macky et de ses ouailles. C’est la chienlit qu’il faut tondre et sarcler. Les procès assaillent Sonko et les siens. On ne compte plus les délits : harcèlement sexuel, viols, corruption de la jeunesse, outrage à magistrat. Sonko et son suppléant à l’élection présidentielle, Bassirou Diomaye Faye ainsi que de nombreux dirigeants et militants de partis politiques n’ont été sortis du gnouf qu’à une dizaine de jours du scrutin. Une loi d’amnistie votée par l’Assemblée et promulguée par Macky Sall pour apaiser le Sénégal, les a sauvés.

Comme s’il n’avait pas assez torpillé et effiloché la démocratie, Macky, sur le départ, entreprend des initiatives sans précédent au Sénégal : le report de la date de la présidentielle et la prorogation de six mois du mandat du Président de la République. Contre ces mesures anticonstitutionnelles, une masse critique de l’opposition est vent debout. Saisi, le Conseil constitutionnel retoque le décret attaqué. On n’est pas loin du méli-mélo juridico-politique. Heureusement que le pays regorge de gens en robes noires. Les woba-wobas aboutissent à un consensus : la date de la présidentielle retenue est du goût des uns et des autres. Sonko sort de prison. Karim a eu une perte de mémoire. Il ne s’est pas débarrassé à temps de son statut de binational franco-sénégalais. Tout est bien qui finit bien. Il faut savoir raison garder !

Abraham Kayoko Doré