Après plus de 72 heures de garde à vue, le directeur de publication du journal togolais La Dépêche Apollinaire Mewenemesse a été placé sous mandat de dépôt le 28 mars pour sept chefs d’inculpation, notamment “diffusion de fausses nouvelles”. Reporters sans frontières (RSF) dénonce une décision disproportionnée et exige sa libération immédiate. 

Nouveau coup dur pour la liberté de la presse au Togo. Le 28 mars, le directeur de publication du journal La DépêcheApollinaire Mewenemesse, a été écroué après plus de trois jours de garde à vue à la Brigade de recherches et d’investigations (BRI). Ce journaliste est visé par sept chefs d’inculpation, à la suite de la publication, le 28 février, d’un article sur le meurtre du Colonel Bitala Madjoulba, un proche du président Faure Gnassingbé tué par balle en mai 2020. Sous mandat de dépôt à la prison civile de Lomé, Apollinaire Mewenemesse est désormais en détention provisoire et risque jusqu’à 30 ans de prison.

« L’enfermement d’Apollinaire Mewenemesse montre à quel point l’étau se resserre autour des journalistes et des médias à l’approche des élections législatives au Togo. Le nombre de charges retenues contre lui à la suite de la publication d’un article et la durée de la suspension de son journal sont disproportionnées. Elles visent vraisemblablement à intimider les professionnels de l’information qui enquêtent sur des sujets impliquant des proches du pouvoir en place. RSF demande aux autorités togolaises d’abandonner et de le libérer sans délai », déclareSadibou Marong, Directeur du Bureau Afrique subsaharienne de RSF.

Dans son article, le journaliste met en cause la responsabilité de l’État dans l’affaire du meurtre du colonel Bitala Madjoulba, un proche du président Faure Gnassingbé tué par balle en mai 2020. Selon son avocat, Mewenemesse est accusé entre autres de “conception et publication de nouvelles fausses aux fins de susciter la population ou l’armée à se soulever contre l’État”, “apologie contre la défense nationale et la sécurité de l’État”, “publication par voie de presse écrite d’un écrit ayant porté atteinte à l’honneur à la dignité et à la considération du président de la République”. La diffusion de La Dépêche a été suspendue le 4 mars pour une durée de trois mois par la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (HAAC).

Difficile exercice du journalisme au Togo

Depuis quelques mois, l’exercice du journalisme se complique au Togo et plusieurs professionnels des médias font face à des pressions. En novembre 2023, le directeur de publication du journal Le Flambeau des démocrates, Loïc Lawson, et le journaliste indépendant Anani Sossou ont été emprisonnés pendant deux semaines. À la suite d’une publication sur les réseaux sociaux concernant un ministre, ils ont été poursuivis pour “diffamation”, “atteinte à l’honneur” et “incitation à la révolte”. Ils sont désormais sous contrôle judiciaire. En mars 2023, le directeur de publication et le journaliste de l’Alternative Ferdinand Ayité et Isidore Kouwonou ont quant à eux été forcés de quitter leur pays après avoir été condamnés par contumace pour “outrage à l’autorité”. Le tribunal avait alors émis un mandat d’arrêt international contre ces deux journalistes.

Le Togo occupe la 70e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2023.

Reporters Sans Frontières