L’on apprend à travers une mission du ministère de la Justice et des droits de l’homme, conduite par sa secrétaire générale Marie Irène Hadjimalis, la mort de trois personnes détenues préventivement à la gendarmerie de Coyah. Les autorités judiciaires déplorent des décès qui seraient dus à la chaleur, tout en gardant le silence sur les responsabilités à situer et les sanctions qui devraient suivre.     

Alors que le Conseil national de transition a préféré dissimuler son caustique rapport sur les conditions inhumaines de détention en Guinée (prisons et lieux de garde à vue), la réalité vient nous rappeler que ce n’est pas en cassant le thermomètre qu’on ferait baisser la fièvre. Trois détenus ont perdu la vie dans les locaux de la gendarmerie de Coyah, dans des conditions à éclaircir. Les deux premiers, le 5 et le troisième, le 6 mai. Selon la version officielle, ils seraient morts d’asphyxie due aux excès de chaleur ressentie ces derniers jours.

Inhumés sans expertise

Yamoussa et Mohamed Camara étaient en détention préventive à la gendarmerie, pour des cas de vols aggravés. Mamadou Yaya Bah, emprisonné pour coups et blessures, est lui mort au commissariat central de Coyah, dans les mêmes circonstances, toujours selon la même source. Des informations confirmées par le procureur de la République près le tribunal de première instance de Coyah, Lazare Mamady M’bauret. Alors que des informations faisaient état du refus des familles des victimes d’enterrer les leurs, les deux premiers défunts ont bien été inhumés dimanche. Soit le jour de l’annonce de leur décès, sans qu’aucune expertise n’ait au préalable été faite sur les dépouilles. Cela après la rencontre entre une mission du ministère de la Justice, conduite par sa secrétaire générale Marie Irène Hadjimalis et les familles éplorées.

Le procureur de la République près le tribunal de première instance de Coyah n’a pas souhaité réagir. Il promet de communiquer dans les prochains jours. Le procureur général près la Cour d’appel de Conakry, lui, se refuse à tout commentaire. Il se cache derrière le Code de procédure pénale pour justifier son mutisme. Joint par notre rédaction, Fallou Doumbouya répond n’avoir aucun compte à nous rendre. Et aux Guinéens ? « Vous aimez le sensationnel », ajoute-t-il, avant de mettre fin à la conversion téléphonique. Sûrement que pour le procureur général, la mort de trois Guinéens dans des conditions non élucidées ne mérite pas l’attention de la presse.

L’obligation de faire la lumière

N’empêche, les autorités administratives et judiciaires ont l’obligation de faire la lumière sur ces homicides. Les victimes ont été enfermées dans des cellules inadaptées et exigües. Les responsables de la gendarmerie, accessoirement ceux du TPI de Coyah, sont censés être informés de la surpopulation carcérale. Ils devaient prendre les dispositions pour prévenir l’irréparable. Mieux, il est étonnant qu’aucun surveillant n’ait entendu les plaintes des victimes. Les autorités annoncent un reconditionnement des anciens locaux de la prison civile de Coyah, pour y transférer les détenus, en attendant la fin des travaux de la nouvelle maison carcérale. Il faut rappeler que la gendarmerie de Coyah sert de lieu de détention depuis juin 2023, suite à l’attaque contre la prison civile qui avait entraîné l’évasion de bandits de grand chemin.   

Yacine Diallo