Après des années de division, le patronat guinéen a tenu ce 20 avril son assemblée générale constitutive. Ansoumane Kaba, PDG de l’entreprise Guiter S.A, a été bombardé Prési de la Confédération générale des entreprises de Guinée, une nouvelle structures censée réunir tout le monde.

Finies les querelles intestines et autres crises de jalousie qui polluent l’atmosphère entre les hommes d’affaires guinéens? L’espoir reste permis, du moins pour le moment. Une trentaine de poids lourds du monde des affaires guinéen se sont retrouvés dans un seul patronat. Ils ont élu, le 20 avril, Ansoumane Kaba dit Kaba Guiter à la tête de la Confédération générale des entreprises de Guinée, CGE-GUI pour un mandat de quatre ans. C’était à l’issue d’une assemblée générale constitutive tenue ce samedi 20 avril dans un réceptif hôtelier de Cona-cris. Les membres du conseil d’administration de la nouvelle structure : Kerfalla Person Camara dit KPC, Ismaël Keïta, Habib Hann, El Hadj Alsény Barry, Mamadou Bobo dit Super Bobo…Ils ont validé les nouveaux textes (Statuts, Règlement intérieur et Code d’éthique).

Présidée par le PM Amadeus Oury Bah, la cérémonie a mobilisé opérateurs comiques, syndicaleux, membres du goubernement… Le locataire du Palais de la Colombe se félicite de l’unification du mouvement patronal guinéen, appelle les hommes d’affaires à changer de paradigme. « Le dirigeant politique n’est pas maître de tout. Le monde politique n’existe que lorsqu’il est au service du monde économique. Nous sommes tenus de vous accompagner pour qu’il y ait plus de richesse et plus de redistribution.» La porte du gouvernement est ouverte au patronat à tout moment, a-t-il rassuré : « Nous allons vous solliciter souvent, parce qu’il est de notre mission de travailler avec vous, avant de prendre des décisions qui vous impliquent. »   

Ambitions

Ansoumane Kaba n’en espère pas moins. Son ambition : faire de la CGE-GUI un cadre d’échange avec les gouvernants en vue de développer et de réformer, si nécessaire, le secteur privé ; amener la douane et les impôts à desserrer l’étau autour des entreprises, rechercher ensemble les moyens de construire une économie forte. L’élu se dit conscient de l’immensité de la tâche et est prêt à trouver des solutions bénéfiques à tous.

Il s’engage également à faire le pas vers les fédérations encore réfractaires à suivre la dynamique. « Les entreprises, grandes ou petites, de toutes les branches professionnelles, nous irons les voir afin que nous puissions conduire le plaidoyer auprès de nos gouvernants.» Ansoumane Kaba veut, pendant son mandat, amener les autorités à mettre en place la Cour d’appel et la Cour de cassation du commerce, avec comme juges consulaires des professionnels du secteur.

  

Soutien

El Hadj Alsény Barry, Prési de la Coordination nationale des Fulbè et Haali pular de Guinée, a lui aussi apporté son soutien au nouvel élu, mais non sans rappeler les défis qui l’attendent : « Les opérateurs économiques ont choisi la Guinée au détriment de leurs intérêts personnels. Ansoumane Kaba doit savoir qu’il est attendu au tournant par tous les opérateurs économiques. Il est désormais le pont entre le syndicat, le patronat et le pouvoir. Il doit se battre pour que les choses se passent bien.» Le patriarche de rappeler : « Si nous avons aujourd’hui un patronat, c’est parce que la politique ne s’y est pas mêlée. Si c’était le cas, on ne se serait pas entendu. Nous félicitons le pouvoir du fait qu’il ait accepté de nous laisser choisir celui qu’on veut. Nous avons choisi Ansoumane Kaba.»

Des fédérations frondeuses

Avant même cette sélection, des fédérations patronales avaient haussé le ton. Elles accusent Kaba Guiter et son groupe de les avoir tenus à l’écart. Les fédérations des transitaires, des ferrailleurs, des boulangers, des pêcheurs, des agriculteurs se sont fait entendre le 16 avril lors d’un point-presse. « Le patronat est composé des entreprises, des associations socioprofessionnelles, des confédérations et des fédérations. Aucune assemblée ne peut se tenir sans leur participation. Nous nous sentons exclus, nous sommes partie intégrante du patronat », s’était plaint Kélétigui Touré, secrétaire gênant de la faîtière patronale des transitaires.

Cette frange du patronat avait juré, la main sur le palpitant, d’empêcher par tous les moyens que l’assemblée générale constitutive ait lieu. Mais  le jour J, ils n’ont pas pointé du nez. Les lieux étaient quadrillés par une horde de flics et de pandores.

Pour la CGE-GUI, il n’y a pas eu d’exclusion. Sa secrétaire gênante, Maria Diané, justifie l’exclusion des frondeurs par ce qu’elle qualifie de désordre. « A l’image de la pluralité des patronats qui existaient, on était confronté à celle de fédérations socioprofessionnelles. A chaque fois qu’on invitait le président d’une fédération, on se retrouvait avec 4 à 5 présidents. On n’arrive pas à trouver un interlocuteur fiable. Notre mission, dès après cette assemblée générale, c’est d’unifier les fédérations où règne aujourd’hui un désordre total. Il faut que chaque secteur ait un représentant ».

Maria Diané précise que la CGE-GUI privilégie les riches chefs d’entreprise aux débrouillards. « Ce sont ces grands patrons-là qui composent le conseil exécutif du patronat unifié ». Comme quoi le patronat, même unifié, n’est pas pour l’indigent.

Yacine Diallo