La décharge publique de la Minière (située au quartier Dar-es-Salam 2) aménagée sur une ancienne carrière en 1980 ne devait servir que durant 20 ans, avant sa délocalisation alors prévue à Kagbélen. Près d’un demi-siècle après, Cona-cris continue d’y déverser ses 1600 tonnes d’ordures chaque jour.

Au départ, la fosse où les ordures sont jetées était de 20 mètres de profondeur. Aujourd’hui, n’est visible que l’immense montagne d’ordures qui surplombe Dar-es-Salam et ses environs. Sur les lieux, des nombreux camions font la navette pour déposer les ordures. Le site est devenu saturé.

Déplacer la montagne d’ordures

Amara Sylla, riverain de la charge, a construit sa maison en 1977. A l’époque, la décharge se trouvait à Kénien, à l’en croire. Une fois déplacée, la fosse aménagée permettait de retenir les odeurs. Mais avec l’urbanisation de Cona-cris, elle est devenue petite. « Il faut que l’État délocalise cette décharge ici », alerte M. Sylla.

La délocalisation, c’est un mot qui revient dans toutes les conversations avec les riverains de la décharge. « Nous voulons sa délocalisation, nous éprouvons des difficultés à vivre ici. Quand la saison sèche pointe, nous humons la fumée. En saison pluvieuse, des inondations et des odeurs nauséabondes s’y dégagent. On a fait des démarches auprès des autorités, mais en vain », renchérit Lanciné Sylla, responsable de la jeunesse de Dar-es-Salam 2.

Le PM Amadeus Oury Bah sur le site

En visite à la décharge de la Minière, le 12 avril, le Premier ministre Amadeus Oury Bah a échangé avec certains riverains dont Amara et Lanciné Sylla. Pour le visiteur, la problématique de la décharge est à prendre au sérieux : « Au-delà de la question de l’occupation de l’espace, il y a celle d’urgence nationale. Il y a quelques années, pendant la saison des pluies, un éboulement a fait des morts. Ce serait inadmissible que quelques années plus tard, par négligence ou laxisme, d’attendre qu’il y ait un nouveau drame pour réagir. » Ce 22 août 2017, neuf personnes avaient été ensevelies par les ordures, après des fortes pluies dans la capitale.

Il faudrait, avant la saison des pluies, trouver des solutions alternatives et efficaces pour parer au plus pressé. « Dans les semaines à venir, il y aura une communication précise sur les mesures que le gouvernement prendra en ce qui concerne l’avenir de la décharge de Dar-es-Salam. Et avec l’aide de Dieu, j’espère que cela nous permettra de récupérer un espace urbain qui a besoin d’être assaini pour une meilleure salubrité de la ville de Conakry », conclut Amadeus Oury.

Le quotidien difficile des travailleurs

La visite du PM réjouit Lanciné Sylla : « C’est une joie immense, on ne s’attendait pas à l’arrivée du Premier ministre ici. Il était venu voir la situation du terrain, ce qu’il pouvait faire à présent pour la délocalisation à Kouria, Coyah ». « Une énième visite qui ne débouchera sur rien », pronostique un travailleur pessimiste à la décharge qui a requis l’anonymat. Il travaille ici quotidiennement depuis 2012. D’après lui, beaucoup de ministres et hauts cadres sont venus auparavant faire des promesses sans lendemain.

Au sommet de la montagne d’ordures, certains y trouvent leurs subsistances. Des jeunes, adultes et femmes trient les déchets à la recherche d’objets réutilisables, tandis que d’autres ramassent des sachets d’eau pour des fins de recyclage. Difficile de les faire parler. « Personne ne veut être vu dans ce travail. Nous ne sommes là que parce qu’on n’a pas où gagner notre vie », explique l’un d’eux sous le sceau de l’anonymat.

Un travail par défaut, très risqué pour la santé. Selon le responsable de la jeunesse de Dar-es-Salam 2, la plupart des habitants de son quartier se rendent à l’hôpital pour des problèmes respiratoires. « Quand nous partons chez le médecin, il nous dit d’arrêter de fumer. Or, moi par exemple, je ne croque même pas la cola », témoigne le travailleur de la décharge.

Les conséquences sont aussi la destruction de l’environnement causée par la fumée et la pollution dégagées par la décharge.

Diarouga Aziz Balde