Certains de nos dirigeants veulent que tous les Guinéens courbent l’échine en renonçant à la défense de leurs droits. Mais Bambeto dit non. Bambeto n’est même plus l’appellation d’un quartier. C’est un symbole: le symbole de la lutte et de la résistance contre les abus, les dérives autoritaires, les violences d’État. Sans «Bambeto», on serait peut-être depuis un bon moment dans un autoritarisme sans limite. «Bambéto» reste le dernier rempart contre l’instauration d’un régime de plus en plus liberticide. C’est pourquoi, «Bambeto» est diabolisé et violemment «maté» quand il y a des manifestations. «Bambéto» dérange car il n’a pas la docilité et la résignation que nos dirigeants attendent de nous.

Lorsqu’il y a des manifestations politiques, il est difficile parfois de contrôler les casseurs. Il en est ainsi partout. En Guinée, très peu  d’opposants avaient d’ailleurs condamné les violences survenues lors des grandes manifestations de janvier et février 2007. Les rares condamnations, si condamnations il y avait eues, étaient de pure forme. Certains opposants semblaient même se réjouir du fait que les manifestants aient pu chasser tous les administrateurs territoriaux d’alors. C’est cette capacité de résistance et cette détermination de tant de Guinéens qui profitent aux dirigeants actuels que «Bambeto» garde encore. Sans «Bambeto» la junte militaire qui avait renversé ce qui restait du régime Conté aurait peut-être rendu le pouvoir aux civils mais quand et dans quelles conditions ?

«Bambéto» n’est pas l’axe du mal mais une zone parmi tant d’autres où il existe encore des citoyens qui ont la capacité de s’indigner et de se battre pour obtenir de meilleures conditions de vie, le respect des libertés et droits fondamentaux. Des citoyens capables de dire «non» quand il le faut. Il appartient aux pouvoirs publics de définir une véritable politique de maintien d’ordre. Cela contribuerait à n’en pas douter favoriser une meilleure gestion des manifestations.

Comme indiqué plus haut, dans tous les pays du monde, il existe des individus violents, des délinquants, des vandales qui s’infiltrent dans les manifestations pour casser, piller, blesser. Il y a même des bandits qui, après les manifestations, se mettent à attaquer et à détrousser de paisibles citoyens. Mais le rôle d’un État est de faire en sorte de mettre ce type d’individus hors d’état de nuire tout en laissant les libertés s’exercer librement. Cette double exigence implique que les agents de forces de maintien d’ordre soient suffisamment bien formés et dotés d’outils appropriés  pour concilier la protection de l’ordre public et le respect des droits et libertés des citoyens, en particulier le droit de manifester.

Lors des manifestations qui se sont produites il y a quelques mois à Kankan relativement au problème de courant électrique et suite aux affrontements entre forces de l’ordre et jeunes manifestants, le leader du PADES disait  que les jeunes ont les mêmes réactions et quand les forces de l’ordre viennent les gazer sans motif, ils réagissent en leur jetant des cailloux.

Cela ne suffit pas à faire d’une zone « l’axe du mal».

Me Mohamed Traoré