Dans le Batè (Kankan, Nabaya), ville d’origine du gêné-râle Mamadi Doum-bouillant, les
bandits règnent en maître absolu. Ils opèrent en plein jour, enchaînent braquages et meurtres
au nez et à la barbe des farces de défense et de sécu-ratée.

La ville de naissance du Prési de la transition, située à près de 700 km à l’est de Guinée, ne
dort plus sur ses deux oreilles. Chaque jour qui passe a son lot de braquages armés, parfois
suivis de meurtres. Leur cible principale, les sociétés de transfert d’argent. « Depuis le mois
de Ramadan, l’insécurité a pris un élan inacceptable. Des bandits de grand chemin ont coalisé
pour faire du mal à la population de Kankan. Hier (mercredi 17 avril) aux environs de 15h,
trois bandits, sur une moto, ont attaqué un kiosque Orange Money. Ils ont emporté une
somme de 17 millions et tué un jeune innocent sur leur passage », a déploré le colonel
Mamadi Condé, commandant du camp de la troisième région militaire de Kankan, dans une
déclaration lue devant la presse le lendemain (18 avril) du braquage.
Deux morts et un fugitif

Les quidams seront repérés à Dalala, un village situé à environ 5 à 6 km du centre-ville de
Kankan. Les villageois, aidés des donzos (chasseurs traditionnels), ont « organisé une
battue », confie au Lynx Louncény Chérif, Prési du Conseil régional des organisations de la
société civile de Kankan. Suite à des échanges de tirs, un des fugitifs a été tué ; un autre mis
aux arrêts par les donzos et le troisième s’est enfui avec le larcin. Le bandit interpellé a été
présenté au gouverneur de région, puis transféré au camp militaire de la ville. Il a déclaré que
leur complice, une nounou, habite au quartier Bordo. « De 23h à 2h du matin, il nous a fait
tourner à travers Kankan, poursuit le colonel Condé. Sur la route de Kissidougou, au quartier
Bordo, il a sauté du véhicule pour tenter de se cacher dans les bois. Les rumeurs de leur
arrestation avaient déjà commencé à circuler. Nous ne savions comment venir expliquer à la
population de Kankan que le bandit nous a échappé. C’est ainsi que les agents ont pris leur
responsabilité. Il a été abattu dans sa course. Les deux corps ont été transférés aux services
compétents pour examen. L’arme saisie sur le bandit et les deux boîtes chargeurs bien garnies
sont à notre disposition ici au camp pour toute fin utile. »
Entre peur et questionnement

Une tournure des événements qui suscite inquiétude et interrogations dans le Nabaya. « Nous
sommes très inquiets de ce qui se passe actuellement à Kankan. Des bandits qui opèrent en
plein jour et à visage découvert, en dépit de la présence de la Brigade anti-criminalité, la
police et la gendarmerie départementale », s’indigne le Prési du Conseil régional des
organisations de la société civile de Kankan. « Un bandit qui saute d’un véhicule rempli
d’hommes en uniforme, escorté par trois autres véhicules ! Pourquoi ne l’ont-ils pas menotté ?
Pourquoi ont-ils préféré l’abattre au lieu de le poursuivre et l’arrêter ? Les populations sont
remontées contre la gendarmerie. Elles soupçonnent des complicités au sein des forces de
défense et de sécurité », ajoute Louncény Chérif.
Motus et bouche cousue

Les autorités sécuritaire et judiciaire ne sont pas très loquaces sur le sujet. Contacté par notre
rédaction, le commissaire central de police de Kankan, Ibrahim Hamid Touré, a argué n’avoir
pas l’autorisation de parler à la presse. « Laissez-moi me référer à ma hiérarchie », a répondu
l’officier de police. « Une commission mixte d’enquête gendarmerie-police a été mise en
place. Des nombreuses procédures ont été ouvertes ; nous avons avancé dans les
interpellations. Les services de sécurité sont en branle, les recherches se poursuivent »,
rassure le pro-crieur de la République près le tribunal de première instance de Kankan.
Marwane Baldé s’est toutefois gardé de donner le nombre de personnes interpellées au motif
que l’affaire est encore au niveau des Officiers de police judiciaire. En dehors des deux
quidams abattus, l’opinion n’est au courant d’aucune interpellation. Elle déplore
l’insuffisance de communication.

Kankan a enregistré cinq braquages armés en trois semaines. Bilan : trois morts (deux bandits
et un citoyen) et environ un milliard de francs glissants emportés.

Diawo Labboyah