Alpha Grimpeur a glissé quasi insidieusement dans l’intoxication… durable. Il en a étalé les dernières prouesses le 31 décembre 2019. Dès le début de son discours de nouvel an, il a filé aux Guinéens une calamité intellectuelle des plus inattendues, une inexactitude des plus horribles en guise de cadeau de nouvel an. « L’année 2019 qui s’achève aujourd’hui, marque l’entrée de notre pays dans la dixième année du processus démocratique que nous avons inaugurée ensemble en 2010…» Il faut le dire, l’assertion donne la chair de poule. Mais la sagesse africaine veut que vous piétiniez de temps en temps l’aveugle quand vous dansez avec lui. Juste pour montrer à ce dernier que vous êtes là. Si nous continuons à nous taire, il ne faudra pas s’étonner que Président-Grimpeur ne perde entièrement le sens de la mesure. Alpha Condé, père de la démocratie ? C’est sa dernière trouvaille au titre de l’année 2019.

Un petit coup d’œil en arrière, l’on se rend compte que ce genre de cadeau de nouvel an n’est même pas une première. D’assistant à la Sorbonne, il est à présent « le Professeur » de tous les Guinéens. Certainement grâce aux vertus de la technique de …saute-mouton. Le plus naturellement, le plus rapidement du monde. Si, dans le cursus universitaire, il a été possible de gommer les grades de maître-assistant et de maître de conférences pour tomber, que dis-je ? pour grimper directement sur un piédestal de professoral, pourquoi hésiterions-nous à faire naître notre processus démocratique en 2010 ? En tout cas, en termes de manipulations et de récupérations, l’histoire nous a plutôt bien favorisés. Rien ne semble grave dans ce pays. Aucune affirmation n’est assez invraisemblable pour surprendre.

En 1958, nous avons obtenu l’indépendance et la liberté « grâce à la générosité de Sékou Touré.» Toute affirmation qui s’en écarte ne saurait relever que de la contre révolution et ses suppôts intérieurs et extérieurs. Même s’il est de notoriété publique que le PDG était le dernier parti politique en Guinée à appeler à voter « non.» A deux semaines du référendum du 28 septembre. La fermeté d’Ismaël Touré a poussé le PDG à opter pour l’indépendance et la liberté. Barry Diawadou, Barry III, Fodé Mamoudou Touré, Karim Bangoura, Mamba Sano, le PRA dans son ensemble, avaient débordé Sékou Touré par la gauche pour choisir le « non. » Ce n’est pas avec Alpha Condé que les mensonges et les manipulations ont commencé à tordre le cou de l’histoire de la Guinée. Le 31 décembre 2019 n’aura été qu’une audace de plus.

On sait aussi que l’indépendance et la liberté, chèrement, nouvellement acquises, n’auront prospéré que pendant deux ans. Du 2 octobre 1958 au 14 avril 1960 date du « premier complot » contre le régime. Avant que l’histoire du pays ne balance entre crimes et délations pour alimenter le complot permanent. Jusqu’à l’arrivée au pouvoir du Président Grimpeur le 21 novembre 2010. Mais n’en déplaise aux falsificateurs de l’histoire, un militaire très peu cultivé avait eu l’audace de restaurer les principes démocratiques enfouis dans les geôles du Parti-État pour permettre au député Alpha Condé de réaliser de brillantes interventions au Palais du Peuple. Avec la collaboration de feu Facinet Béavogui, que l’histoire réhabilitera un jour. Au CMRN que l’équipe Conté avait monté, était venu s’ajouter le CTRN pour doter le pays de lois plus ou moins scélérates, mais des lois quand même. La démocratie finit par s’exercer plus ou moins régulièrement dans le pays. A la mort de Fory Coco, la transition militaire pointe du nez. Alpha Condé lui-même ne doit pas avoir oublié ses propres performances en matière d’émasculation du CNT et tout ce qui pouvait bouger à l’époque. La démocratie kaki, signée Fory Coco et Dadis et Konaté, amorce un reflux indéniable qui a abouti à la naissance de la démocratie guinéenne le 31 décembre 2019. Non, monsieur Condé, le processus démocratique n’a pas commencé en Guinée en 2010. Merci de revoir votre copie !

DS