Le procès d’Abdourahmane Bella Bah, membre du FNDC s’est poursuivi, ce mercredi 5 février, au tribunal de première instance de Kaloum. L’activiste est inculpé pour diffusion et mise à disposition d’autrui des données de nature à troubler l’ordre ou la sécurité par le biais d’un système informatique, de communication de fausse information par le biais d’un système informatique, de menaces notamment de violence ou de mort par le biais d’un système informatique. Des faits prévus et punis par les articles 28 ; 31 ; 32 et 35 de la Loi 037 relative à la Cyber sécurité et à la protection des données à caractère personnel. L’audience d’aujourd’hui a été consacrée aux plaidoiries et réquisitions. Le pro-crieur, Ousmane Sankhon, déjà énervé par le comportement de l’accusé qu’il juge inadéquat lors des débats, n’est pas allé de main morte. Il demande au tribunal de : « retenir Bella Bah dans les liens de la culpabilité. De le condamner à trois ans d’emprisonnement et à deux millions d’amende. Lui-même a reconnu à la barre ici être l’auteur de 19 des 35 déclarations incriminées ». Même que le “représentant du mystère public” ne trouverait pas à redire si le juge Mohamed Diawara prenait sur lui la décision d’accorder au prévenu de larges circonstances atténuantes : « Comme il a reconnu les faits, c’est à vous d’apprécier la teneur des faits, en le condamnant peut-être à une peine d’emprisonnement avec sursis. Mais ce que nous regrettons, c’est qu’il n’a manifesté aucun remord. Il a continué à avoir le même comportement ». Le pro-crieur s’est finalement rétracté vu les attaques de la défense dans ses plaidoiries : « Je n’ai jamais dit de le condamner avec sursis ».

Les avocats (sans vinaigrette) de la défense, eux, plaident non coupable et s’en prennent au parquet : « Ces publications ne constituent même pas une infraction. Les faits dénoncés par monsieur Abdourahmane Bella sont réels. Ne pas le reconnaître relève d’une cécité hors norme » assure le bâtonnier Mohamed Traoré. Me Salifou Béavogui de renchérir : « Il se passe beaucoup de choses dans sa circonscription (pro-crieur, ndlr), mais il ne peut rien. Dans cette affaire, il n’y a ni crime ni délit, c’est simplement pour intimider. Notre justice a une spécialité, c’est de se jeter sur les faibles, les sans défense. Quel est le procureur qui ose poursuivre un citoyen qui soutient la nouvelle Constitution, qui est de la CODENOC ? » Me Thierno Souleymane Barry, lui, estime que les gouvernants veulent tout simplement briser l’avenir d’un activiste encombrant : « Il n’a fait que relater ce qui se passe. C’est une personne qu’on veut détruire parce qu’il est libre d’esprit. En l’envoyant en prison, vous ferez une injustice envers la société. Celui qui est là est d’une pureté inclassable. Ceux qui font honte sont de l’autre côté. Je sollicite humblement le renvoi de Bella Bah des fins de la poursuite ».
Le juge Mohamed Diawara décide de délibérer sur siège. Il déclare l’activiste coupable des faits qui lui sont reprochés, mais le condamne à un an d’emprisonnement assorti de sursis et au paiement d’une amende de 20 millions de francs glissants.
Libre, Bella Bah réitère sa détermination à continuer la lutte contre le tripatouillage constitutionnel : « Je remercie mes avocats qui ont abattu un travail énorme, je salue le courage du juge. Malgré toutes les pressions qu’il a subies il a tenu bon pour rendre cette décision. Depuis le 25 janvier, ce kidnapping n’a jamais changé ma foi. Ma conviction est toujours qu’il n’y aura ni referendum ni nouvelle Constitution ni de 3e mandat. Il faut rapidement se mettre au travail pour empêcher le coup d’Etat constitutionnel qui est prévu le 1er mars. Un activiste ne peut en aucun cas être ébranlé par un kidnapping ou par la prison, c’est son chemin ».
Les avocats de la défense ont également salué la libération de l’activiste, loué le courage du juge Mohamed Diawara, mais ont surtout décidé de contester la décision devant la Cour d’appel de Cona-cris.
Yacine Diallo