Discrètement, Kabinet Cissé s’est abrité sous un faux parapluie pour se hisser au sommet de la CENI, la pyramide de l’éternelle tricherie électorale guinéenne. Comme Damaro à l’Assemblée nationale, personne n’a vu ce monsieur venir. Il a eu tout le loisir de refiler le tintamarre de l’arrivée à Mamadi Kaba 3 dont l’appétit pour le fauteuil de feu Me Salif Kébé sautait aux yeux du dernier aveugle du pays. Il remplit naturellement toutes les trois conditions requises pour occuper le poste : la nécessaire bénédiction de la Coordination mandingue, le militantisme déguisé au RPG et son appartenance remarquée à la société civile du gouvernement.
On peut dire que le topo a marché si l’on en juge par les réactions plus que timorées de l’Opposition plurielle. Dr. Ousmane Kaba du PADES estime que les membres ont la qualification requise. «Le problème est de savoir s’ils seront réellement neutres. En plus, ils doivent savoir que l’avenir du pays se trouve dans leurs mains. Ils ont une responsabilité particulière, celle de jouer les arbitres neutres…»
Il faudra plus qu’un miracle pour que la CENI de Kabinet Cissé se mue en une institution républicaine indépendante, digne de ce nom. Il est impossible d’effacer en un jour une gouvernance exécrable instaurée depuis la création de la CENI voici une décennie. En 2020, une CENI indépendante dans le vrai sens du terme n’est tout simplement pas à l’ordre du jour. Les tares congénitales de notre vénérable institution ne peuvent disparaître du jour au lendemain. Les quatre prédécesseurs de Kabinet Cissé ont, chacun de leur côté, apporté une touche particulière à la mal gouvernance actuelle. Feu Ben Sékou Sylla qui cumulait ses fonctions de patron du CNOSOC et de la CENI, bénéficiait de pouvoirs si étendus qu’il pouvait annuler des bureaux de vote d’un trait de plume. Un certain Alpha Condé voulait en profiter en 2010. Le premier coup d’œil sur le lit de mort de Ben à Paris a complètement ramolli le candidat du RPG. Il serait sorti de l’hôpital sur la plante des pieds.
Arrive Loucény Camara, accompagné de la réforme de la CENI par les soins du Conseil National de la Transition. « Des deux côtés, le mal est infini. » La coalition de l’opposition n’a pas permis au CNT de mener à terme sa volonté d’accoucher une CENI technique. Pour une fois, nos terribles opposants, d’Alpha Condé à Cellou Dalein Diallo, en passant par Sidya Touré et tout le reste du gotha, se sont efficacement ligués pour imposer une CENI politique…paritaire. Mon œil ! Le Ministère de l’Administration du Trottoir a réussi à y arracher deux places exclusivement dédiés au service du pouvoir. Gagnés qu’ils sont, à la Bourse de la corruption. Le CNT s’en est galamment accommodé. Loucény Camara, célèbre collecteur de fonds du RPG, est venu y exercer ses talents de président-militant, avec une rare efficacité. Jusqu’à l’avènement de Bakary Faux-Fana, connu pour ses exploits rpégistes à ciel ouvert, que feu Kébé aura la lourde tâche de remplacer. L’intermède de Kabinet Cissé ne devrait être qu’un juste retour des choses. C’est « le petit » de Bakary Faux-Fana au CECIDE. Tout le monde le sait.
DS