Le mal guinéen est très profondément enraciné dans le pays et depuis trop longtemps le peuple en souffre; les choses doivent changer et il existe un remède. Les modèles de la première, deuxième et troisième Républiques ont échoué en Guinée parce qu’ils n’ont pas été bâtis sur un projet de société dans lequel liberté et alternance démocratique font bon ménage ; ce mariage de raison est pourtant une nécessité.
Depuis l’indépendance, voilà bientôt 62 ans, l’État guinéen se singularise par son omniprésence et sa violence sans retenue dans l’impunité totale ; le tout, accompagné aujourd’hui par une cupidité et une corruption inqualifiables à l’endroit des ressources de la nation. Sans doute cette violence est-elle née de la négation de l’Etat de droit. Au fil du temps, les responsables qui sont censés défendre l’intérêt général au sein de l’Etat, Chef de l’État, membres du Gouvernement et de l’Administration, se sont tout permis, violant impunément et systématiquement les règles et lois dont le pays s’était doté. Un tel comportement est un mauvais exemple qui divise et empoisonne de plus en plus la société guinéenne qui cherche désespérément la voie de la vraie démocratie par l’alternance démocratique nécessaire en 2020.
Or, Alpha Condé, avec sa nouvelle Constitution issue des pseudo-élections du 22 mars 2020, veut imposer son pouvoir au-delà de son mandat constitutionnel qui arrive à échéance à la fin de cette année, comme le stipule la Constitution de 2010.
Pourquoi une nouvelle transition ?
La volonté du Président Alpha Condé de se maintenir au pouvoir au-delà de 2020 crée une situation de conflit exacerbé entre la majorité du peuple de Guinée et la minorité qui soutient le régime RPG d’Alpha Condé, à qui on laisse croire sans le moindre doute qu’il seul apte à conduire l’avenir de notre pays. C’est une situation grave qui menace l’existence même de la Guinée dans ses frontières héritées de la colonisation. Les séquelles de cette stratégie d’Alpha Condé pour confisquer le pouvoir se font sentir aujourd’hui à travers les campagnes des partis politiques où le facteur régional ou ethnique occupe une place indue.
Pour sortir de cette grave crise politique et éviter une guerre civile au pays, la Transition n’est pas une des voies possibles, c’est la seule.
Que programme pour la transition ?
La question fondamentale est de savoir ce qu’il faut faire et comment le faire en évitant les errements de la première Transition dirigée par le Général Sékouba Konaté en 2010. Une fois hors d’état de nuire, la centaine de « bandits en col blanc » qui gravitent autour d’Alpha Condé, la tâche la plus urgente et la plus ardue qui attendra les autorités de la nouvelle transition est la restauration de l’État républicain et l’application effective de toutes les lois issues de la Constitution de 2010.
Pour atteindre cet objectif, qui conditionne tous les autres, l’équipe de transition devra :
1/ Restaurer l’autorité des institutions issues de la Constitution de 2010 : Cour Suprême, Cour Constitutionnelle, CENI, Conseil Economique et Social, etc…
2/ Dans l’intérêt du peuple guinéen et sous le contrôle des institutions prévues dans la Constitution de 2010, remettre en ordre la gestion courante des affaires publiques et assurer prioritairement la sécurité des biens et des personnes.
3/ Procéder, dans le respect de la Constitution de 2010, aux élections démocratiques des assemblées (communales, régionales et législatives) en dehors de toute influence et pressions et dans la pluralité et la transparence.
4/ Ces missions accomplies, et le pays apaisé et adossé à ses institutions représentatives, l’Autorité de Transition pourra procéder à l’organisation de l’élection présidentielle en respectant les règles fondamentales de la démocratie.
Ainsi, celui qui aura été choisi par le peuple souverain de Guinée aura en face de lui un État avec des Institutions fortes, inscrites dans la pratique de l’équilibre des pouvoirs prévus par la Constitution ; plus tard, s’il s’avérait nécessaire, un simple toilettage de la Constitution de 2010 pourrait aussi être envisagé pour asseoir de manière pérenne et irréversible le fonctionnement démocratique de la République de Guinée.
Diallo Mamadou Lamarana
Economiste, membre du Bureau exécutif de l’UFDG