Lorsqu’ils ont annoncé leur intention de se tailler une nouvelle « constitution », tout Guinéen doté d’un minimum d’intelligence savait que c’est le chemin qu’il voulait emprunter pour arriver à un troisième mandat. Ils ont soutenu partout que les deux questions n’étaient pas liées et qu’ils voulaient tout simplement doter le pays d’une constitution légitime. Certains se sont laissé convaincre ou ont fait semblant d’avoir été convaincus par cet argument. Des acteurs de la société civile et autres leaders politiques acquis au projet ont d’une certaine manière largement contribué à donner du poids à cet argument, se rendant ainsi complices de la mort programmée de notre jeune démocratie. L’Histoire retiendra le rôle, bon ou mauvais, joué par chaque Guinéen et chaque Guinéenne dans cette affaire.
Le monde entier sait aujourd’hui que le texte qu’invoquent nos gouvernants comme norme fondamentale n’est pas l’expression de la volonté des citoyens guinéens et manque, par voie de conséquence, de la légitimité qu’ils nous avaient promise. Mais ils n’en ont cure, l’essentiel pour eux était ailleurs. Il leur fallait tout simplement concocter un texte sur lequel ils pourraient se baser pour dire qu’on passe d’une troisième République à une quatrième République et arguer ainsi que tout mandat qui serait octroyé par la suite à l’actuel Président de la République, serait le premier et non troisième. Il n’y a pas un Guinéen de bonne foi qui ne comprend pas que cette argumentation n’est qu’un simple juridisme.
Une fois obtenu ce texte dont on sait qu’il est le fruit d’un faux, d’une falsification sans pareil dans l’histoire constitutionnelle de l’humanité, ils ont aussitôt commencé à lancer le vieux slogan du « changement dans la continuité ». Bien qu’il n’y ait aucun sur le contenu de ce slogan, certains acteurs de la société civile se sont mis à ergoter là-dessus en soutenant que le « changement dans la continuité » pourrait être « une continuité politique » du parti au pouvoir. Un argument ridicule auquel personne ne pouvait croire compte tenu de ce qui a été l’aboutissement dudit slogan sous le régime du Général Lansana Conté. Mais ils sont tellement habitués à prendre les Guinéens pour des moutons qu’ils ont pensé que cela pourrait passer facilement au sein de l’opinion.
Aujourd’hui, il est encore plus clair, comme cela a été le cas dès le départ, et facilement perceptible même pour un aveugle que cette funeste entreprise n’avait qu’un seul et unique but, celui d’instaurer une présidence à vie au profit d’un groupe d’hommes et de femmes décidés à traire aussi longtemps que possible la vache laitière qu’est la Guinée.
Ce qui vient d’être rappelé n’est pas nouveau. Des Guinéens très avisés ont eu à marteler tous ces arguments pour que les uns et les autres prennent conscience de ce qui est en train de se tramer sur le dos du peuple de Guinée. Personne ne peut dire aujourd’hui qu’il manque d’information quant aux motivations réelles de ce projet. Maintenant, la balle est dans le camp de chacun. Soit, on s’engage et on se bat pour le mettre en échec, en refusant la confiscation du pouvoir par un clan; soit on fait ce qu’on sait faire le mieux c’est-à-dire croiser les bras et espérer que les problème guinéens seront réglés par la Providence. Maintenant, la balle est dans le camp des Guinéens. Peut-être qu’on se réveillera de notre sommeil en 2032. C’est-à-dire après les nouveaux mandats de deux fois six ans de l’actuel Président de la République.
MT