Malgré les multiples combats menés par les associations des droits des femmes et des enfants, les mutilations génitales féminines (MGF) sont loin de prendre fin en Guinée. Après la Somalie, notre pays en occupe le deuxième rang mondial. Le 2 novembre, l’Association des Journalistes Unis (AJUA) pour l’Abandon des MGF a animé une conférence sur « le rôle des journalistes pour l’éradication des MGF » à la maison de la presse à Kipé (Ratoma). Sur le podium dame Binta Nabé, membre de l’Association des Journalistes Unis pour l’Abandon des MGF a rendu hommage à ses prédécesseurs, « Je rends un vibrant hommage à Dr. Mariama Djelo Barry et Dr Mory Sanda Kouyaté, qui depuis près de 30 ans luttent contre les MGF, d’ailleurs c’est eux qui nous ont montré la voie. Ils ont osé pour la première fois en parler à tous les niveaux et aujourd’hui nous ne le regrettons pas parce qu’il y a eu beaucoup d’avancée. Même si certains disent le contraire mais force est de reconnaitre qu’il y a eu des avancées. Mais lutter contre une valeur culturelle n’est pas chose facile, c’est une lutte de longue haleine. Le fait que les femmes, les hommes, et les religieux s’asseyent pour en parler c’est une avancée majeure. Il faut le reconnaître. »
De poursuivre, « la deuxième chose, c’est le fait que les lois soient prises, sur le plan textuel il n’y a pas de difficulté maintenant. On peut s’auto saisir même pour interpeller les personnes qui le pratiquent. On peut le faire en tant qu’organisation de presse, en tant qu’organisation de femmes et de jeunes qui luttent contre ces violences. Donc on est habilité à se constituer partie civile en lieu et place des victimes et de leurs parents. Nous pouvons dénoncer également les complices. C’est important de signaler aussi qu’à vue d’œil, on ne peut pas voir une femme et connaitre si elle a subi l’excision ou pas mais de nos jours les filles sont fières de s’afficher pour dire qu’elles ne vont pas subir l’excision. Il y a des associations de jeunes filles qui le disent à qui veut les entendre à visage découvert, avant on n’osait pas le dire parce qu’elles étaient stigmatisées », se félicite-t-elle.
Pour dame Binta Nabé, il ne s’agit pas de dire aux femmes qui pratiquent l’excision ce que vous faites n’est pas bon, c’est plutôt leur faire comprendre que les conséquences de cette pratique est néfaste pour l’épanouissement et la santé de la jeune fille, surtout de la femme en général. « Pour eux, ils sont sur la logique mais il y en a qui sont convaincus que c’est quelque chose qui n’est pas bon mais elles sont minoritaires à y penser. Mais malheureusement, les plus écoutés et les plus influents, ce sont les leaders communautaires et les communicateurs traditionnels. Il y a aussi des vieilles femmes qui sont écoutées par d’autres femmes, également des religieux qui sont écoutés par les fidèles. Donc, c’est par eux que nous journalistes devons passer pour faire comprendre les autres ».
Dame Binta sollicite également l’implication des hommes dans cette lutte « Je demande la complicité des hommes afin d’éradiquer cette pratique néfaste de nos sociétés car cette lutte n’est pas celle des femmes seulement. Les hommes doivent être nos partenaires pour gagner cette bataille. Posez-vous la question de savoir pourquoi lors de mes relations avec ma femme je ne suis pas satisfait. Il y en a qui vont jusqu’accuser leurs femmes en disant c’est parce que tu ne m’aime pas, tu as un autre à qui tu penses. Or tout ça, c’est les conséquences de l’excision » fait -elle remarquer.
El hadj Ibrahima Bambassidi Camara, un guide religieux présent à la conférence a fait savoir dans son intervention que l’excision est une pratique qui a existé avant le Prophète Mohamed (PSL) et n’a nullement n’est écrit dans le coran que si une fille n’est excisée elle deviendra débauche. « C’est une bonne éducation qu’il faut donner à nos enfants. » Ce chef religieux demande aux autres religieux de s’impliquer davantage dans la sensibilisation des parents afin d’éradiquer cette pratique de notre société. Au secrétariat général des Affaires religieuses, El hadj Bambassidi Camara, exhorte que le thème « Abandon des MGF » soit intégré dans les activités de sermon des mosquées afin de faire comprendre à ceux qui pensent que l’excision est un acte religieux en soi.
Pour terminer l’AJUA des (MGF) a demandé aux journalistes d’être plus responsables dans le traitement du sujet.
Kadiatou Diallo