L’affaire fait grand bruit, la ministre Djenab Nabaya Dramé a été accusée d’avoir piqué 200 milliards de francs qu’elle aurait glissés dans la nature. Mais l’affaire n’est toujours pas claire pour tout le monde. Ce jeudi 10 décembre, le ministre du Budget, lors d’une conférence de stress, a levé un coin du voile de cette affaire, notamment sur l’aide de l’AFD et du montant alloué à l’organisation des examens et à l’équipement des écoles professionnelles.
Le ministre Ismaël Dioubaté regrette d’abord le fait que la presse ne détaille pas les montants et ne les datent pas non plus, tout est généralisé. Mais voilà ce qu’il sait. «Cela fait 2 ans, le budget prévoit au titre de l’organisation des concours de sortie et des recrutements au niveau de l’enseignement technique 27 milliards de francs guinéens. C’était effectivement inscrit dans le budget du ministère de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle. Les examens devraient être organisés. La première partie, au mois de juillet 2020. En conseil des ministres, il a été décidé d’envisager les mesures de distanciation sociale afin que les examens se déroulent dans les conditions sanitaires acceptables. Ce qui a amené à une prorogation de crédit pour le ministère de l’enseignement technique. A titre illustratif, l’enseignement technique pour chaque salle d’examen mettait 30 candidats par salle en 2019. Pour respecter les barrières sanitaires, on a mis 15 candidats par salle. Ce qui signifie automatiquement que le nombre de centres va doubler, le nombre de correcteurs aussi ; le nombre de superviseurs aussi. Et les surveillants ont demandé de rehausser un tout petit peu les primes de transport. À l’époque, c’était 3 personnes dans un taxi. C’est ce qui a amené à accorder un crédit supplémentaire de 15 milliards à l’enseignement technique, qui fait 43 milliards et quelques. Je tiens à préciser que l’activité n’est même pas exécutée totalement. Parce que la première phase des examens a été effectuée au mois de juillet et la seconde phase va l’être au mois de décembre, pour les concours d’entrée. Donc les 43 milliards ne sont même pas encore totalement dépensés. L’activité est en cours».
En ce qui concerne les 35 milliards pour l’équipement des centres de formation professionnelle de Siguiri, Kankan, Kouroussa et N’zérekoré. «Lorsqu’il a été question de proroger les crédits, la lettre m’a été adressée. J’ai demandé le tableau d’évaluation des besoins qui devrait être joint en annexe. Ce tableau m’a été transmis signé par le directeur du service d’examen du ministère de l’Enseignement technique. Lorsqu’il était question d’accorder les 35 milliards, la même évaluation a été demandée. Pour savoir est-ce que les équipements correspondent aux besoins réels. Les 35 milliards ont été accordés. Mais deux précisions importantes. La première : on dit qu’il y a eu un prétendu contournement du ministère du Plan pour envoyer au ministre de l’Economie et des finances qui traite directement. C’est une mauvaise compréhension de la nouvelle nomenclature budgétaire qui fait une distinction nette entre les programmes d’investissement hors projets et les programmes d’investissement projet. C’est-à-dire tout ce qui est rénovation, acquisition de bâtiment, infrastructure, vous ne pouvez pas le faire sans passer par le ministère du Plan. Mais tout ce qui est équipement, matériels et mobiliers de bureaux, ce sont des investissements hors projets. Dans ce cadre-là, les institutions et les départements sectoriels sont fondés de faire leurs passations de marché et leurs propres évaluations. Parce que ça ne rentre pas dans le cadre du plan. L’autre aspect qu’il faille éclaircir, au niveau des autres produits spécifiques, dans la nouvelle nomenclature, cet agrégat a été réservé par certains départements ministériels tel que : l’élevage, l’agriculture et l’enseignement technique, qui utilisent les matières d’œuvres. C’est-à-dire, les réactifs, les petits outillages. C’est ça le sobriquet, autres produits spécifiques. Mais dans la comptabilité, on peut les détailler. A date, les 35 milliards sont sur le compte du payeur général du trésor. C’est le service rendu qu’on paie. Les matériels ne sont pas livrés, donc aucun montant n’est sorti. Aucun franc n’est sorti sur ce montant. Vous pouvez vérifier».
Les sous de l’AFD
Dans les révélations de la presse figurait un «détournement» de 3 millions d’euros que l’AFD aurait donnés. L’AFD avait démenti, mais la polémique enfle. Le ministre du Budget a lui aussi sa version. «Le prétendu détournement de 3 millions d’euros de l’AFD. Qui consistait à abonder dans le fonds du budget d’affectation spéciale. Ce montant à l’heure où je parle, n’est même pas versé, parce qu’il y a les conditions suspensives. Il fallait que la loi rectificative des finances de l’année 2020 soit adoptée et votée à l’Assemblée nationale, puis promulguée. Ce qui est fait. Et les gens sont dans les processus pour décaisser le montant. Et même si le montant était décaissé et mis à disposition, il ne concerne pas seulement le ministère de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle, mais les trois secteurs éducatifs. Et croyez-le, l’AFD a ses manuels de procédure. Personne ne peut détourner le montant des partenaires techniques et financiers. Quand ils doivent donner des montants, ça s’exécute à la lettre dans l’esprit de ce manuel de procédure».
Sieur Dioubaté ne voulait pas «anticiper sur les conclusions de la justice», mais ne semble pas gêné de le faire, car dit-il, la Guinée a été très bien notée dans le cadre de PEFA, (Public Expenditure and Financial Accountability), une évaluation de la qualité des dépenses donc sa gestion budgétaire est transparente.
Oumar Tély Diallo