Ce procès est l’aboutissement d’une longue enquête internationale lancée en 2013 portant sur des permis miniers octroyés en Guinée au Beny Steinmetz Group Resources (BSGR), dans lequel le diamantaire a le titre de conseiller. « C’est un cas d’école: on a les paiements, les contrats… on a tous les éléments » d’un cas de corruption, a résumé, cinglant, le procureur Yves Bertossa, devant le tribunal correctionnel de Genève. L’affaire remonte à la première décennie des années 2000, lorsque le gouvernement guinéen de l’ancien président Lansana Conté avait déchu, peu avant sa mort en 2008, le groupe anglo australien Rio Tinto de l’exploitation des blocs 1 et 2 d’un des plus importants gisements de fer au monde à Simandou.

Il est reproché à Beny Steinmetz d’avoir mis en place un montage financier via des sociétés-écran afin de verser en toute discrétion des pots-de-vin dont une partie aurait transité par des comptes suisses à la quatrième épouse de l’ancien président Conté, Mamadie Touré, afin que BSGR supplante Rio Tinto. A 64 ans, Beny Steinmetz, qui était domicilié à Genève lorsque les faits qui lui sont reprochés se sont déroulés, conteste entièrement les conclusions du parquet genevois qui l’accuse de « corruption d’agents publics étrangers et de faux dans les titres ». Les pots-de-vin présumés, versés entre 2006 et 2012, s’élèvent à environ 10 millions de dollars (8,2 millions d’euros).

  Personnage clé de cette affaire, Mamadie Touré, quatrième épouse de Lansana Conté, a, elle, reconnu avoir reçu des versements et est depuis protégée par la justice américaine. Convoquée comme témoin par la défense à Genève, elle ne s’est pas présentée. Beny Steinmetz a assuré cette semaine n’avoir « jamais » demandé à quiconque de verser des fonds à Mme Touré, et l’a accusée de mentir. La défense a également assuré qu’elle n’était pas l’épouse du président Conté, mais une maîtresse n’exerçant aucune influence. Autant d’arguments balayés par le procureur: « Mamadie Touré dit la vérité. Tout ce qu’elle dit est confirmé par les éléments » du dossier. Et de glisser: « si Mme Touré n’a aucun lien avec le président, pourquoi a-t-elle un passeport diplomatique ? »

  Pendant le procès, Beny Steinmetz a également assuré n’avoir qu’un rôle de « conseiller » au sein de BSGR et être peu au fait des questions financières. Ce que le procureur a refusé de croire: « le chef c’est qui ? Le chef c’est vous. C’est Beny Steinmetz. Ou alors c’est un groupe sans tête, ça c’est la fable que l’on nous raconte ». Et d’ironiser: « Par quel miracle un groupe tel que BSGR ose s’en prendre à Rio Tinto, sans informer M. Steinmetz (…), cela n’a pas le moindre début de crédibilité ». Après des années de bataille juridique, Beny Steinmetz et la nouvelle présidence guinéenne d’Alpha Condé sont parvenus début 2019 à un accord convenant que BSGR renonce aux droits sur Simandou en échange d’un abandon des poursuites pour corruption en Guinée.

  Beny Steinmetz est jugé à Genève aux côtés de deux partenaires d’affaires la Belge Sandra Merloni Horemans, ex-administratrice d’entités liées à BSGR, et le Français Frédéric Cilins, qui en 2014 a été condamné à deux ans de prison aux Etats-Unis pour obstruction à la justice dans ce dossier. Selon des enregistrements du FBI cités par le procureur genevois, il a promis plusieurs millions de dollars à Mme Touré en échange de la destruction de certains documents compromettants. Et le procureur de marteler: ces écoutes ont aussi montré « que M. Cilins savait qu’elle avait un passeport diplomatique ». Le procureur a requis 4 ans de prison contre M. Cilins, et 2 ans avec sursis pour Mme Merloni Horemans.

Y-a-t-il quelqu’un dans la salle capable de demander à Alpha Condé de publier le texte de l’accord qu’il a signé avec Beny Steinmetz avec la bénédiction d’un truand nommé Nicolas Sarkozy. Simandou nous appartient. Les corrompus sont des Guinéens. Des hommes épris de justice ont épinglé les corrupteurs. Pourquoi l’affaire Simandou n’est-elle pas jugée en Guinée ? Président Alpha Condé, merci de gouverner autrement !

Avec l’AFP