J’ai pensé que gouverner autrement, c’est changer la gouvernance de manière positive avec des nouveaux visages supposés meilleurs : les meilleurs visages du Parti et de ses alliés, voire de la société civile et de l’opposition. Le décret est certes du pouvoir discrétionnaire du Président, mais, il n’est pas interdit au citoyen de donner son avis. À ce jour, mon avis est globalement négatif sur la structure du Gouvernement et le choix de la plupart des hommes qui la meublent. Je ne défends personne, ne pourfends personne. D’ailleurs, je n’ai jamais eu l’honneur de serrer la main des personnes que je vais nommer ci-dessous. Mes observations sont les suivantes :

La première observation : l’éviction du diplomate Mamadi Touré du ministère des Affaires étrangères. Il est limogé le jour même qu’il a obtenu pour la Guinée, la présidence du Groupe des 77 aux Nations unies. Avec cet exploit, notre pays est devenu (pour l’année 2021) le représentant et le porte-parole de plus de 130 pays du monde dans les négociations multilatérales entre les pays en voie de développement et les grandes puissances économiques. Cet honneur n’est comparable qu’à la présidence par la Guinée, du Comité spécial de l’ONU sur la Namibie, avec Mme Jeanne Martin Cissé, dans les années 70, et du Conseil de sécurité à la fin des années 2000, avec M. Abdoul Kabèlé Camara aux AE.

Pire, notre diplomate chevronné est remplacé par un technocrate, brillant, scientifique, qui serait novice aussi bien en diplomatie qu’en relations internationales et en droit international public ; un brillant jeune qui pouvait mieux aider à booster notre système de formation à la tête du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique.

Deuxième observation : La reconduite à son poste de Mme Zenab Nabaya Dramé, alors qu’elle est soupçonnée de détournement de plusieurs milliards de francs, et que le dossier de ce détournement est en cours devant nos juridictions. Cette affaire, fortement médiatisée et commentée à l’envie par le public, est une épine dans les souliers de la République.

Pour une gouvernance respectueuse du droit et des mœurs, le bon sens et la logique voudraient que Madame la Ministre de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle reste provisoirement à l’écart des structures de l’administration publique.

En la reconduisant dans le Gouvernement, c’est un mauvais signal qui est donné à l’opinion. C’est aussi un encouragement aux prédateurs de notre économie. Les fonctionnaires indélicats, forts d’une certaine couverture, n’auront plus peur d’être sanctionnés ou poursuivis. Ils chercheront désormais à avoir la couverture qui sied pour brader nos maigres ressources à souhait.

C’est d’autant mal indiqué qu’à l’étranger, les Européens sont en train de condamner leurs compatriotes européens, Beny Steinmetz, pour des faits de corruption au détriment dans notre pays, au détriment de notre économie. Pour sa part, le Gouvernement américain a donné le ton il y a quelques années, avec le jugement, suivi de l’emprisonnement d’un de nos anciens ministres des Mines, Mahmoud Thiam, qui purge toujours sa peine dans les prisons américaines pour des faits similaires. Ces exemples doivent habiter la mémoire des politiques, des gouvernants et de tous les Guinéens pour sévir contre les pratiques immorales de gestion de la res publica.

Troisième observation. Autant je n’ai pas compris le limogeage en 1992 de M. Bana Sidibé, le bâtisseur de Conakry, autant je n’arrive pas à comprendre l’éviction du ministre des Travaux publics, Moustapha Naïté. De mon point de vue, celui-ci est en train de laisser des traces plus tangibles que ses prédécesseurs de ces dernières années. Membre originel et actif du RPG, semble-t-il, M. Naïté présenterait le profil de jeune cadre mature, pondéré, fédérateur, intelligent et travailleur, qui fait honneur au parti au pouvoir et à la jeunesse tout entière.

Que ce jeune soit évincé dans un Gouvernement où est reconduite celle qui a son honneur et l’honneur de la république à défendre, je n’arrive pas à comprendre le sens du slogan « Gouverner autrement. » .Je ne suis nulle part en politique. Ni au RPG ni ailleurs. Je resterai ainsi tant que l’ethnie est la déterminante en première et en dernière instances dans la vie politique en Guinée. Mais, j’ai le sentiment que le PRAC est comme « ligoté » par les marabouts et autres charlatans du RPG, des alliés et d’ailleurs. C’est du jamais vu dans l’histoire de la Guinée: un nombre pléthorique de portefeuilles ministériels, un nombre pléthorique de Ministres d’État, un nombre pléthorique de Ministres conseillers à la présidence, le sentiment d’un Gouvernement bis, lui-même pléthorique, à la Présidence.
Les Décrets de nomination des membres du Gouvernement pris et diffusés au compte-gouttes, …

Tout porte à croire qu’avec cette pléthore, nous aurons une administration budgétivore, vorace en termes de dépenses improductives et quasi-inutiles. Autant d’observations étranges qui donnent à réfléchir sur la contradiction entre le discours enchanteur du Président et certaines réalités à l’antipode. S’il vous plait. Messieurs les marabouts, messieurs les charlatans, messieurs les agitateurs de couloirs, libérez  l’esprit du PRAC pour l’intérêt de la nation.

Monsieur le PRAC, ne vous laissez pas envoûter ! Ouvrez les yeux et  l’esprit pour faire des choix judicieux. La Guinée a trop souffert. Elle a besoin d’être gouvernée autrement que ce que nous voyons et percevons. Merci d’avance !

IKJ