Le 26 février, aux environs de 11 heures, les engins-casseurs du Ministre de la Ville ont démoli tout sur leur passage à la Cité de l’air, dans la banlieue-sud de Cona-cris. Des maisons, des cours, des boutiques, des boîtes de nuit, des restaurants, des vérandas, des toilettes, situés au bord de la route qui mène vers Dar-es-Salam, ont été démolies. Les agents-casseurs étaient accompagnés des forces de sécu-raté, notamment des flics, des pandores, voire les apparentis-policiers communaux.

Mamadou Alpha Soumah, a assisté impuissant à la démolition de ses cinq boutiques. « Aujourd’hui, j’ai presque tout perdu. Même mes latrines ont été cassées. Heureusement, j’ai pu arracher les portes, les fenêtres, le toit. C’est incroyable, c’est désolant ! Je demande à l’Etat de nous venir en aide, mais je ne suis pas sûr qu’il l’entendra », se désole-t-il, devant sa famille. « Nous sommes d’accord que le gouvernement arrange les choses, qu’il dégage les emprises dans le cadre de l’amélioration de la circulation et de l’embellissement de la ville. Car, c’est vrai qu’il faut que nous changions comme dans les autres pays. Mais, il ne faut pas casser pour casser, comme par le passé. Déjà, cela dérange la population qui est dans la galère. Il n’y a pas d’emplois, les temps sont durs, il n’y a rien à faire, alors que l’on a une famille à nourrir. Je me demande comment nous allons vivre. Il faut que l’Etat nous accompagne financièrement ! », plaide Ibrahima Sylla, dont une partie de la maison familiale a été cassée.

Gnaga Camilo Gbemou, le proprio d’une boîte de nuit n’est pas moins amer: «Nous félicitons et encourageons le gouvernement de ce qu’il est en train de faire. Mais, il ne doit pas oublier que la jeunesse est sous-employée et ce déguerpissement va provoquer davantage de chômeurs en Guinée. Donc, accentuer la misère, notamment chez les jeunes et chez les femmes qui se débrouillent pour gagner leur quotidien est nécessairement contre-productif. L’Etat doit penser à la population, à la jeunesse pour créer des emplois. C’est ce que nous lui demandons. Nous n’avons plus où aller. Nous resterons à la maison et certains vont se retrouver dans le banditisme. Et cela n’est pas à l’avantage du pays », philosophe-t-elle.

Yaya Doumbouya