Ils se comptent sur le bout des doigts les Guinéens qui ont pu échapper au surmenage suite à l’interminable formation du 1er gouvernement de la 4è république chère à notre Président-Grimpeur. Il s’est écoulé trois longs mois entre la présidentielle du 18 octobre et l’accouchement, dans une douleur extrême, du premier embryon gouvernemental censé placer sur la rampe de lancement le « gouverner autrement.» Aussi, le nom de l’ancien opposant historique évoque-t-il aujourd’hui une réalité et deux symboles.

La réalité est celle d’un pays, la Guinée. Qui a réussi l’exploit de changer capricieusement de république, passer de la 3è à la 4è en maintenant les pires de ses ministres. Quant au symbolique, il relève de la littérature : la classique et le polar. Venue vernir le curriculum vitae du président guinéen. Impossible d’évoquer le nom d’Alpha Condé sans que ne surgissent deux images au moins. La première, de M. Jourdain, réputé pour faire de la prose sans le savoir. La seconde, de Berrurier, qui constate dans ses pérégrinations que « ça meurt et ça ne sait même pas.» La république est en train de foutre le camp à l’insu du président.

Le locataire de Sékhoutouréya parait en filigrane tant chez Molière que chez San Antonio. Il a tout l’air de s’être engagé dans un labyrinthe de remaniement ministériel sans en connaître l’issue. Le 18 janvier, il signe le décret de structuration d’un « nouveau » gouvernement de 36 ministères et un secrétaire général des affaires religieuses. Le 19, la RTG commence à diffuser, au compte-gouttes, la liste de la nouvelle équipe. Rien que des anciens. A la date du 6 février, manquaient encore à l’appel deux ministères et le secrétariat aux fausses affaires islamiques et chrétiennes. Le Secrétariat général du gouvernement, précédemment occupé par un jeune loup du RPG devenu « frondeur, » a préféré disparaître de la circulation. Inouï !

Lundi 1er février, le Prési-Grimpeur se mue en pointeur de la république, et il n’a pas achevé la formation de son équipe gouvernementale. Sa nouvelle priorité : dénombrer retardataires et absents dans les ministères et régies financières. Il inspecte la Banque Centrale, la Direction Nationale des Impôts, le Budget et que sais-je encore ! Il a dû s’aviser de la futilité de l’opération. A moins qu’il ne se soit essoufflé à l’escalier des immeubles, contrairement à l’affirmation des démagogues à l’entour. Naturellement, l’expérience tourne court. Les absents qu’il a pontés seront toujours absents. Ce n’est pas parce qu’ils sont nés paresseux ou rebelles. Loin s’en faut ! Tout le monde sait que l’administration et les administrateurs d’Alpha Grimpeur sont voués au retard. Le problème n’est pas ponctuel, il est structurel. Posez la question aux embouteillages, les klaxons vous répondront ! Après 63 ans d’indépendance, le pays ne pointe aucun domaine fiable. Calculette en main, vous ne pouvez pas démentir. Si Alpha se vante d’avoir grimpé les quatre étages de la Banque Centrale ou ceux de la Direction nationale des Impôts, c’est parce que la Guinée n’a pas la culture de l’ascenseur. Après dix ans au pouvoir, il ne devrait pas s’en réjouir. Avec toute la bauxite qu’il vend.

Diallo Souleymane