Elle était restée silencieuse depuis sa plainte contre Ousmane Sonko déposée à la gendarmerie début février. Dans cette longue déclaration en wolof, Adji Sarr réitère ses accusations de «viol avec menaces» contre l’opposant, Ousmane Sonko. Elle raconte en détail ses visites au salon de massage. Elle souligne ceci : «S’il n’a jamais eu aucun rapport sexuel avec moi, il n’a qu’à jurer sur le Saint Coran.» Si c’est le cas, la jeune femme se dit prête à retirer sa plainte. Ousmane Sonko avait reconnu avoir fréquenté ce salon de massage « pour des problèmes de dos », mais dénonce un complot pour freiner ses ambitions politiques.
Selon Me El Hadj Diouf, l’un des avocats de la plaignante, il était temps pour elle de donner sa version des faits : «Comme Sonko a fait plusieurs points de presse pour parler de l’affaire, elle sort pour répondre. Avec tout ce qui s’est dit, si bien à l’Assemblée nationale, au niveau des partis politiques qui ont soutenu Sonko, sans savoir ce qui se passe réellement, c’est elle qui attendait que tous ces mensonges passent pour venir dire la vérité enfin.»
Il ne faut être ni jihadiste ni athée pour comprendre que désormais M. Ousmane Sonko fait face à un problème supplémentaire : celui du musulman africain face à lui-même et au peuple croyant du Sénégal. Adji Sarr a intelligemment introduit la dimension «africaine» de la simplification et de la crédibilité «silencieuses.» Jurer au nom de Dieu n’empêchera pas forcément le musulman de mentir. Peut-être, le Chrétien, non plus. Dans l’affaire Monica Lewinsky, l’on a remarqué l’aisance avec laquelle Bill Clinton avait levé la main droite pour réaffirmer son innocence. En revanche, un mur culturel d’une épaisseur insoupçonnée risque d’empêcher Ousmane Sonko de poser la main sur le Coran et jurer que l’accusation de viol est infondée si par malheur elle était effectivement fondée. Surtout qu’il sait que malgré sa place privilégiée dans la hiérarchie des valeurs islamiques, le Coran peut ne pas arriver à éteindre l’action judiciaire. Il faudra certainement trouver d’autres parades pour Ousmane Sonko. Pour le moment, celle qui consiste à dire que c’est à «la victime» de jurer n’a pas l’air de marcher.
DS, avec RFI-Dakar