Condamné pour son rôle dans l’une des plus retentissantes affaires d’escroquerie financière des dernières décennies, il purgeait une peine de cent cinquante ans. Il avait 82 ans.
Son patronyme était devenu un nom commun. L’escroc américain Bernard Madoff est mort, mercredi 14 avril, a annoncé le Bureau fédéral des prisons. Âgé de 82 ans, il purgeait une peine de cent cinquante ans de prison.
Il avait été condamné en 2009 pour l’une des plus retentissantes affaires d’escroquerie financière des dernières décennies. Financier respecté de Wall Street, il avait, pendant plus de quinze ans, détourné 65 milliards de dollars (58,7 milliards d’euros).
Bernard Madoff souffrait depuis plusieurs années de diverses affections, notamment rénales. Il était détenu dans le pénitencier fédéral de Butner, en Caroline du Nord.
Découverte en décembre 2008, la fraude pyramidale, dite « à la Ponzi », qu’il avait mise en place consistait à piocher dans les finances de ses nouveaux clients pour rétribuer ou rembourser des investisseurs plus anciens. Le mécanisme frauduleux était très simple puisqu’il promettait des taux de rentabilité annuelle à deux chiffres en distribuant des « intérêts » puisés, en fait, dans les capitaux apportés par de nouveaux clients.
Mise au jour par l’éclatement de la crise financière mondiale en septembre 2008, la « pyramide de Ponzi » que dirigeait Bernard Madoff a fait plusieurs milliers de victimes mêlant simples particuliers, personnalités des affaires, de la culture et des médias, organisations caritatives, fonds de pensions et fonds d’investissement.
Des victimes à Hollywood
Parmi les victimes connues dont Bernard Madoff avait ainsi détourné les économies figurent les acteurs Kevin Bacon et John Malkovich, le joueur de baseball Sandy Koufax ou encore une organisation à but non lucratif cofondée par le réalisateur de cinéma Steven Spielberg.
Ses proies étaient particulièrement nombreuses dans la communauté juive, au sein de laquelle Bernard Madoff était connu pour ses activités philanthropiques.
« Nous pensions qu’il était Dieu. Nous nous remettions en toute confiance entre ses mains », avait déclaré en 2009 l’écrivain et lauréat du prix Nobel de la paix Elie Wiesel, dont la fondation a perdu 15,2 milliards de dollars dans l’affaire. Certaines victimes ont été totalement ruinées.
La fraude avait été révélée à l’automne 2008 aux autorités par les deux fils de Bernard Madoff, qui n’étaient pas complices, alors que la chute des marchés financiers provoquée par la faillite de Lehman Brothers incitait de nombreux épargnants à vouloir récupérer en urgence leur épargne.
L’affaire avait mis en évidence des failles dans les mécanismes de surveillance de la Securities and Exchange Commission (SEC), le gendarme des marchés américains, accusée d’avoir bâclé des enquêtes, par incompétence ou négligence, malgré des signaux d’alerte répétés et des plaintes dès les années 1990. « A plusieurs reprises, lors de réunions avec la SEC, je me suis dit : “Ils m’ont eu” », avait dit Bernard Madoff à ses avocats lors d’entretiens en prison selon la chaîne de télévision ABC.
Ex-président du Nasdaq
Le financier véreux était une personnalité de Wall Street puisque après y avoir fait fortune comme market maker au sein de sa propre société fondée en 1960, il avait occupé le poste de président non exécutif du Nasdaq. Sa société de gestion avait son siège social dans un immeuble de Manhattan, le Lipstick Building. Une poignée de salariés seulement étaient informés du caractère frauduleux des activités.
Selon Bernard Madoff, la fraude avait débuté au début des années 1990, mais certaines victimes et l’accusation lors du procès ont affirmé qu’elle avait démarré bien plus tôt.
Les sommes détournées permettaient à Bernard Madoff et à sa femme de mener grand train puisqu’ils possédaient un penthouse à Manhattan, une villa en France, plusieurs yachts et des voitures de luxe, leur fortune étant estimée au total à 825 millions de dollars.
Aucun membre de sa famille proche n’a comparu à ses côtés, lors de son procès, et aucun proche, ami ou soutien n’a fourni de témoignage à décharge. « Lorsque j’ai commencé ce problème, ce crime, je croyais que c’était quelque chose que j’arriverais à gérer seul, mais c’est devenu impossible, avait déclaré Bernard Madoff à l’audience. « Plus j’essayais, plus je m’enfonçais moi-même. » S’adressant aux victimes, il avait dit : « Je suis désolé. Je sais que cela ne vous aidera pas. »
Avec Le Monde, AP, Reuters