Le ministre de la Justice, Garde des sceaux Mory Doumbouya a animé une conférence de presse vendredi 30 avril, pour se prononcer sur le débrayage des huissiers de justice appuyés par les avocats. La pomme de discorde porte sur une mesure d’interdiction prise par les parquets contre l’exécution des décisions de justice. Ils réclament la levée de l’interdiction ou l’obligation d’obtenir une réquisition des services de sécurité pour exécuter les décisions judiciaires.
Une grève qui selon Mory Doumbouya «n’a pas laissé de marbre» son département, conscient de l’importance de l’exécution des décisions de justice, lui-même avocat de profession. Le conférencier a expliqué les démarches entreprises jusque-là pour dénouer la crise : visite au Barreau, rencontre avec le conseil de l’ordre des avocats et les huissiers, les autorités administratives et des collectivités de Conakry (gouvernorat, mairies)… «Je voudrais rectifier lorsqu’on dit qu’en République de Guinée les décisions de justice ne sont pas exécutées. Nous ne sommes pas dans une République bananière, mais dans un Etat où il y a la primauté du Droit», a-t-il lancé. Libre à ceux qui peignent toujours en noir la Guinée de le faire, a enchaîné Mory Doumbouya.
«Il ne faut pas avoir une vision restrictive en estimant que l’exécution des décisions de justice ne concerne que les expulsions ou les déguerpissements. Il y a aussi des questions électorales…des personnes sont remises en liberté à tout moment sur décision de justice, des saisies de créances dans les banques, sans bruit. Des opérations qui ne font pas de bruit puisque nécessitant pas une réquisition de la force publique», rappelle le ministre de la Justice, Garde des sceaux. Et de concéder, néanmoins, qu’il y a des domaines dans lesquels des difficultés subsistent : «Il existe certes des problèmes en matière domaniale, foncière, de propriété et envers l’Etat». «Il y a des décisions dont l’exécution causerait des troubles systématiques à l’ordre public. On a connu des cas où l’exécution va au-delà du dispositif : le juge ordonne l’expulsion et en exécutant, en plus de cela, on démolit», renchérit-il.
Et le conférencier de revêtir son boubou de militant assumé du RPG arc-en-ciel : «Je ne suis pas ministre de la Justice par effraction, mais par la volonté du premier magistrat. Comment pourrait-on dire que l’exécution des décisions de justice est interdite dans un pays dirigé par un professeur de Droit et un Premier ministre, docteur en économie ?» Et de reconnaître que «les ordres professionnels sont toujours interdépendants et jaloux de leur indépendance. Ce qui ne signifie pas qu’ils sont sur une autre planète, mais qu’ils s’administrent librement».
Pour le ministre de la Justice, la grève des huissiers élargie aux avocats ne paralyse pas le fonctionnement de la justice. «Le secteur de la justice n’est pas paralysé. Les magistrats sont en poste. Dans les cours et tribunaux, il n’y a pas que des affaires contentieuses qui nécessitent la présence obligatoire de l’avocat. Les magistrats, les cours et tribunaux ont entendu notre appel ». « Qu’on le veuille ou pas, une solution sera trouvée. Mais il faudrait que celle-ci soit dans l’intérêt des justiciables. Or, la réalité est que le service de l’avocat, le procès, l’exécution des décisions de justice lui coûtent chers».
Diawo Labboyah