Le procès du maire de la commune de Matam et de son premier adjoint a démarré ce 21 juin, au TPI de Mafanco. Seydouba Sacko et Ismaël Condé sont accusés par le Coordinateur de la société « Étoile émergente », d’escroquerie, d’entrave à la liberté d’accès et à l’égalité des candidats  dans les marchés, les concessions, d’égalité de service public et complicité.

Dans sa déposition, le maire de Matam a nié en bloc les accusations articulées contre lui : «Courant 2019, j’ai reçu monsieur Ismaël Condé, il avait un contrat d’une société de ramassage d’ordures qui s’appelle Étoile émergente. On en a discuté, j’ai signé le contrat sans appel d’offres. C’est un mois après que j’ai entendu qu’il y a des cris autour de ce contrat entre M. Condé et cette société. C’est par après que j’ai reçu la convocation de la police. M. Kaba (représentant de la société Etoile émergente, ndlr), ne me connaît pas du tout.»

Seydouba Sacko a laissé entendre que cette affaire est spécifiquement gérée par son adjoint Ismaël Condé : «Mais, je suis grandement surpris par cette affaire, parce que ni moi ni Ismaël Condé, n’a touché un franc dans ce dossier.»

“Est-ce que vous n’avez pas touché de l’argent dans cette affaire ? » lui questionne la juge. «Non,» répond le maire.

«Mais vous étiez au courant que la société Étoile émergente déboursait 200 000 francs guinéens comme prix du carburant par jour? Renchérit Me Sidiki  Bérété, avocat de la partie civile.» «Je ne suis au courant de rien», ajoute Seydouba sacko. « Vous saviez que le matériel offert par la banque populaire maroco-guinéenne a été vendu à la PME». «Je ne suis pas au courant. Moi, je n’ai fait que signer le contrat ».

«C’est un contrat de façade, vous nous avez fait travailler sans être payés. En tant que maire, vous êtes le seul responsable de cette situation», assène Me Bérété.

Ismaël Condé a, lui aussi, rejeté ces accusations : «Je suis en prison depuis 9 mois pour une affaire qui ne me concerne pas. Je n’ai été qu’un intermédiaire entre cette PME et la mairie, parce que je voulais aider les citoyens de la commune de Matam.» M. Condé nie avoir poussé le maire à engager cette PME : «Quand ils sont venus me voir, je leur ai dit d’écrire à la mairie, ils l’ont fait. Ça a duré, ils sont revenus me voir, j’ai vu le maire, il avait déjà le contrat. Il a demandé à un de ses collaborateurs s’il peut signer le contrat. Ce dernier a répondu par l’affirmative. » Une version balayée par le maire Seydouba Sacko : «La première fois qu’il est venu me voir, j’ai refusé. Il est revenu avec le DMR (Directeur des micro-réalisations) pour me dire de signer.»

Etoile émergente accuse Ismaël Condé de l’avoir vendu des brouettes et d’autres matériels offerts par une banque de la place. Elle l’accuse également de leur avoir facturé 200 000 francs guinéens par jour comme prix du carburant à cause d’un camion de l’ANASP qu’il avait mis à leur disposition : «Ce matériel n’était pas destiné à la PME, mais à la mairie, et je n’ai demandé aucun franc à quelqu’un », a affirmé Ismaël Condé à la barre.

Cette affaire remonte en fin d’année 2019. Ismaël Condé est mis en contact avec un certain Kaba, coordinateur de la société Étoile émergente, qui évoluerait dans le ramassage des ordures, par un de ses frères. Le premier maire-adjoint l’introduit  à son tour, chez le maire. Ce dernier signe le contrat qui lie cette société à la mairie de Matam dans le cadre du nettoyage d’une partie de la commune, sans sourciller. Mais dans le contrat, il était stipulé que c’est à la société de payer ses travailleurs. Les bénéficiaires commencent le travail. Mais deux mois plus tard, la société peine à recouvrer son argent chez les abonnés et à payer ses travailleurs. Elle se tourne alors vers Ismaël Condé et la mairie, les choses n’ont pas bougé non plus. L’affaire arrive par la suite devant la justice. L’affaire n’aura été ébruitée après qu’Ismaël Condé, membre du RPG arc-en-ciel, a décidé de s’opposer à la réforme constitutionnelle, de claquer la porte du parti au pouvoir et de rejoindre l’UFDG, principal parti de l’opposition.

Au moment où nous mettions cette dépêche en ligne, Ismaël Condé,  inculpé pour offense sur la personne du Président de la République, production, diffusion et mise à disposition d’autrui des données de nature à troubler l’ordre public, et injures par le biais d’un système informatique, continuait sa déposition.

Yacine Diallo