Le secteur bancaire Guinéen a deux particularités qui limitent son impact sur le financement de l’investissement réel de l’économie nationale :
En Guinée, toutes les banques en activité sont des banques étrangères. Les capitaux sont détenus à environ 85% par des banques étrangères : françaises, nigérianes, camerounaises, marocaines, ivoiriennes, Burkinabé, mauritaniennes,….
Nos banques ne sont rien d’autre que les filiales des banques créées par des institutions financières ou de simples professionnels africains.
Observation stratégique :
–a) depuis le 22 décembre 1985, il n’y a aucun groupe de Guinéens (professionnels des banques ou opérateurs économiques) qui a ouvert une banque à capitaux majoritairement guinéens.
En d’autres termes, il n’y a aucune banque guinéenne sur le sol de Guinée, contrairement aux autres pays.
–b) Il n’existe nulle part en Afrique une banque appartenant à un Guinéen ou un groupe de Guinéens, contrairement aux professionnels et hommes d’affaires des autres pays qui contrôlent notre secteur bancaire depuis 3 décennies.
☆2) le système bancaire Guinéen, depuis 1985, manque de préoccupation pour le financement de l’investissement et de la production agricole et industrielle. Toutes les banques en Guinée sont des banques spécialisées dans le financement des spéculations commerciales. Pas de banques pour l’Habitat ! Pas de banques pour l’agriculture ! Pas de banques pour l’industrie ! Bref. Pas de banques pour le développement et l’émergence réels du secteur privé Guinéen.
La cartographie bancaire confirme ce constat. Plus de 15 banques, toutes commerciales, au service de l’import-export !
Du point de vue stratégique, mon pays ne semble pas encore affranchi des injonctions trentenaires du FMI et de la BM.En matière de politique de financement du développement et de promotion de son secteur privé la Guinée doit revoir sa politique.
Dans les pays comme le Cameroun, le Nigeria, la Côte d’Ivoire, le Sénégal, la Mauritanie, le Burkina Faso,… des professionnels et les hommes d’affaires sont soutenus sous une forme ou une autre par les pouvoirs publics, dans leurs projets de création et d’expansion d’entreprises, notamment dans le secteur des banques et assurances.
Sur ce sujet stratégique, la Guinée est en train de dormir. Lorsqu’elle se réveillera, elle trouvera que toutes les structures de financement et d’accompagnement de son économie sont détenues par les étrangers. Ses propres Lois seront alors foulées aux pieds par les argentiers étrangers qui s’appuieront sur les législations internationales et qui n’obéiront qu’aux décisions des sociétés mères et de leurs patrons installés à Paris, Yaoundé, Abidjan, Casablanca, Dakar, Nouakchott, Abouja, Ouagadougou,…
Nous devons ouvrir notre esprit, être visionnaires et revoir systématiquement notre politique dans le secteur financier et bancaire. Comme les Camerounais, les Nigerians, les Ivoiriens, les Mauritaniens, les Sénégalais et autres Burkinabé, les Guinéens doivent être fiers de voir des banques et des sociétés d’assurances performantes et dynamiques, appartenant à des Guinéens, avec des filiales à Dakar, Lagos, Abidjan, Bissau, Freetown et autres. On ne doit pas ouvrir ses portes et portes fenêtres aux voisins, et laisser ses propres enfants dormir à même le sol.
J’ai l’impression que toutes ces banques profitent nettement aux pays d’origine des capitaux qu’à la Guinée et à son économie.
Ce qui est important dans l’implantation d’une banque étrangère dans un pays, ce ne sont pas les impôts payés au Trésor public ou la création d’emplois. Ce qui est plus important dans l’implantation d’une banque étrangère dans un pays, c’est le financement des activités économiques.
C’est là que chaque catégorie socio-professionnelle peut trouver les moyens de son expression et de son émergence pour un bien-être pluriel. À bon entendeur, salut !
Jair Ibrahim