Le président Alpha Condé ne blague pas avec son troisième mandat. Auteur de la vidéo qui a couté à Abdoulaye Bah la révocation de sa liberté conditionnelle, Lamarana Gongorè Bah, jeune militant de l’UFDG, a échappé belle. Après avoir fait l’objet de multiples tentatives d’arrestations, il s’est enfui pour éviter de passer à nouveau par la case prison.
Mamadou Lamarana Bah alias Gongorè, connu pour son engagement politique au sein de l’UFDG, principal parti de l’opposition guinéenne, est le vice-président du mouvement des jeunes de l’Axe. Son nom est sur toutes les lèvres depuis que l’ancien maire de Kindia, Abdoulaye Bah, a vu sa liberté conditionnelle révoquée. Lamaran Gongorè Bah, c’est celui qui a posté la vidéo dans laquelle Abdoulaye Bah a affirmé « qu’Alpha Condé est un ancien Président et Cellou Dalein, celui qui est démocratiquement élu ». Il a fait l’objet de plusieurs tentatives d’arrestations avant de se résoudre à fuir en Guinée-Bissau, 1h seulement après le décès de sa grand-mère : « Ils sont allés deux fois chez moi à Koloma, d’autres sont restés toute une nuit là où j’ai l’habitude de stationner mon véhicule. Le lendemain, ils sont allés à Bambéto dans la grande famille. Mais j’ai été alerté. Ils ont voulu se servir de deux filles pour me mettre aux arrêts. Ce sont de jeunes gendarmes que je peux identifier, qui étaient derrière mes précédents ennuis judiciaires qui cherchent à mettre main sur moi. Ils passent leur temps à filer et signaler les jeunes de l’Axe. Ils sont avec certains de nos jeunes. Quand ma mère est décédée (sa grand-mère, ndlr), j’y suis allé à 4h. Dès qu’ils s’en sont rendus compte, ils sont allés m’attendre au cimetière de Bambéto, ils ne savaient pas que j’étais déjà parti ».
Se dédire ou aller en prison
Au lendemain de sa publication, Lamarana Gongorè est contacté par des cadres du parti au pouvoir. Ils lui demandent de faire une autre vidéo dans laquelle il reconnait officiellement Alpha Condé comme Président ‘’légitime et légal’’, lui demande pardon et appelle les jeunes de l’Axe à en faire de même. Ceci était la condition qui était posée pour ne pas séjourner à nouveau à Coronthie. Il refuse. Mais connaissant bien la Maison centrale (il est sous contrôle judiciaire), Gongorè a préféré prendrele chemin de l’exil : « Des responsables du RPG m’ont dit qu’ils peuvent régler ma situation, à condition que je dise publiquement que c’est Alpha Condé qui est démocratiquement élu. J’ai refusé parce qu’il y a plus de 200 jeunes qui ont été tués, d’autres ont été blessés ou ont perdu leurs biens. Je préfère la souffrance, l’exil parce que je ne peux pas cracher sur le combat que je mène. Je ne peux pas cracher sur mes amis victimes de ce régime ou dire des mensonges pour gagner de l’argent. Je préfère mourir dans la misère que de trahir le combat de ceux qui sont couchés au cimetière de Bambéto.
« La Guinée n’est pas un pays démocratique »
Si Abdoulaye Bah a été convoqué par les responsables de la Direction nationale de l’administration pénitentiaire, Lamarana Gongorè n’a pas eu cette chance. Il n’a même pas reçu de convocation. Les forces de l’ordre se sont juste mises à sa trousse au lendemain de l’arrestation de l’ancien président de la délégation spéciale de Kindia : « Si c’était pour m’arrêter, me juger, je n’aurais jamais fui parce que je n’ai rien fait de criminel. Mais ils ont menacé de me tuer, ma vie était en danger. Ils auraient pu me laisser avec la justice, qu’elle me convoque. Mais ils veulent attenter à ma vie, me faire disparaitre définitivement. Cela montre que la Guinée n’est pas un pays démocratique ».
Continuer le combat
Aujourd’hui, le jeune militant dit ne pas regretter son acte. Il appelle plutôt les militants et cadres de l’UFDG à faire comme Abdoulaye Bah et à continuer la lutte : « Les Guinéens doivent savoir que le RPG n’est pas une ethnie, mais un clan mafieux qui manipule une partie de la population. Nous devons nous battre contre ces pratiques, pour que Cellou Dalein Diallo récupère sa victoire. Nous mènerons le combat démocratiquement jusqu’à ce que la Guinée devienne un Etat de droit. J’ai mal de rester loin de ma famille, mais je sais que c’est le prix à payer quand on décide de s’opposer à un dictateur».
Yacine Diallo