Il y a déjà près de deux mois que les Forces spéciales ont écarté du pouvoir Alpha Grimpeur et ses ouailles du RPG-Arc-en-ciel et ont annoncé la création d’un Comité national du rassemblement pour le développement. Ce qui a ouvert ipso facto une ère de Transition. Comme les Guinéens sont coutumiers de gouvernance pareille depuis la mort, en 1984, du dictateur Sékou Tyran, euphoriques, ils ont aussitôt tendu l’oreille et ouvert les yeux, tous les soirs, devant le petit écran. 

Ils trépignent d’impatience d’entendre les noms et de découvrir les visages des nouveaux timoniers. Mais ils sont bien obligés de prendre leur mal en patience parce que tout bonnement ces nouveaux timoniers déroulent leur feuille de route à leur rythme, à leur convenance. Qui oserait troubler la marche tranquille et ordonnée de la Grande Muette vers le nirvana des Guinéens ? Convenons qu’on ne peut-ou ne doit-rien faire pour les Guinéens sans savoir ce qu’ils désirent profondément. Le CNRD dont seuls trois ou quatre visages sont connus du populo, préfèrent donc organiser d’abord des conciliabules avec ce qu’il convient d’appeler les forces vives pour élaborer une charte afin de combler le vide constitutionnel. Ce qui est à la fois bien malin et novateur. Ni en 1984, ni en 2008 personne n’avait pensé à cet argutie juridique qui permet au Président de la Transition de prêter serment et d’enduire, ce faisant, l’exercice de sa charge d’un vernis de légitimité et de légalité. Wallah ! Puis le colonel Doum-bouillant commémore la mémoire de quelques morts.

Ces péripéties civiles achevées, l’urgence pour le CNRD a été de poser au sein de l’armée des actes idoines, notamment la mise à la retraite d’une masse critique d’officiers généraux et de nommer ensuite les gouverneurs. Loin d’être excessif en période normale, ce temps a fini par agacer nombre de Guinéens qui commencent à susurrer quelques gentils mots tant dans les masures que dans les châteaux. La presse s’en est fait l’écho ! Le 5 septembre, le peuple a fait chorus avec le Colonel Doum-bouillant et les forces spéciales dont le capital de confiance populaire a littéralement explosé. La Grande muette doit écouter les Guinéens et faire de leurs aspirations les siennes pour ne pas que se lézarde et s’effrite le capital de confiance acquis mais encore fragile. D’ores et déjà, on peut se réjouir du commencement (timide) de la mise en place du gouvernement.

Des 25 femmes et hommes qui doivent le composer, on en connaît dorénavant 4. C’est laborieux, mais on y parviendra. Sans aucun doute. Il faut se hâter. L’attentisme pourrait être assimilé à une hésitation, une absence de leadership affirmée et, plus grave, à l’existence de querelle de clocher, de défense de chapelles. Il faut savoir que l’incommensurable aménité du nouveau pouvoir à l’endroit du régime erpégiste laisse aux grimpereaux le loisir de préserver l’essentiel de leur capacité de nuisance. «La prudence vaut mieux que la témérité chez un chef», dit-on.

Abraham Kayoko Doré