Le 9 novembre, le prési de la transition a limogé le Directeur général de la Radiodiffusion-télévision guinéenne. Sékouba Savané est remplacé par son adjoint Fana Soumah. Ce dernier a été installé dans ses fonctions, le 12 novembre, avec tambours et trompettes, et loin des regards du sortant qui a préféré bouder.  

Le vent du changement souffle aussi sur la RTG. Parmi les décrets pris par le chef du CNRD mercredi, il y a celui qui remplace Sékouba Savané, DG de cette boîte. Il était contesté depuis des mois par ses subalternes. La contestation s’est accentuée après la chute de son ami, Alpha Grimpeur. Les travailleurs ont finalement eu raison de lui. Et Fana Soumah, fin connaisseur de la RTG, prend les commandes. Mais la prise de fonction, dans la soirée du vendredi 12 novembre, de N’ta Fana (pour les intimes) a été révélatrice de la profondeur du malaise qui avait envahi la RTG. Suspicions, clanisme, exclusion…et même « ethnocentrisme ». Voilà l’atmosphère qui y régnait.

Savané boude la cérémonie

Les travailleurs en avaient jusqu’à la gorge. Ils rêvaient de prendre leur revanche, tenaient à montrer de toutes les couleurs à leur désormais ex-patron pendant cette cérémonie de passation de sévices : « Nous tenons à être à la première ligne pour que nous nous regardions, les yeux dans les yeux, avec Savané », hurlaient des nounous pour la plupart placardisées depuis des mois. Et Sékouba Savané a, semble-t-il, compris qu’il n’était pas le bienvenu à cette cérémonie. Il a préféré se la couler douce à la maison. D’aucuns affirment qu’il était malade bien avant son éviction, mais d’autres travailleurs tenaient « à lui rendre la monnaie de sa pièce. Il nous a tellement fait souffrir, il a été tellement arrogant envers nous qu’il aurait pu venir assumer ses actes. Il allait comprendre qu’on ne doit pas faire du mal à quelqu’un », en rage un autre.

Pour les soutiens de Sékouba Savané, il n’y a pas de doutes que les actions posées par les travailleurs et par la section syndicale sont la base de son limogeage. Ces derniers jurent sur le palpitant qu’ils n’ont « mené la lutte dans le seul intérêt de la boîte. Nous avons œuvré pour la préservation des valeurs de la RTG, pas en faveur d’un homme. Nous n’avons pas combattu pour ou contre un homme, nous l’avons fait contre la gouvernance d’une administration », explique Saa Martin Fancinandouno, responsable syndical.

N’empêche, Rose Pola Pricemou, ministre de l’Information et de la Communication a pris la défense de Savané : « Il n’est pas évident de gérer la chose publique. Reconnaissons qu’il n’est pas facile d’être au service de la nation, disons merci à Monsieur Savané ».

Fana Soumah, lors de son installation au poste de Directeur général de la RTG

Des défis pour le nouveau promu

N’ta Fana n’a pas droit à l’erreur. C’est à ce présentateur vedette du JT de 20h 30 qu’incombe désormais de relever les innombrables défis : «A la RTG, tout est urgent, même le nettoyage des lieux», dit un travailleur. Ces défis, c’est rassembler les travailleurs, réinstaurer une administration efficace, faire face aux revendications des travailleurs, la gestion transparente des ressources matérielles, financières et humaines, la remise sur pieds de la RTG2, la régularisation du cas des stagiaires, certains sont en stage à la RTG depuis plus de 10 ans. Excusez du peu ! Saa Martin Fancinandouno croit savoir que pour relever ces défis, les travailleurs « doivent se regarder en face, se parler pour aplanir nos divergences. Nous avons l’obligation de pardonner tous ceux qui nous ont offensés. Cette réconciliation est possible  avec notre volonté à marcher dans la même direction ».

Fana Soû-marin sait qu’il est attendu au tournant : «Les plus grands obstacles peuvent être franchis, grâce à des volontés bien assises. C’est ce que nous tenterons de faire ensemble… Je prends l’engagement (auprès) des travailleurs de la RTG que nos compatriotes ne seront pas déçus. La concurrence est rude, la technologie avance, l’aventure s’annonce donc difficile, mais pas impossible». Pour y arriver, Fana demande aux nouvelles autorités des moyens conséquents à leurs dispositions «pour que la RTG reprenne la place de leader dans la sous-région, parce que nous sommes tenus par l’obligation des résultats». Il veut que les anciennes pratiques soient des lointains souvenirs : «Refusons d’êtres des journalistes et techniciens instrumentalisés, nous devons apprendre à nous faire respecter, à sauver notre crédibilité…C’est unis que nous serons forts».

Rose Pola Pricemou prévoit de s’impliquer pour que le travail se fasse dans de meilleures conditions, mais elle veut de «l’engagement, de l’efficacité. J’attends aussi qu’on travaille dans le plaisir, la générosité et la rigueur». Elle veut aussi mettre fin au clanisme qui a gangréné la boîte : « Il n’y aura pas de camps. La seule motivation sera de redorer le blason de la RTG, chacun sera traité de manière juste et équitable ». Vaste programme !

Yacine Diallo