L’eau potable est une denrée rare dans nos villes. La SEG, Société des Eaux de Guinée, rime avec le sec. Depuis quasiment un mois, les robinets de la ville de Labé sont à sec. Paradoxe du «Château d’eau de l’Afrique de l’Ouest».

On accuse la panne du groupe électrogène de 550 MW, dévolu au barrage de Touri dans la sous-préfecture de Tountouroun, située à environ 7 kilomètres au nord-est de la ville. Les forages font l’effet d’une goutte d’eau dans la mer. De nombreux  habitants du quartier Dow-Saré par exemple vont jusqu’au quartier Sassè, pour s’offrir l’eau dans les forages. Ceux qui ont la chance d’avoir des magnats généreux disposant de forages à domicile s’approvisionnent gratuitement. Sinon, le bidon d’eau vaut 500 à 1 500 francs glissants, et sans compter le frais de transport.

Souleymane Diallo fait des brochettes au quartier Konkola : «Je cherche chaque jour 5 bidons d’eau au quartier Sassè. Le bidon me coûte 1000 Fg. Et ça ne suffit pas, je me débrouille ; il n’est pas facile de trouver de l’eau, de nombreuses personnes y accourent. C’est la galère, le gouvernement doit nous venir en aide.»

Fatoumata Diaraye, 16 ans a une maman, gargotière au quartier Konkola. L’adolescente enrôle frères et sœurs, pour transporter au quotidien 30 bidons d’eau. «C’est très difficile de s’approvisionner. Difficile aussi d’actionner la pompe, cela nous épuise. Les 30 bidons nous coûtent 15 000 Fg».

Au quartier Dow-Sarè, la corvée d’eau est le lot des femmes, pour leur ménage. «Nous souffrons beaucoup. Nous sommes obligées de mesurer l’eau que nous utilisons. On utilisait par exemple 5 bidons d’eau par jour, aujourd’hui on n’utilise que 3 bidons. Parce que nous ne pouvons pas avoir de l’eau tout le temps, ça fait loin là où nous la trouvons», se navre Tiguidanké.

Un nouveau groupe électrogène, mais

Le dimanche 19 décembre, un groupe électrogène de 500 MW flambant-neuf a débarqué au barrage hydraulique de Touri. Dès le lendemain, l’eau a coulé des robinets. Malgré tout, la SEG peine à satisfaire la demande. Le seul groupe électrogène n’est pas puissant. On a un besoin journalier de 200 000 m3 d’eau, la SEG n’en fournit que 4 000 m3. Depuis 1996, le réseau de 25 Km de conduites d’eau n’a pas été élargi, le besoin actuel est de 75 km pour couvrir une grande partie de la ville. Autre difficulté, seuls 4 000 et poussières ménages sont abonnés à la SEG, dans la commune urbaine, sur un total dont on n’a pas obtenu le nombre. La région, par contre, compte 166 488 ménages, selon les statistiques du Recensement général de la population et de l’habitat de 2014.

La retenue d’eau du barrage Touri ne fait pas problème. Ses installations sont en bon état, mais il y a des améliorations à faire. Vétustes, les conduites d’eau pètent souvent.

Le manque d’énergie n’est pas pour faciliter la fourniture d’eau à Labé. « Nous demandons au gouvernement de nous aider d’avantage à avoir des équipements nécessaires, pour pouvoir fournir de l’eau à la population. Si on nous dotait des moyens comme on le faisait pour la société d’électricité de Guinée, je suis sûr que nous pouvons donner de l’eau comme il le faut », note Mamadou Cellou Diallo, chef de la distribution de la SEG en Moyenne-Guinée.

La Guinée, château de l’Afrique de l’Ouest, a ses robinets à sec, en ville comme dans les villages. Ça s’appelle avoir les pieds dans l’eau et avoir soif.

Mamadou Adama Diallo,

envoyé spécial