«De l’hébergement des présidents Ossadjéfo Kwamé Nkrumah, William Tubman, Yasser Arafat, le Roi Fayçal, Valéry Giscard d’Estaing, Léopold Sédar Senghor, Mac Namara, le Roi Hassan II, Léonid Brejenev, Amilcar Cabral, Ahmed Ben Bella, le prince Norodom Sihanouk, Fidel Castro Ruz, j’en passe. ‘’Bellevue’’ aura été, pour la mémoire de notre patrie, un haut lieu, un repère dans l’histoire moderne de notre continent. L’histoire des Mouvements de Libération y a connu et naissance et soutien indéfectible, puis au passage, une agression (bombardement) le 22 novembre 1970. Pour ce faire, le site des cases de ‘’Bellevue’’, tout en demeurant la propriété des héritiers d’une famille, il n’en demeure pas moins un patrimoine chargé d’histoire. Les cases de ‘’Bellevue’’ abritent un pan déterminant, ainsi que porteur de l’histoire de notre nation…»
Ce texte a été tiré du poste d’un grand commis de l’État guinéen, l’ancien ministre des Affaires étrangères, «le camarade» Kozo Zoumanigui. Il dépeint avec ferveur le rôle «historique» joué par la Case de Bellevue dans les services de protocole de la Première République. Malheureusement, dans la narration, l’émotion semble l’emporter sur «la vérité historique». La Case de Bellevue n’a pas hébergé Fidel Castro lors de son périple guinéen de mai 1972. La révolution guinéenne n’a pas dû rencontrer un hôte de marque aussi turbulent que le Lider Maximo de la révolution cubaine.
Tout a commencé le 2 mai 1972 qu’il s’est agi d’accueillir, à l’aéroport international de Gbessia, les «journalistes» cubains devant couvrir le voyage de leur président, attendu le lendemain 3 mai. Précision : comme journalistes, l’Illouchine 18 des lignes aériennes cubaines n’a débarqué que 60 gorilles doublés d’hommes de médias, parmi lesquels l’interprète du camarade Fidel. Le 3 mai, tout le gotha de la révolution guinéenne est à l’aéroport. A l’arrivée de l’avion de l’hôte de marque, une figure toute souriante, celle de Diallo Telli, est la dernière à descendre de l’escalier de ce qui sert aujourd’hui d’aéroport national, pour rejoindre les autres membres du Gouvernement au pied de la passerelle. Telli venait d’être nommé ministre de la Justice. Renseignements pris, Fidel Castro était accompagné de son ministre de la Justice, à qui il fallait un interlocuteur, surtout qu’apparemment, les deux Présidents divergeaient profondément sur le traitement que la Guinée avait choisi de réserver à sa 5è colonne impérialiste. Sékou offrait la tombe ; Castro, l’exil. Aucune cérémonie à l’arrivée.
Le cortège s’ébranle plutôt vers le stade 28 Septembre. Sékou Touré au volant de sa voiture. Castro, à sa droite. Trois fois le tour du stade bondé de militants en uniforme blanc, puis la tribune officielle. Trois fois «Vive la Révolution» ! Puis, rien. Renseignements pris, Sékou faisait 40 degrés de fièvre. Au Palais du Peuple, voilà Castro dans ce qui aura servi de bureau à Damaro. C’est là qu’il doit loger. Il refuse. Monte à la Présidence, dans la chambre à coucher d’Ahmed Sékou Touré. Fouille tout, jusqu’au matelas et s’installe. Renseignement pris, «La Guinée est infestée d’agents de la CIA.» Le chef de protocole, Aly Bangoura, est tout baba.
Diallo Souleymane