Connu pour son franc-parler et son engagement pour l’instauration de la démocratie en Afrique, l’art-triste reggae man, y-voit-rien, Tiken Jah Fakoly, affirme que depuis peu, le combat contre la démocratie en Afrique prend une tournure. Depuis que la fièvre de troisième mandat a traversé l’esprit des dirigeants africains, il y a un grand recul dans le combat pour la liberté d’expression, mais, dit-il, il revient aux artistes « de ne pas lâcher, de continuer le combat pour l’instauration de la démocratie. Il y a eu des morts partout en Afrique comme en Guinée, mais la révolution continue depuis le temps de Lansana Conté où plusieurs jeunes ont été assassinés, des artistes arrêtés, etc… Donc, il ne faudrait pas qu’on baisse les bras. Continuons le combat pour ne pas que ceux-là soient morts pour rien », a-t-il affirmé ce mercredi, 5 janvier, dans l’émission les « Grandes Gueules » d’Espace FM.
La solution contre le troisième mandat
La question de 3è mandat est aujourd’hui une préoccupation sous régionale, pas qu’en Guinée, en Côte d’Ivoire ou au Mali qui a été une démocratie jusque-là. Selon Tiken Jah Fakoly, la solution contre ce phénomène est d’organiser une grande assise entre les mouvements de la société civile, les artistes engagés dans la lutte avec les présidents de la CEDEAO, pour enfin interdire aux dirigeants africains de briguer un 3è mandat. « Il faut vraiment arrêter cette machine, parce que c’est elle qui occasionne les coups d’Etats et perturbe la démocratie en Afrique » mentionne-t-il.
Parlant du Mali, le reggae man craint que ce pays ne devienne un champ de bataille pour les grandes puissances. « Le Mali est un pays indépendant et je pense qu’il faut l’accompagner dans sa résistance. Nous avons envie de faire de cette indépendance une réalité, je pense que l’enjeu aujourd’hui, c’est de trouver qu’il est indépendant et que ce pays peut demander à la Russie, à la Chine et à n’importe quel pays de l’aide et ce n’est pas à la France de dicter ce qu’ils doivent faire. C’est pourquoi j’interpelle tout le monde à soutenir cette résistance. Le prix va certes être difficile à payer et c’est à la population d’en payer les frais, parce que les pays occidentaux vont s’arranger de telle sorte qu’il y ait des difficultés, pour que le peuple malien se lève contre les dirigeants actuels. Je suis contre les coups d’Etat, mais je pense qu’il y a des pays en Afrique où il faut faire des réparations, pour repartir sur de nouvelles bases, parce que la démocratie est en train d’être utilisée par des dirigeants, pour en faire un parti unique».
De la transition guinéenne
Tiken Jah Fakoly soutient qu’il est contre les coups d’Etats militaires, parce que si les militaires durent ils s’éternisent au pouvoir. « Je pense que ce n’est pas dans leur intérêt d’ailleurs, parce que vous savez quand on prend goût du pouvoir, on n’a du mal à partir, parce que tous ceux qui viendront vous voir, vous diront que vous êtes des sauveurs. Il y a eu des exemples en Guinée, en Côte d’Ivoire, etc… Donc, c’est dans l’intérêt même des militaires de ne pas rester longtemps au pouvoir. Et s’ils ne restent pas longtemps, le peuple peut les réclamer un jour. Le peuple malien l’a fait avec Amadou Toumani Touré. Mais s’il y a des choses à régler par exemple comme en Guinée, c’est un réglage qui se fait, mais après, il faut absolument que le Colonel Doumbouya rentre au camp, pour organiser les élections. Et s’il fait bien les choses, il sera l’exemple palpable de la sous-région qu’on n’a eu avec ATT. A temps normal, une transition ne doit pas dépasser trois ans».
Assimi Goïta demande 5 ans pour la transition au Mali
La durée de la transition au Mali passe de six mois à cinq ans ! Le reggae man estime que si les autorités Maliennes demandent 5 ans pour la transition, cela risque d’inspirer les autorités guinéennes, même si les réalités ne sont pas les mêmes. Au Mali, les exigences sont plus importantes qu’en Guinée à cause de la question sécuritaire. «Cela risque de passer difficilement. C’est vrai que la majorité des maliens soutiennent cette transition, mais en même temps que c’est un pays où les gens sont debout. Et je pense que bientôt, les gens vont s’organiser pour faire en sorte que ceux qui ont décidé de faire 5 ans reviennent à 3 ans. Mais si cela passe au Mali, ça passera aussi en Guinée », a tranché Tiken Jah Fakoly, avant d’exhorter les nouvelles autorités du Mali et de la Guinée, à ne pas s’éterniser au pouvoir. « Organiser les élections et renter dans les camps, parce qu’après cela risque de répéter les mêmes situations du passé », a-t-il averti. A savoir s’il sera écouté par les deux putschistes.
Kadiatou Diallo