Interview du dernier Directeur Général de la compagnie nationale, Sékou Sangaré. Mamadou Sylla n’avait pas encore pointé le bout du nez
Description indicative. Cette situation fut notamment engendrée par la politique d’acquisition par leasing des aéronefs dans les années 70. Des saisies par des créanciers s’ensuivirent, notamment lors des retours en maintenance dans les ateliers spécialisés en Europe. Le cas le plus illustratif fut celui du Boeing 737-2R6C: Dernier opérateur: Air Guinée. Immatriculation initiale: 3X-GCB. MSN: 22627. Numéro de ligne (Line No.): 779 Acquis neuf et mis en service en oct. 1981. Statut : Placé sous séquestre en 2005 à Perpignan en France pour impayés puis repeint en blanc pour enlever le pavillon de l’opérateur. Dernière Immatriculation : 3X-GCB. Il s’ensuivra un relâchement de la maintenance par crainte de saisine par les créanciers pour traites de leasing non honorées. Le cas le plus illustratif fut celui du Boeing 737-MSN 23469:
Dernier Opérateur Air Guinee Express; Numéro de série (MSN):23469. Numéro de ligne(LN):1266 Type737-205. Date premier vol: 06/08/1986. Statut : Détruit après accident Dernière Immatriculation : 3X-GCM. Dernier Opérateur Air Guinee Express. Pays : Guinée .Durée exploitation: 2002 – 2004. Codes: 2U GIP
Question: Est-ce que vous pouvez nous donner un aperçu historique de la création d’Air-Guinée de ses activités de transport ?
La compagnie nationale Air Guinée a été créée le 30 décembre 1960. Son objectif consistaait à assurer le transport aérien des personnes et des biens à l’intérieur du pays, en Afrique et dans le monde entier. Pour accomplir ces missions, très tôt le gouvernement guinéen a noué des accords de coopération, d’abord avec la Tchécoslovaquie et l’Union Soviétique pour acquérir les premiers avions et assurer la formation des pilotes et des techniciens. Dans un deuxième temps, cette coopération a été élargie aux Etats Unis d’Amérique pour former les premiers agents commerciaux. En fait les opérations commerciales de la compagnie ont démarré en 1962, à l’intérieur du pays et se sont progressivement étendues aux pays voisins et enfin à la sous-région ouest africaine. Par rapport à ses premières années de croissance, Air Guinée a été confrontée à une diminution de sa flotte. En effet, la CNAG (Compagnie Nationale Air Guinée) disposait en 1987 d’un Boeing 737-200C acquis tout neuf en 1981; d’un B707-200; d’un B 727-200 et d’un Dash 7 de 50 places qui effectuait essentiellement la desserte de l’intérieur du pays.
Dans le cadre des opérations de restructuration des entreprises publiques en 1987, la décision a été prise de vendre le Boeing 727 et le B-707. Seuls le B-737 et le Dash 7 sont restés dans le portefeuille d’Air Guinée. Le Dash 7 est tombé en panne en mai 1994, et depuis ce temps, seul le B737 est opérationnel. Il effectue les vols dans une grande partie des pays de la CEDEAO jusqu’à Kinshasa. Il est également utilisé pour les vols présidentiels, c’est à dire les déplacements officiels du Chef de l’Etat. En 1997 pour répondre aux besoins existants sur le réseau domestique, la CNAG a décidé d’acquérir auprès de la compagnie chinoise un avion de 50 places Y-700. Voilà donc globalement l’historique de la compagnie.
Quels sont les résultats de l’entreprise en terme de nombre de passagers et pouvez-vous également nous parler du nombre de travailleurs qui contribuent à l’activité de la compagnie ?
Avec un seul Boeing 737-200C et le Y-700 utilisé essentiellement à l’intérieur du pays, Air Guinée transportait en moyenne 45.000 passagers par an et son chiffre d’affaire annuel oscillait entre 8 et 10millions $USD. Les escales que nous desservions sur le réseau régional sont : Bamako, Accra, Banjul, Dakar, Abidjan, Kinshasa, Monrovia, Freetown, Lagos avec une moyenne de 40 heures de vols par semaine. Les escales de Bissao et de Libreville s’y se sont ajoutées. Tout le personnel totalisait 250 travailleurs à fin 1999, avec une masse salariale de 45.000.000 FG par mois, soit l’équivalent de vingt-sept mille dollars américains à l’époque.
Quel est le rapport entre le gouvernement et la compagnie dans le cadre de la programmation et de l’évolution des vols assurés par la compagnie?
Le premier élément est que depuis la création la compagnie, l’Etat est le seul actionnaire, donc l’entreprise est la propriété entière de l’Etat (100%).
Le 2ème élément est le fait qu’Air Guinée a le statut d’entreprise publique autonome.
Cette autonomie qui est intervenue les dernières années de son existence donne à Air Guinée la liberté d’assurer librement toute la programmation sur ses lignes et de fixer ses tarifs en ne tenant compte que du seul critère de rentabilité. A titre d’illustration, nous venons de décider l’arrêt des vols sur le réseau domestique en raison du déficit important engendré par son exploitation.
Toutefois, en arrêtant provisoirement nos opérations, nous avons lancé une réflexion profonde pour trouver des solutions adaptées à l’exploitation du réseau domestique. Il sera ensuite utile de discuter avec l’Etat de nos propositions de façon à ce que si l’exploitation doit se faire qu’elle se fasse dans des conditions économiques et financières profitables à Air Guinée.
En effet, la compétitivité du transport terrestre s’est considérablement améliorée ces dernières années au point que les tarifs de la compagnie déjà insuffisants pour couvrir les charges directes, sont élevés par rapport à ceux du transport terrestre avec un rapport de 2 à 4.
Nous sommes ainsi contraints de revoir notre stratégie en matière de choix des types d’aéronefs et de prestations à offrir aux passagers sur le réseau domestique, sans écarter l’éventualité d’aides bien ciblées de l’Etat.
Il faut également indiquer que l’Etat est un des clients importants de la compagnie puisque nos prestations uniquement en matière d’affrètement pour les vols VIP représentent près de 10% en 1999 de notre chiffre d’affaire. Nos factures ont toujours été payées à temps.
On parle de partenaire de l’entreprise, quel pourrait être le genre de partenariat ou les éventuels investisseurs qui vous intéresserait, et s’intégreraient dans le schéma de développement du pays ?
Air Guinée en tant qu’entreprise est vivement intéressée par la participation d’un partenaire privé. Nous estimons que ce partenaire privé pourrait adopter à la fois des équipements (en priorité des avions) et du savoir-faire ; donnant ainsi à Air Guinée les moyens de combler son retard sur les autres compagnies de la sous-région. Plusieurs schémas sont possibles pour obtenir cette participation du privé. Il est envisageable par exemple que le privé rentre dans le capital d’Air Guinée par le biais d’une opération de vente d’une partie des actions de l’Etat.
Dans ce cas, nous disons qu’il faut rester pragmatique et réaliste, s’agissant de cette hypothèse car, lancer une opération de privatisation d’une compagnie comme la nôtre qui n’a qu’un seul appareil et dont la dette à court terme est pratiquement l’équivalent d’une année de chiffres d’affaires ne serait pas intéressante pour un partenaire privé sérieux. Au préalable, il faut trouver une solution à ce problème de la dette d’Air Guinée au niveau de l’Etat.
Une autre possibilité est d’envisager une phase transitoire, que le partenaire privé et Air Guinée conviennent d’une exploitation commune des droits de trafic pendant que, parallèlement, des mesures d’ajustement seront mises en œuvre par la compagnie à l’instar de la mise en place de structures de gestion légère et professionnelle dotée d’outils de gestion performants, la formation des ressources humaines, la création d’un environnement de travail favorable, l’allègement de l’effectif du personnel etc…Au bout de la phase transitoire, le partenaire privé pourrait rentrer dans le capital en rachetant à l’Etat une partie de ses actions.
En tout état de cause, il nous faut donc envisager dans la perspective de la participation du privé les solutions réalistes et faisables qui lui offrent suffisamment d’incitations.
Nous estimons qu’une telle opération est possible puisqu’un marché porteur existe et que des avantages réels sont offerts par Air Guinée : droits de trafic en Afrique, au Moyen Orient et en Europe et existence de techniciens professionnels prêts à redonner à leur compagnie une nouvelle opportunité de développement dans un contexte nouveau où l’Etat ne subventionne plus et la compagnie doit vivre de ses propres ressources.
Combien de temps vous faudra-t-il pour arriver à cette opération de privatisation ?
: De notre point de vue, je dois dire aujourd’hui que nous sommes prêts à lancer ce partenariat. Nous sommes en train de travailler sur des propositions concrètes. Par exemple, nous pouvons exploiter les droits de trafic dont dispose Air Guinée en Afrique et au Moyen Orient en passant des accords commerciaux avec certaines compagnies aériennes. Ainsi, des passagers d’Air Guinée pourraient aller en Afrique Australe ou au Moyen Orient en empruntant d’autres compagnies avec lesquelles ces accords seraient signés.
De même, nous sommes à la recherche d’un partenaire privé qui puisse exploiter à son compte les droits de trafic dont nous disposons sur Paris et Bruxelles à la seule condition qu’il nous fasse des reversements supérieurs à ce que Sabena et Air France nous donnent aujourd’hui.
C’est un projet concert que nous sommes en train d’étudier. Nous sommes prêts à examiner l’ensemble des modalités d’exécution de ce partenariat qui permettrait à air Guinée d’améliorer sa trésorerie.
Que représente le chiffre d’affaire de ces droits réservés par Air France et Sabena ?
Aujourd’hui, il représente à peu près 7 à 10% du chiffre d’affaire.
Concrètement est-ce que vous demandez au nouveau partenaire un engagement véritable à former et à faire bénéficier Air Guinée de son savoir-faire et technique ?
Absolument, la formation des employés est très importante, c’est vrai qu’Air Guinée est confrontée à des problèmes d’équipement et de formation. Quand on prend les techniciens ou les pilotes, il y en a beaucoup qui sont au seuil de la retraite, donc il faut investir dans la formation et l’équipement des ateliers de maintenance avec des outils perfectionnés.
Vous, en tant que directeur, quelle est votre stratégie pour convaincre un éventuel partenaire ?
Pour rechercher un partenaire, il faut d’abord créer la confiance, le deuxième point, c’est de lui proposer dans le cadre d’une négociation ouverte, un projet avec des objectifs concrets et des modalités pour son exécution. Au terme de la négociation, chaque partie devra respecter ses engagements. En ce qui nous concerne, le préalable c’est l’appui de l’Etat pour décharger Air Guinée du poids excessif de son endettement de court terme. Ensuite, l’Etat doit réaffirmer sa volonté politique de se désengager d’Air Guinée au profit du secteur privé.
Sur ces points, nous sommes tout à fait d’accord avec notre ministère de tutelle et notre gouvernement.
L’objectif étant de donner la capacité à une nouvelle Air Guinée qui sera plus efficace et plus compétitive sur le marché libéral du transport aérien. Ceci offre ainsi à Air Guinée les bases pour la recherche d’un partenaire privé.
Source : World Investment News, 2000.