Fin janvier denier, une histoire de 3 000 dollars entre Thierno Mamadou Dansoko et Hadiatou Bah dit Hadya Présie avait fait grand bruit. Cette cinéaste accusait l’opérateur économique de lui avoir proposé cette somme pour obtenir des faveurs sexuelles. L’affaire s’est finalement retrouvée devant la justice. Hadya Présie a été interpellée, écrouée à l’hôtel cinq étoiles de Coronthie avec Mohamed Chérif Conté et Mamadou Aliou Kanté. Leur procès s’est ouvert ce 10 février au tribunal de première instance de Dixinn.

Hadya Présie est inculpée avec ses coaccusés pour «Chantage et tentative d’extorsion» à l’encontre de l’importateur des produits Armanti en Guinée. A la barre, elle a plaidé non coupable. Elle réitère avoir fait l’objet d’un harcèlement sexuel : «J’ai travaillé pour Thierno Mamadou Dansoko. Il m’a fait des avances, j’ai dit non. Il a insisté, insisté… puis a arrêté. Au bout d’un moment, il est revenu me demander de l’accompagner à Kamsar. Entre temps, j’ai demandé une collaboration avec lui, dans le cadre de mon projet. Monsieur Dansoko a demandé à coucher avec moi, pour qu’il me donne 3 000 dollars, j’ai refusé. Il m’a carrément dit : ‘’Tu ferais mieux de prendre cet argent, parce qu’avec ou sans cette somme, je vais coucher avec toi« . Les messages, les menaces se multipliaient. Il m’appelait, ses frères, ses amis aussi… J’ai eu peur, je suis allée me réfugier chez une amie».

Hadya Présie reconnaît avoir demandé 80 000 dollars et une voiture à Thierno Mamadou Dansoko, mais, dit-elle, c’était pour stopper les menaces : «Je lui ai dit : Thierno, vu que tu continues à me menacer, maintenant tu vas me donner 80 000 dollars et une voiture, sinon je vais faire fuiter l’affaire. Mais en réalité, je voulais avoir un papier qui prouve que Thierno me menaçait. Je pensais qu’en faisant une telle demande, il allait me laisser tranquille».

«Pourquoi avez-vous demandé une telle somme ?», lui questionne le juge. «Je voulais avoir une preuve matérielle qu’il me harcèle. Sinon, je pouvais lui demander de faire un virement bancaire où je rentre en Belgique et je lui demande l’argent à partir de là-bas, parce que lui, tout ce qu’il voulait, c’était de coucher avec moi. Mais si je voulais faire du chantage, je ne me serais pas rendue dans une banque et en pleine journée». «Combien avez-vous reçu?» «Rien du tout», répond Hadya Présie.

Selon le représentant du ministère public, c’est Hadya Présie qui aurait plutôt menacé le plaignant. Elle réfute ces accusations : «Je ne l’ai pas menacé, je voulais juste qu’il arrête, peut-être j’ai dû lui mal parler». Elle se dit convaincue qu’elle s’est retrouvée en prison à cause de l’influence du plaignant : « Il est plus fort que moi, il a plus de relations que moi, il est plus connu ici que moi. Je n’ai jamais accepté de le rencontrer en privé. Nous ne nous sommes vus que deux fois, devant témoins. Il avait tellement de renseignements sur moi, qu’il savait que je suis vierge. Il voulait m’avoir par tous les moyens. Son frère m’a même dit à la gendarmerie que si je ne donne pas ma virginité à son frère, je la donnerai à un prisonnier».

Selon le parquet, Hadya Prési aurait pourtant reconnu les faits à l’enquête préliminaire et devant le juge d’instruction. Elle le concède, mais sous contrainte, dit-elle : «Ils m’ont demandé de faire une vidéo pour dire que j’ai menti, et eux, ils retirent leur plainte. Ma famille, les plaignants, le procureur m’ont demandé de reconnaître tout, pour que le problème s’arrange. Moi, j’aurais voulu être seule dans cette affaire, pour que je puisse assumer. Mais même si je reste en prison, je ne regretterai jamais d’avoir dit non à Dansoko…»

Les deux autres prévenus ont également nié en bloc les accusations articulées contre eux. Mohamed Chérif Conté affirme qu’il ne connaissait même pas Hadya Présie. Il s’est retrouvé dans l’affaire par le biais de son ami, Mamadou Aliou Kanté : «Je ne connais pas cette femme, je ne sais même pas ce qui s’est passé». Mamadou Aliou Kanté est le chauffeur de Hadiatou Bah. Lui aussi jure qu’il ne connaissait rien de l’affaire : «Elle m’avait dit qu’un homme la harcelait, qu’elle avait peur. Je lui ai dit de refuser et de se trouver un bon mari. C’est vrai que nous avons été arrêtés à Lambanyi, même pas par les gendarmes, mais par les frères du plaignant».

A la fin de l’audience, Thierno Mamadou Dansoko et son avocat se sont présentés pour dénoncer l’ouverture du procès à leur insu. Le parquet a demandé le renvoi, pour la comparution de la partie civile. Cela a provoqué l’ire de la défense : «Monsieur Dansoko ne viendra jamais à ce procès. Il veut utiliser la justice, pour se refaire une image, parce qu’il se connaît. Si vous voulez renvoyer, nous vous prions d’accorder la liberté à nos clients. Nous ne voyons pas pourquoi ils vont continuer à croupir en prison», déclare Me Salifou Béavogui. Le parquet s’oppose: «Monsieur le président, acceptez de les maintenir en prison, de maintenir la sérénité dans cette procédure».

Le juge a ordonné le maintien en détention des prévenus et a renvoyé l’affaire au 17 février.

Yacine Diallo