Arrêté le 18 février dernier, placé sous mandat de dépôt le 28 du mois, Alhassane Bangoura est décédé le 14 mars. Ce 24 mars, en conférence de presse à Cona-cris, des jeunes de Yattayah se sont joints à la famille et aux avocats du défunt pour inviter la justice guinée-haine à faire toute la lumière sur le décès d’Alhassane Bangoura, survenu à l’hôtel cinq étoiles de Coronthie. Père de six enfants dont deux garçons, il est accusé de vol d’un poste téléviseur chez Ousmane Barry. Il a été dénoncé par une mineure de 15 ans qui s’occupe des travaux ménagers chez la famille Barry. Le porte-voix des jeunes Yattayah réclame « la vérité, rien que la vérité » sur les circonstances du décès.

« Alhassane Bangoura est décédé pour des raisons pécuniaires, non pour des raisons juridiques », dénonce Me Sékou Koïta, avocat de la famille Bangoura, lequel regrette des manquements tout au long de la procédure. « Nous sommes déterminés à faire triompher la vérité dans cette affaire. Alhassane Bangoura est un innocent qui est parti dans des circonstances très peu honorables. Ça ne plaira à personne d’avoir en mémoire que son père est décédé en prison pour un vol de téléviseur qui n’a pas été prouvé. Vous imaginez la douleur que ressent sa famille ? Il  est mort de manière indigne et injuste. Nous avons recouru à tous les moyens juridiques et judiciaires pour ne pas en arriver là, en vain. Ce qui s’est passé ne devait pas se passer dans un Etat de droit », regrette-il.

Côté justice, l’affaire traîne, bien que le ministre de la Justice, Moriba Alain Koné, ait rassuré la famille du défunt, de la poursuite de l’affaire jusqu’au bout. Amen ! Pour l’heure, la famille Bangoura garde son mal en patience, attendant les résultats de l’autopsie décidée par la juge d’instruction, dame Ramatoulaye Barry.

Genèse de l’affaire

« Alhassane Bangoura a été interpellé à 6 heures par la Brigade anti-criminalité numéro 5 de Nongo pour vol d’un poste téléviseur, le 18 février 2022. Qu’est-ce que la Brigade à avoir dans ça, alors qu’elle est constituée pour lutter contre le grand banditisme ? Quand il a été arrêté (le jour du mariage de sa fille), il a été transféré au Commissariat central de Nongo pour l’enquête préliminaire. Quelle humiliation ! Ils ont appelé des témoins qui ne l’ont pas identifié », explique Me Fodé Dioubaté. L’enquête préliminaire bouclée, Alhassane Bangoura a été transféré au parquet spécial du tribunal pour enfant à Kaloum. A « notre étonnement », poursuit l’avocat, le procureur spécial fait retourner Alhassane Bangoura passer la nuit du 24 février en garde à vue, au Commissariat central de Nongo. Ensuite, « il a requis l’ouverture d’une information judiciaire en saisissant un cabinet d’instruction, en la personne de la juge Ramatoulaye Barry du tribunal pour enfant de Kaloum. Là aussi, on a constaté des manquements », dénonce-t-il.

Il « ne devait » pas être en taule

Me Sékou Koïta estime qu’Alhassane Bangoura ne devait pas être embastillé à cause d’un prétendu vol de poste téléviseur. Il invoque le principe selon lequel «la liberté est le principe, la prison l’exception. » Mais, le risque de fuite et celui de faire pression sur les témoins sont, entre autres, des motifs qu’ayant fait valoir la juge d’instruction pour le coffrer.

« Avec toutes les garanties que nous avons mises en avant, l’ordonnance de placement en détention provisoire d’Alhassane Bangoura a été prise. Il a été conduit à la Maison centrale de Conakry comme un bandit de grand chemin. Nous avons écrit une demande de mise en liberté provisoire, sans succès. On nous parlait d’une caution de dix millions de francs guinéens, mais finalement, j’ai proposé une caution de trois millions. On devait déposer la caution le 14 mars, lorsqu’on nous a informé qu’il est décédé », regrette Me Koïta qui assure qu’Alhassane Bangoura n’a donné aucun signe de maladie, à la veille de son décès.

Yaya Doumbouya