Du 23 au 25 avril s’est tenue à Conakry la 14ème édition des 72 heures du livre, après deux ans d’absence. COVID-19 oblige ! L’événement culturel et littéraire est organisé chaque année par L’Harmattan Guinée. Le thème : Sauvegarde du Patrimoine et Paix sociale. Ils étaient nombreux les élèves, étudiants et professionnels à visiter les stands, participer aux conférences et dédicaces.
Selon Mohamed Lamine Camara, délégué général de l’édition, « l’objectif était de réunir des professionnels guinéens et des spécialistes de questions du patrimoine et de paix sociale pour qu’ils apportent leur contribution à la construction de la nation guinéenne, mais aussi favoriser les rencontres entre les Guinéens et les étrangers afin de discuter sur les enjeux liés au marché du livre à l’heure du numérique. » Mais aussi outiller les éditeurs et auteurs guinéens pour pouvoir conquérir le marché international.
Comment se porte l’édition en Guinée ? Mohamed Lamine Camara répond : « Il y a une dizaine d’années on arrivait à peine à une dizaine de publications par an. Actuellement, on fait plus de 100 publications par an. C’est une avancée. On comprend que les Guinéens ont le besoin et la volonté de s’exprimer, parce qu’il y a aussi un public réceptif. Il y a des écrits, il y a des lecteurs. Le défi, c’est d’arriver à une production entièrement locale à travers la mise en place des imprimeries modernes. C’est de cette façon qu’on parviendra à conquérir le marché international. » M. L. Camara milite pour la ratification des accords internationaux, notamment la Convention de Florence et son protocole additionnel de Nairobi, une politique nationale du livre. En tout cas, baisser les coûts de production et faciliter l’accès au livre.
La petite famille dans la grande
Oumar Benkassem, du Maroc, pays invité d’honneur, le fondateur d’édition et libraire, est à la tête d’une forte délégation composée d’écrivains, d’éditeurs, de libraires. « Je suis satisfait de ma participation à cette édition. Nous n’avons pas fait qu’exposer et vendre, nous avons participé à des conférences, offert des livres gratuitement. C’est une façon de vulgariser notre littérature et rendre le livre accessible pour certaines cibles qui n’ont pas les moyens de se l’offrir » Selon Benkassem, la littérature marocaine se porte mieux : « SM le Roi Mohamed VI a amélioré les choses. Le Maroc d’aujourd’hui est très différent du Maroc d’avant. Le roi a ouvert le pays vers le reste de l’Afrique. Il dit souvent que si le Maroc est la petite famille, l’Afrique est la grande famille. »
Le Franc guinéen, un patrimoine
Le thème : Sauvegarde du patrimoine et paix sociale ne pouvait pas ne pas interpeller la Banque Centrale de la République de Guinée (BCRG). Elle a animé un panel sur la Monnaie guinéenne. « Ce patrimoine de souveraineté », comme dit Almamy 2 Sylla, chef service à la Direction des opérations des échanges de la BCRG, responsable de la salle des marchés financiers. « Le départ de la Métropole a créé des difficultés aux autorités guinéennes. Cela a amené les autorités à créer la monnaie guinéenne en tant que patrimoine et élément de souveraineté. La création de la monnaie le 1er mars 1960 a été précédée par la création, le 29 février 1960, de l’Institut d’émission. A l’époque, c’était la parité : 1 FG = 1 FCFA. Ce Franc guinéen a couru jusqu’au 02 octobre 1972, a été remplacé par le Syli qui a été remplacé en 1986 par le GNF actuel ». De nombreuses réformes auraient été entreprises par l’institut d’émission pour conforter le GNF face aux principales devises. Grâce à la salle des marchés la BCRG ganrantirait la transparence de l’offre des devises. Le franc guinéen, ce patrimoine ne survivrait pas à la monnaie sous régionale annoncée pour 2027.
Espace de partage
Nansa Koundouno, assistante au Département documentation et archives au CIRD, Centre international de recherche et de documentation, salue les 72 heures du livre, belle occasion pour les institutions et ONG d’exposer leurs activités et partager leur savoir-faire. « Comme vous le savez, au-delà de la recherche et la formation, le CIRD fait aussi siens la Littérature et le Patrimoine. Dans ce cadre nous organisons le Prix Littéraire Williams Sassine. Nous avons enregistré de nombreuses visites et distribué une soixantaine d’exemplaires des recueils des précédentes éditions de ce concours littéraire international, le Prix Littéraire Williams Sassine ».
Jaques Lewa, journaliste essayiste
Audiovisuel en Guinée : Contenu et défis, le journaliste Jaques Lewa Leno du groupe Hadafo a dédicacé son essai le 25 avril à l’occasion de la 14ème édition des 72 heures du livre. L’auteur dit qu’il était en train de collecter des données sur une étude comparative qu’il réalisait sur les contenus éditoriaux de la RTG (Radiotélévision guinéenne) et Espace TV quand il a constaté que la RTG a toujours eu la même politique éditoriale, « attachée aux activités du pouvoir et de l’administration publique ». Pour l’essayiste, cette façon du média public de traiter l’information influence les chaînes privées dans leur travail. Celles-ci auraient encore du mal à distinguer les continus éditoriaux. « Ce qui pour lui suffisait à susciter le débat et les questions sur les thèmes que les médias abordent », observe-t-il. Il se demande s’il y a une étude préalable réalisée par les médias pour questionner l’intérêt du public. Est-ce le public qui sollicite ou est-ce le média qui impose sa ligne ? « Le public se plaint que les médias ne traitent que de la politique. Le coupable ce sont les médias qui ont habitué aux auditeurs et lecteurs à ces sujets plus qu’aux autres ». En dehors de la prédominance des sujets politiques, l’auteur aborde le traitement de domaines, comme, par ex, la Culture et le Sport : la musique bénéficie d’une couverture de loin plus importante que le théâtre, le cinéma et autres ; l’intérêt pour le Football n’a pas d’égal chez les médias locaux, loin devant le volleyball, le handball, le basket et autres disciplines.
Quid de l’indépendance du journaliste et les moyens d’y parvenir ? L’auteur dit ne vouloir qu’ouvrir le débat sur le traitement de l’information, notamment les notions de la vérification et l’équilibrage de l’information. Mais aussi l’environnement de travail, le traitement du journaliste dans la rédaction et l’intérêt. Sachant que l’intérêt du journaliste n’est pas toujours celui du lecteur ou de l’auditeur.
Th Hassane Diallo