La guerre en Ukraine ne fait pas que des blessés, des morts et des refugiés. La bauxite guinéenne aussi est en train de prendre un coup. La ville de Nikolaev qui abrite une des usines qui reçoit l’or rouge serait en arrêt. A cause, dit-on, des bombardements enregistrés dans la ville. L’usine est-elle touchée ? « Je ne crois pas, mais vous savez, il y a la guerre dans le pays et la ville est assiégée. Je ne suis pas sûr que l’usine soit touchée, c’est peut-être pour de mesures des sécurité », a confié une source proche de Rusal. Quant au train minéralier Rusal CBK qui transporte le minerai du site de Débélin au port de Conakry, « il ne roule pas depuis quelque temps », a précisé la source. Des travailleurs en congé technique ? « Il n’y a pas de congés techniques. Mais puisque les activités sont réduites, certains travailleurs ont pris des congés anticipés ». Sauf que selon certaines informations, les entreprises russes commencent à sentir les sanctions occidentales infligées à Moscou suite à l’invasion de l’Ukraine. Rusal CBK qui compte plus de 1000 employés serait en difficulté de paiement.
Déjà, le 14 mars dernier, le Ministre des Mines et de la géologie avait reçu les responsables des Rusal et Nord Gold de la SMD. Les échanges entre les parties avaient tourné autour de la crise ukrainienne et ses impacts sur les activités minières en Guinée. Les miniers avaient rassuré leur interlocuteur quant à la continuité des différentes opérations. Mais, « Rusal a tout de même indiqué que ses exportations vers l’Ukraine ont été temporairement suspendues notamment pour la Compagnie des Bauxites de Kindia CBK ». L’on précise qu’«une des usines qui réceptionnait le minerais se trouvant à Nicolaev en Ukraine ne peut pas être desservie en ce moment à cause de la crise. Les exportations sont donc redirigées vers l’Irlande où exportait déjà la Compagnie des Bauxites et d’Alumine de Dian-Dian COBAD ». Même que Rusal en a profité pour démentir les rumeurs qui font état de l’arrêt d’activités. Concernant les employés en « congés techniques », les responsables avaient révélé que ces congés prennent fin le 10 avril et que les employés concernés vont percevoir leur salaire au complet. Amen !
Quelles conséquences ?
On ne le souhaite pas, mais l’arrêt des activités de Rusal aura des conséquences énormes. Selon Amadou Bah, Dirlo exécutif de l’ONG Actions mines, Rusal exporte entre 2 900 000 et 3 000 000 de tonnes de bauxite par an. L’usine de Nikolaev souffre de manque d’approvisionnement en matière première, conséquence de la fermeture de l’accès par la Turquie qui contrôle les eaux territoriales sur la Mer noire, bloquant ainsi l’accès des navires à la ville. Il ne souhaite pas l’arrêt des activités qui aura des conséquences sociales et économiques en Guinée. « Au-delà des licenciements avec le poids social qu’ils représentent pour l’Etat, l’arrêt des activités sera un gros manque à gagner sur l’économie du pays. Parce que l’entreprise ne paiera pas la RTS et la contribution patronale à la Caisse nationale de sécurité sociale. L’Etat n’aura pas non plus des royalties (les taxes à l’extraction et à l’exportation de la bauxite) qui s’élèvent à 0,075 dollars la tonne, que ce soit pour l’extraction ou l’exportation. Sans compter que l’entreprise paie à la collectivité locale un dollar pour chaque tonne dans le cadre du développement local ».
Th Hassane Diallo