Arrivé au pouvoir le 5 septembre dernier, le CNRD dévoile enfin ses intentions en relation avec la durée de la Transition. En effet, huit mois après sa prise du pouvoir, la junte par la voix du colonel Mamadi Doumbouya, ci-devant Président de la Transition, a dans un speech diffusé à la télévision nationale le samedi 30 avril, annoncé une durée de 39 mois de la transition.
Pour le Président de la transition, «c’est la volonté de la majorité qui tranche les contradictions. Il ressort une proposition médiane d’une durée consensuelle de la transition de 39 mois. Le CNRD [Comité national du rassemblement pour le développement, l’organe dirigeant de la junte] et le gouvernement à leur tour soumettront au CNT [Conseil national de transition], qui tient lieu de Parlement, cette proposition qui est consécutive à de larges et patientes concertations». Nonobstant la volonté exprimée par le Président de la transition le 5 septembre, lors de la prise de pouvoir, il est loisible de constater, que les actes posés depuis ne traduisent pas entièrement l’esprit du fameux discours tenu il y a huit mois. Pour mémoire, la justification du coup de force était donnée par le Président de la transition, qui invoquait, entre autres, «la situation sociopolitique et économique du pays, le dysfonctionnement des institutions républicaines, l’instrumentalisation de la justice, le piétinement des droits des citoyens… »
Sur un tout autre plan, les « larges et patientes concertations » qui constituent la trame de la proposition «médiane d’une durée consensuelle de la transition de 39 mois » sont discutables, par le fait qu’une importante frange des acteurs politiques et de la société civile n’a pas daigné participer au processus de concertations. Dans un souci d’apaisement et d’implication inclusive de toutes les parties prenantes à la gestion de la Transition, il aurait été judicieux de convaincre les réticents à s’associer à la démarche engagée. Autant que faire se peut, l’épreuve de force est à éviter vaille que vaille, au regard du contexte que nous vivons actuellement.
Avis de gros temps
Sans avoir la prétention de jouer aux Cassandres, il est désormais établi que cette annonce de proposition de la durée de la transition marque, à n’en pas douter, la fin de l’état de grâce dont bénéficiait jusqu’à présent le CNRD. Dans les jours et semaines à venir, un front du refus va indubitablement se former pour se faire entendre. De quelle manière et avec quels moyens ? L’avenir nous le dira !
Dans ce climat délétère qui s’annonce ainsi, tous les regards seront braqués du côté du CNT, chargé d’examiner la proposition de la durée de la Transition. Une responsabilité lourde de conséquences pour le pays !
Le trio de pays dans le viseur de la communauté internationale
En séjour à Dakar, le Secrétaire général de l’ONU a souhaité dimanche dernier, que les juntes militaires au Burkina Faso, en Guinée et au Mali s’effacent au plus vite.
«Nous sommes convenus de l’importance de poursuivre le dialogue avec les autorités de facto [à Ouagadougou, Conakry et Bamako] afin d’instaurer le retour à l’ordre constitutionnel dans les délais les plus brefs», a déclaré António Guterres à Dakar, après avoir rencontré le chef de l’État sénégalais, Macky Sall, président en exercice de l’Union africaine (UA). Une injonction déclinée en termes diplomatiques, que les colonels devraient savoir décrypter. Même si à priori, chacun des trois pays concernés ont des réalités spécifiques, il est évident, que par les temps qui courent, la communauté internationale ne s’accommode plus de transitions qui s’éternisent.
Cheick Tidiane