Nombreux les Guinéens qui commencent à s’insurger contre la préférence donnée par le CNRD aux infractions économiques et financières aux dépens des crimes de sang. Le Procureur général Charles Wright, toujours fringant, boulimique et audacieux, vient de leur apporter un peu de réconfort, d’espoir et de sourire en balançant un énorme pavé dans la mare de la junte. Il a initié des poursuites judiciaires contre la crème de l’Alphagouvernance pour des faits relevant des crimes de sang.
Outre le Grimpeur soi-même, 26 de ses ouailles sont citées. Le PM Don Kass, les deux Présidents de l’Assemblée nationale, Claude le Cauris Kondiano et Amadou Dama-ronron, l’inamovible ministre d’Etat de beaucoup de choses, Dr Mohamed le Diané, ainsi qu’une kyrielle de ministres poids lourds et poids légers sont tous là comme de pauvres hères. Même du menu fretin, il y en a. La roue tourne ! Mais le Procureur ne veut pas faire deux poids deux morsures. Les organisateurs de manifs n’échapperont pas, eux aussi, à Dame Thémis qui, il faut l’espérer, ne confondra pas victimes et coupables.
On est déjà curieux de savoir si le Procureur n’est intéressé que par l’Alphagouvernance, car depuis les années 60, l’histoire de la Guinée indépendante est marquée de crimes sanglants. Si c’est le cas, il va falloir que Charles Wright s’inspire du principe de la discrimination géographique et chronologique qui a force de loi à la Cour pénarde internationale, à La Haye. Là-bas, on tamise les auteurs du même crime et on les juge et condamne en fonction de ce que la communauté internationale pense de chacun d’eux. Pour ne condamner que Charles Taylor seul et laisser libres les El Hadj Kromah, Prince Johnson et autres, c’est le TPI pour la Sierra Leone qui l’a jugé pour des crimes commis dans ce pays. Les horreurs subies par les Libériens sont passés par pertes et profits.
Il reste encore un petit caillou dans le soulier du Procureur. A cor et à cris, les assises nationales viennent de se tenir et les CNtêtards terminer leur villégiature à travers le pays. Tout çà, pour pour aider les Guinéens à dialoguer, à se réconcilier et à améliorer leur vivre-ensemble après que les uns ont avoué leur culpabilité et les autres, balbutié leur pardon. Le processus en cours renvoie à la justice transitionnelle en quête plutôt d’harmonie que de châtiment. Les assises et les poursuites judiciaires ne sont-elles pas deux dynamiques antinomiques ?
La tentative de réconciliation chez nos voisins Y-voit-rien a fait long feu, parce que Laurent Gbagbo et Blé Goudé suffoquaient dans les geôles de la CPI, à La Haye. La réconciliation sera-t-elle évidente si tous ces gros animaux politiques sont derrière les barreaux ? Comment promouvoir la réconciliation tout en combattant l’impunité ? Une tâche d’Hercule, mais un défi que Charles Wright va relever. L’appui de Doum-bouillant lui sera indispensable.
Abraham Kayoko Doré