Placée sous contrôle judiciaire, suite à une affaire de viol qui éclabousse l’Orphelinat qu’elle dirige, la Française Laurence Rouyer clame son innocence, charge son mari et serait sur le point de divorcer. Son avocat dénonce par ailleurs un règlement de compte et entend relever appel contre l’ordonnance du juge d’instruction qui place sa cliente sous contrôle judiciaire.

Une affaire de viol ébruitée fin mars éclabousse l’Orphelinat Hakuna Matata (ou la Maison du bonheur), situé au quartier Dabompa, dans la commune de Matoto. Cinq mineures, pensionnaires de cet orphelinat, auraient été sexuellement abusées par le mari de la Fondatrice, la Française Laurence Rouyer. Jusque-là, peu d’informations circulent sur les circonstances des différents cas de viol et l’identité de l’auteur présumé. Si dans un communiqué de la direction de l’Orphelinat l’homme est désigné sous les initiales N.L.C, selon nos informations, les trois lettres nommeraient un certain Nero Lancinet Camara. Arrêté depuis et placé sous mandat de dépôt à la Maison centrale de Conakry, ce dernier n’a pas publié sur sa page Facebook depuis le 30 mars dernier, veille de l’ébruitement de l’affaire. Une coïncidence ? 

Rebondissement

La procédure, pendante devant le tribunal de première instance de Mafanco, a connu le lundi 16 mai un rebondissement. Laurence Rouyer, « surprise », s’est vue inculpée de « complicité de viol et de harcèlement sexuel » sur les cinq filles prises en charge par son centre d’assistance sociale. Elle a ensuite été placée sous contrôle judiciaire par le tribunal de première instance de Mafanco. Selon l’ordonnance du juge d’instruction, la prévenue est interdite de sortir, sans autorisation préalable, des limites de la zone de Conakry. Elle doit se présenter tous les lundis à 10 heures au greffe du cabinet d’instruction, également déposer son passeport. « Tout manquement à une quelconque obligation va entraîner la révocation pure et simple de la mesure et le placement de l’inculpée en détention provisoire », avertit l’ordonnance.

Jointe au téléphone ce mercredi 18 mai, la Fondatrice de Hakuna Matata dit être surprise de la mesure. «Dès que j’ai eu vent de la nouvelle, j’ai directement informé les autorités à travers une plainte, rappelle-t-elle. Ensuite, la justice s’est saisie du dossier pour arrêter le présumé auteur qui n’est personne d’autre que mon mari. Depuis plus d’un mois, il croupit à la Maison centrale. J’ai été surprise d’entendre que je suis la complice d’un acte aussi méprisable et ignoble que le viol».

« J’avais dit à mon mari que les enfants passaient avant lui »

Laurence Rouyer s’était montrée diligente, après que l’affaire a fuité sur les réseaux sociaux, puis dans les médias. Toutefois, c’est la première fois qu’elle indexe officiellement son mari comme auteur du viol présumé. «Bien avant mon union avec mon époux, je lui avais dit que ces enfants passaient avant lui, assure-t-elle. Si je devais choisir entre lui et ces filles, je choisirais toujours en premier les filles». Et de renchérir : «Ce que je ne comprends pas dans les cas de viols en Guinée, c’est que c’est frustrant de dénoncer ton agresseur et que la justice ne fasse rien. Au lieu de punir le coupable, c’est l’innocent qui est inculpé et placé sous contrôle judiciaire. C’est décevant ! Cela décourage même les victimes à dénoncer leur agresseur».

Selon Me Modibo Camara, avocat de Laurence Rouyer, les consignes de sa cliente ont été dès le départ très claires : « Elle m’a dit : Maître, pour élucider cette situation, faites le nécessaire pour que les déclarations qui ont été faites par les filles connaissent une suite judiciaire. Si les faits sont établis contre mon époux, que la législation guinéenne s’applique dans toute sa rigueur ! Mon époux le sait : les enfants sont la raison pour laquelle je consacre ma vie et mon temps en Guinée ».

Laurence Rouyer demande le divorce !

A en croire l’avocat joint par notre rédaction, Laurence s’est toujours battue pour sauvegarder les intérêts des victimes. « Elle a fait toutes les diligences pour que la procédure soit transmise au parquet. Elle a assisté à toutes les étapes de la procédure ».

Avant cette affaire, le couple Camara n’était plus en bon terme, selon Me Modibo Camara. « Elle m’a informé que son union avec ce monsieur était en phase de détérioration très avancée. Elle souhaiterait que parallèlement j’initie d’urgence une procédure de divorce (…)»

L’avocat accuse par ailleurs un fonctionnaire du ministère de l’Action sociale de comploter contre sa cliente. « Ces accusations ne sont ni plus ni moins que les manœuvres de cette personne-là dont je m’abstiens de dire le nom. C’est une personne qui n’a jamais eu intérêt que l’Orphelinat fonctionne dans les conditions normales. J’ai des preuves écrites, des échanges que Mme Laurence a eus avec ce monsieur, les expressions de mépris qu’il emploie envers cette dame antérieurement à ces accusations », soutient Me Modibo Camara.

Appel contre l’ordonnance

L’avocat promet de démontrer l’innocence et la bonne foi de sa cliente. D’ores et déjà, il menace de faire appel contre l’ordonnance qui place Laurence Rouyer sous contrôle judiciaire. « Soumettre une dame qui se consacre aux enfants déshérités guinéens, à abandonner ses obligations et à se présenter chaque lundi pour émarger dans un registre, sur la base des faits qui sont totalement dénués de preuve, c’est causer du tort à ces enfants qui réclament l’assistance et l’affection de cette dame. On ferait mieux d’épargner à cette dame une telle contrainte ».

Kadiatou Diallo