Pour les Guinéens, chaque année de pèlerinage est synonyme de calvaire. Après le Covid-19 qui a empêché les musulmans guinéens de s’acquitter de ce devoir religieux pendant deux ans, voilà que cette année, ceux qui ont eu la chance de partir, ont été arrêtés en possession de faux visas à Médine, en Arabie Saoudite. La police des frontières a découvert que ce ne sont pas leurs noms qui figurent sur les visas délivrés par les autorités saoudiennes. Une situation étonnante et inquiétante qui suscite beaucoup d’interrogations.

Interpellées, les autorités religieuses guinéennes déclinent toute responsabilité dans cette fraude. Invité de l’émission « Mirador » de FIM FM ce mardi 28 juin, le Secrétaire général des Affres religieuses, El Hadj Karamo Diawara, affirme que ces faux visas ne sont pas issus de leur système. «On m’a fait parvenir une copie des visas incriminés. Et on a vu qu’ils ne sont pas sortis de notre système, parce que ces noms ne sont pas dans notre manifeste. Maintenant, est-ce qu’ils ont embarqué à travers nos convois ou est-ce qu’ils sont partis par d’autres moyens? On cherche à le savoir.»

El Hadj Karamo, a souligné que « tous ceux qui arrivent à la Mecque ne partent pas forcément de la Guinée. Vu qu’ils n’ont pas pu obtenir de visas à travers notre système plus sécurisé par rapport aux années précédentes, ils ont falsifié des visas pour voyager. Cette procédure ne vient pas du tout de notre système », soutient le Secrétaire général.

Pour Dr Edouard Sagno, directeur de cabinet du secrétariat général des affaires religieuses, il y a plusieurs méthodes pour faire un faux visa. Il explique « qu’un faux visa, c’est un visa qui a été traficoté. Quand vous prenez le visa de quelqu’un, parce que la personne est peut-être analphabète, vous le filmez avec votre appareil, et vous travaillez dessus : vous enlevez le nom de la personne et vous mettez celui de quelqu’un d’autre. Vous arrangez de telle sorte que le jour où la personne doit voyager, que vous, vous voyagez avant, on appelle cela faux visa. Mais il faut savoir que chaque visa a un numéro. Donc, quand vous arrivez à la Mecque, il faut que vous soyez dans notre système ici à Conakry. Deux personnes ne peuvent pas avoir le même numéro de visa. 4 527 pèlerins guinéens, ça veut dire 4 527 visas. Donc, dès que vous traficotez un seul visa, on va se rendre compte que vous avez fait du faux ».

Edouard déclare aussi que ceux qui accusent les autorités religieuses de Guinée d’être responsables de cette fraude, « sont mal informés ou de mauvaise foi. Même sur le visa américain qui est le plus sécurisé au monde, il y a des gens qui cherchent à le traficoter. C’est pareil pour le visa français. Et maintenant, quand il s’agit du visa saoudien, certains accusent le Secrétariat général des Affaires religieuses, il faut être honnête », a déploré Dr Sagno.

Sur la question de savoir si les pèlerins arrêtés avec ces faux documents ont été expulsés comme le prétendent certaines personnes, le Secrétaire général dit être en train de formuler sa plainte à «à l’intention de la police judiciaire. Je voudrais que ces deux personnes servent d’exemple. Un tel acte risque de salir notre pays».

Le calvaire des pèlerins

Parlant des guides de nos pèlerins, le SG explique que chaque année, ils sont constitués en deux groupes : ceux qui résident en Arabie Saoudite et ceux qui voyagent avec les fidèles. « Ces deux groupent travaillent ensemble, pour guider les pèlerins, (…) vous n’êtes pas sans savoir que la plupart de nos pèlerins sont des personnes âgées. Selon le ratio, leur rôle est de juste orienter les pèlerins partout où ils doivent se rendre, et c’est un guide pour cinquante pèlerins. Le problème qu’on a, est que chaque pèlerin veut avoir son guide à lui seul. Ce qui est impossible.»

Depuis leur arrivée en Arabie Saoudite, les pèlerins guinéens sont confrontés à d’énormes difficultés liées notamment au logement, la nourriture, le déplacement. Conscient de ce calvaire, El Hadj Karamo Diawara a instruit le consul guinéen en Arabie-Saoudite à remédier à ces problèmes.

Il justifie le retard dans l’approvisionnement en nourriture des pèlerins guinéens par la limitation de l’accès aux logements. « Le restaurateur m’a dit que les logements que nous avons pris cette année sont plus proches de la grande mosquée. On ferme toutes les entrées à partir de 11 heures. Une heure après la prière, aucun véhicule n’a accès à l’hôtel. C’est pourquoi pour les repas, nous accusons du retard. J’ai donné l’instruction ferme au consul de veiller strictement à cela et faire en sorte que même si la nourriture va se refroidir après, mais de le servir à temps (…) Donc la qualité et la quantité ne dépendent pas de nous, cela dépend des restaurateurs saoudiens ». Et toc !

Kadiatou Diallo