Après un mois d’immersion à l’intérieur du pays, les membres du gouvernement ont regagné la capitale Conakry le 17 juin. Dans la soirée d’hier lundi 27 juin, les ministres Alpha Soumah (Bill de Sam), de la Culture, de l’Hôtellerie et du Tourisme, Lansana Béa Diallo de la jeunesse et des Sports, et Charlotte Daffé, de la Pêche et de l’économie maritime, ont conjointement animé un point de presse à la maison de la presse. Ils ont fait à tour de rôle un bref compte-rendu des quatre semaines de travail de terrain qu’ils ont réalisé à l’intérieur du pays.
S’exprimant le premier, le ministre Soumah est revenu sur l’importance de cette immersion pour son département. Selon lui, « il s’agit d’une occasion unique de constater, dresser un bilan et envisager des perspectives pour répondre aux besoins des producteurs d’œuvres d’art à l’intérieur du pays ».
« Le but, c’était d’abord de ressouder l’équipe gouvernementale. Être en contact direct avec la population, s’enquérir des réalités sur le terrain et essayer de rectifier le tir et prioriser des zones qui étaient jusque-là nettement abandonnées ».
Concernant l’état des centres culturels et des acteurs dans la Guinée profonde, Alpha Soumah constate que « les rapports des structures déconcentrées ne remontent pas assez d’informations sur l’état véritable des lieux. Cette immersion a été une grande leçon pour nous. De N’zérékoré à Kindia en passant par Kankan et Labé, les réalités sont les mêmes. Nous manquons énormément d’infrastructures culturelles. Les centres d’expositions artisanales sont très vétustes et quasiment non opérationnels, sans aucune gestion à la base. Il fallait être sur place pour réaliser la profondeur de la plaie, car différente de ce que nous rapportent les rapports. Qu’il s’agisse des dispositifs hôteliers, touristiques ou culturels, rien ne répond à la norme. À cela, s’ajoute un grand dysfonctionnement de l’administration et des ressources humaines », s’est indigné le ministre.
Conscient des efforts à fournir, le ministre promet de tout mettre en œuvre pour « pallier ces multiples problèmes et changer la donne ». Il a ajouté que désormais, ils vont changer les équipes locales, construire des villages artisanaux et implanter des campements au pied du mont Nimba pour les touristes.
Les infrastructures sportives au centre des préoccupations
Pour sa part, le ministre de la Jeunesse et des Sports Lansana Béa Diallo trouve que « la situation est catastrophique ». Et que cette immersion a permis à beaucoup de ministres « qui pensaient connaître la Guinée, de la connaître réellement et d’être devant les faits ». Il estime qu’il faut changer les priorités et « faire face aux véritables problèmes du pays qui, apparemment, se situent à l’intérieur du pays ». Selon lui, « la Guinée n’a pas avancé depuis 1990, et ça, il faut se rendre en Guinée profonde pour s’en apercevoir ».
A l’image de son prédécesseur Bill de Sam, le ministre, des Sports trouve « flagrant le problème des services déconcentrés. Il n’y a pas de personnel et le travail n’est pas optimal ». En termes d’infrastructures sportives, Béa affirme que « c’est une catastrophe à l’image des grandes villes du pays, les villes comme Kerouané, Koubia et Tougué, sont complètement dans les oubliettes. Ce sont des zones où les gens n’ont plus d’espoir, et c’est ce qui les pousse à l’émigration clandestine ».
La CAN 2025, une priorité gouvernementale
« On a beaucoup de stades, mais aucun ne répond aux normes pour pratiquer du sport. Notre grand défi est de mettre en place des outils dans ces zones isolées pour l’émancipation de la jeunesse et des Sports de base et créer des dynamiques économiques pour relancer le pays. N’oubliez pas qu’on a un grand défi qui s’appelle la CAN-2025, même si beaucoup sont sceptiques. Ce qu’il faut voir, c’est ce qui amène la CAN et ce qui la développe », s’interroge Béa
Le ministre Béa qui se montre très confiant quant aux capacités de la Guinée d’organiser la Coupe d’Afrique en 2025, annonce la construction prochaine de « six stades de compétitions, 25 stades d’entraînements, des logements à l’intérieur du pays, des routes et des aéroports. Ce qui sera une véritable occasion de créer de l’emploi. Donc, la Guinée ne peut pas, ne pas organiser cette CAN quoi qu’il en coûte. Elle aura lieu en 2025 », promet le ministre qui s’engage à mettre en place une planification, créer une économie circulaire et revoir les priorités dans les zones reculées.
La mauvaise qualité du poisson à l’intérieur du pays indexé
À sa prise de parole, la ministre de la Pêche et de l’économie maritime Charlotte Daffé, a, à son tour, mis l’accent sur « l’absence totale de l’administration publique de son département, à l’intérieur du pays », affirmant, qu’à travers cette immersion, elle est allée « terminer ce qu’elle avait commencé il y a quelques mois, car le constat n’est pas du tout reluisant ».
Charlotte Daffé explique qu’elle a pu identifier le problème dans son secteur, et le premier constat révèle « un manque d’infrastructures dans les services déconcentrés. J’ai eu à visiter les débarcadères, les organisations socioprofessionnelles, les mareyeurs, les cadres des services de bases, mais ce sont les mêmes problèmes partout. J’ai également visité les entrepôts frigorifiques, et je me suis rendue compte malheureusement que l’intérieur du pays n’est pas approvisionné comme cela se doit, et le poisson n’y est pas acheminé n’est dans les conditions requises ».
Interrogée sur la rareté et la cherté du poisson dans les marchés, la ministre qui déplore le pouvoir d’achat du Guinéen, affirme que la majeure partie des pêcheurs n’a pas de licence et travaille en sous-traitance, outre des difficultés liées à la conservation du poisson. Elle a également pointé du doigt la hausse du prix du carburant, qui, selon elle « impacte pratiquement tous les secteurs ».
Dans les jours à venir, Charlotte Daffé entend « corriger rapidement ces tares ». Elle envisage de prendre des notes de service, nommer un personnel compétent pour la réalisation des travaux qu’elle a entrepris à l’intérieur du pays, meubler les services déconcentrés, installer des entrepôts frigorifiques et des centres de fumages des poissons. Le reste sera installé progressivement.
Abdoulaye Bah