Beaucoup de non-juristes se moquent souvent des juristes à cause de leurs récurrentes divergences d’interprétation sur des questions juridiques. Faut-il s’en offusquer quand on est juriste? La réponse est non. Les règles de droit sont faites pour être appliquées. Mais l’application d’une règle de droit nécessite parfois une interprétation, car celle-ci peut ne pas être suffisamment claire pour être comprise de tous de la même manière.

Les justiciables saisissent le juge parfois en raison d’une opposition interprétation, chacun ayant sa propre interprétation de la même règle. Et quand ils confient leurs intérêts à des avocats pour les défendre, ces derniers peuvent avoir également des divergences dans l’interprétation d’une même règle. Mais comme aucun ne peut imposer à l’autre son interprétation, ils sont obligés de soumettre le litige au juge dont l’interprétation s’impose aux parties en conflit. Il peut arriver fréquemment que l’interprétation de la règle de droit ne soit pas acceptée par l’une ou l’autre partie. Et même par les deux parties parfois.

D’où la possibilité des voies de recours pour soumettre le différend à une juridiction supérieure composée de juges plus anciens, plus expérimentés, censés avoir une meilleure connaissance des textes et donc moins exposés à commettre des erreurs d’interprétation.
Cependant, même avec cette garantie liée à l’ancienneté et à l’expérience des juges siégeant au sein de la juridiction supérieure, les risques de mauvaise interprétation de la règle de droit ne sont pas à exclure. Il peut même arriver que sur une même règle de droit, deux juridictions supérieures (exemple : la Cour d’appel de Conakry et Cour d’appel de Kankan) n’aient pas la même interprétation.

C’est pourquoi, il existe au sommet de la pyramide ce qu’on appelle de hautes juridictions (Cour suprême, Cour de cassation et Conseil d’État). Celles-ci sont censées être composées de juges encore plus anciens et plus expérimentés. L’interprétation de ces hautes juridictions fait jurisprudence et s’impose à toutes les juridictions inférieures. Mais il peut même arriver que certaines juridictions inférieures «se rebellent» contre l’interprétation de la haute juridiction sans compter que deux ou trois chambres d’une haute juridiction se contredisent dans l’interprétation d’une règle de droit.

En somme, la règle de droit est faite pour être interprétée quand il le faut. Raison pour laquelle il est prévu des règles et des maximes d’interprétation. L’essentiel, c’est qu’il y a une interprétation qui fait autorité. C’est là qu’intervient au rôle combien des juges et du plus « haut » parmi eux dans l’organisation judiciaire.

Me Traoré