Fiancé et père de deux enfants, le reggae-man Baba Samba a tiré sa révérence le dimanche 16 octobre à Bamako au Mali. Rapatrié en Guinée sur le toit d’un taxi, après une immense indignation que cela a suscité, un dernier hommage lui a été rendu ce mercredi 19 octobre à l’hôpital de l’Amitié sino-guinéenne. Le défunt laisse derrière lui un héritage dont deux albums (Allah Sembè) sorti en 2011 et (Mon honneur) en 2017.
La levée du corps a eu lieu à 9h 30. Famille éplorée, amis, collaborateurs et acteurs culturels étaient présents à la cérémonie funèbre. Sous le choc, Amadou Sow, l’un des frères de la victime, a exprimé l’indignation de sa famille à cause du traitement réservé à son grand-frère notamment par le Département de la Culture. «C’est vrai que ce ne sont pas les autorités qui ont tué notre frère, mais après tout ce qu’il a fait pour la jeunesse et la culture guinéenne, il méritait un meilleur traitement. Le monde entier a vu la dépouille de Baba Samba attachée sur le toit d’un taxi, c’est une honte pour nous, cela fait mal». Amadou Sow estime que les autorités culturelles auraient pu s’impliquer davantage. « Moi-même je suis artiste, mais cela n’encourage pas. Cette manière de le laisser sur un taxi de Bamako à Conakry n’est pas normale. Il y a eu beaucoup de difficultés sur la route, la voiture est tombée en panne à Linsan. Nous sommes tristes et déçus ».
Présent sur les lieux, l’artiste Elie Kamano, garde le souvenir d’un jeune artiste « engagé et talentueux ». Le reggae-man reconnaît que dans cette affaire, «les acteurs culturels ont failli. Ça ne devrait pas se passer ainsi, nous sommes touchés par cette situation et au nom des artistes et de la culture, nous présentons nos excuses à la famille et aux Guinéens ».
Le ministère de la Culture dédouané
Administrateur en chef de Benedi-Records, Ibrahima Kalil Dioubaté est l’une des personnes qui ont approché le ministère de la Culture pour le rapatriement du corps de Baba Samba par voie aérienne ou par une ambulance médicalisée. Il explique qu’il y a une grande incompréhension. « Baba Samba représentait le drapeau guinéen. Sur ce point, je pourrai condamner l’ambassade de la Guinée au Mali. Après le décès, ses amis se sont rendus à l’ambassade. On nous a fait comprendre que l’ambassade a pris tout cela en charge, mais ce n’était pas le cas. Ici, on s’est entretenu avec le ministre qui était en train de prendre des dispositions pour le rapatriement du corps. Il avait proposé soit de le ramener par vol où dans une ambulance médicalisée. Au moment pour nous de faire part de la décision à Bamako, on nous a fait comprendre que la famille et ses amis sont en train d’embarquer le corps, que l’ambassade n’a rien pris en charge. Les images ont commencé à circuler et on ne pouvait plus rien… »
Représentant de la culture au CNT, le comédien Mamadou Thug voit les choses autrement : « C’est vrai que nous avons sollicité le ministère de la Culture, mais ce n’était pas une obligation. Chacun peut faire des erreurs. S’il y a eu des erreurs dans ce cas-ci, on s’excuse. Je suis acteur culturel, donc je ne souhaite pas revoir un artiste sur le toit d’un taxi. C’est une expérience que nous allons corriger petit à petit. On peut dire que les autorités ont failli à ce protocole. On pouvait louer au moins une ambulance, car c’est une question d’images pour l’artiste et pour nous. Mais il faut aussi savoir que le ministère de la Culture n’est pas un ministère des Affaires sociales. Même s’il essaye, il ne peut pas s’occuper de tout ce qui lui tombe dessus. C’est pourquoi, les artistes doivent s’unir ».
Les quelques hauts cadres qui ont représenté le ministère de la Culture à cette cérémonie n’ont pas souhaité s’exprimer. Après cet ultime hommage, la dépouille de Baba Samba a été conduite à la mosquée de Gbessia-port-1, pour la prière funéraire, suivie de l’enterrement au cimetière de Gbessia port-1 où repose désormais le talentueux reggae-man, pour l’éternité.
Abdoulaye Bah