En safari en Guinée Forestière, le ministre de la Justice et des droits de l’Homme, Charles Wrong, touche du doigt les mots qui assaillent la justice guinée-haine, la boussole de la Transition. Entre conditions carcérales précaires, états délabrés des maisons d’arrêt et des sièges des tribunaux, ainsi que le fonctionnement des juridictions, le ministre n’en finit pas de dénoncer les anomalies dans la région. Seulement, voilà ! Quand le ministre dénonce, on ne sait pas qui répare.
Après l’annonce de son intention de remplacer les justices de paix par des tribunaux de première instance, Charles Wright s’attaque aux crimes rituels, aux vindictes populaires et aux troubles à l’ordre public dans la région forestière. Ces crimes et infractions y sont récurrents face à un système judiciaire amorphe.
«Je n’ai pas d’état d’âme quand il s’agit de respecter la loi », a déclaré le ministre, le 25 janvier à Lola, avant de mettre en garde les auteurs des vindictes populaires, des crimes rituels et des troubles à l’ordre public. « Lorsqu’un marabout dit : ‘’ Il faut aller cueillir l’enfant de tel ‘’, c’est grave ! On engagera une bataille sans merci contre ceux qui font des crimes rituels, ceux qui se soulèvent contre l’autorité de l’Etat en semant la pagaille, le désordre. J’ai indiqué à tous les juges que la justice ne tremblera jamais en Guinée Forestière. On ne peut pas dire que la justice s’arrête à Conakry. Bien qu’elle y siège, elle doit s’appliquer sur toute l’étendue du territoire national ».
L’ex-maire au gnouf
Sur instruction du ministre Charles Wrong, l’ex-maire de Lola, Yona Doré, a été placé sous mandat de dépôt à NZérékoré. Il est soupçonné d’avoir détourné plus de douze milliards de francs guinéens octroyés à la préfecture dans le cadre de la réalisation des infrastructures liées au cinquante-cinquième anniversaire de l’indépendance nationale, le 2 octobre 2013. M. Charles en a été informé à la faveur de son entretien avec le populo, le mercredi 25 janvier. Immédiatement, le ministre a ordonné aux forces de sécurité de déposer l’ex-maire de Lola à la gendarmerie du coin pour être entendu sur les faits qui lui sont reprochés. «Je ne peux pas comprendre que l’Etat puisse allouer des fonds à des projets de développement et qu’on ne puisse pas justifier leur utilisation », s’étonne le ministre.
«Il y a eu plus de douze milliards de francs guinéens qui ont été alloués à Lola dans le cadre des fêtes tournantes de l’indépendance, entièrement financées par le budget national du développement (BND). Mais, lorsque nous sommes venus dans la ville, le constat a relevé qu’il n’y a pas d’impact positif de ce qui a été déboursé, d’où la question de savoir où sont passés et comment sont utilisés les douze milliards de francs guinéens octroyés à Lola. Ceux qui ont géré sont là, en premier lieu le maire. Si on me dit que c’est l’arc-en-ciel à l’entrée de la ville pour souhaiter la ‘’ Bienvenue à Lola’’ qu’on a construit, c’est l’hôpital qui se fout de la charité. On a dit que cela ne peut pas justifier. L’enquête va se poursuivre», indique Charles Wright.
Le régisseur révoqué
En outre, le régisseur de la prison civile de Lola a été révoqué de ses fonctions, puis poursuivi pour des faits présumés «d’abus d’autorité et de concussion» à l’encontre des détenus. «On ne peut pas comprendre que pendant des années, il se transforme en celui-là qui demande aux détenus cinq mille francs guinéens pour les faire sortir de leurs cellules. En principe, quand le citoyen en conflit avec la loi est enfermé toute la nuit, le matin il y a un espace qui lui est réservé pour son épanouissement. Mais, s’il faut conditionner sa sortie au paiement de cinq mille francs guinéens, alors il a encaissé combien ? Tout l’argent qu’il a perçu va être versé au trésor public», déclare Charles Wright. Et lui, que devient-il ?
Yaya Doumbouya